Le suspense a pris fin peu avant 13h ce vendredi 12 décembre. Par voie de communiqué, l’Elysée a annoncé la nomination de François Bayrou au poste de Premier ministre, en remplacement de Michel Barnier, dont le gouvernement avait été censuré mercredi 4 décembre. Le patron du Modem avait longuement été reçu dans la matinée par le chef de l’Etat.
Trois fois candidat malheureux à l’élection présidentielle en 2002, 2007 et 2012, François Bayrou, 73 ans, a été ministre de l’Éducation nationale sous les gouvernements Balladur puis Juppé (1993-1997). En 2017, après l’élection d’Emmanuel Macron, dont il est aujourd’hui le principal allié, il est nommé garde des Sceaux. Une fonction qu’il n’occupera que 35 jours et dont il démissionne en raison de l’affaire présumée d’emplois fictifs pesant sur le Modem et pour laquelle le nouveau Premier ministre a été relaxé en février dernier. Le parquet a cependant fait appel de la décision.
Bilan mitigé
Depuis 2020, François Bayrou, également maire de Pau, était bénévolement à la tête du Haut-commissariat au plan, une instance créée par Emmanuel Macron, censée renouer avec le commissariat général au plan (CGP) créé en 1946 par le général de Gaulle. Son bilan a été critiqué à plusieurs reprises, en raison notamment de sa faible influence sur la planification du pays.
En matière d’écologie par exemple, le Haut-commissariat au plan était en concurrence avec le secrétariat général à la planification écologique (SGPE), rattaché jusqu’à peu à Matignon. S’il a pu produire des rapports intéressants sur l’électrification ou la géothermie, ceux-ci n’ont pas été médiatisés ni particulièrement mis en avant et, selon la sénatrice Vanina Paoli-Gagin (Les Insoumis) “ne servent qu’à garnir des bibliothèques”.
François Bayrou, au poste de Premier ministre, aura-t-il la volonté d’aller plus loin ? Si l’écologie n’a jamais été au cœur de sa politique, le centriste a soutenu lors de ses différentes campagnes présidentielles la création d’un “grand ministère de la nature et du développement durable”, la mise en œuvre d’une “taxe carbone“ sur les carburants d’origine fossile ou encore le concept d'”écologie positive”, qui prend en charge “la totalité des liens de l’homme avec la nature”. Il est également en faveur des énergies renouvelables et défend le nucléaire comme une “énergie de transition”.
“Les enjeux écologiques, les grands oubliés”
Du côté des ONG, c’est le scepticisme qui règne. Pour Greenpeace, la nomination de François Bayrou, ne garantit pas “de renouveau écologique et social”. “Peut-on encore attendre quelque chose du nouveau gouvernement ?“, questionne Jean-François Julliard, directeur de Greenpeace France. “Sans légitimité démocratique, sans majorité claire et sans plan d’action concret, les enjeux écologiques et de justice sociale risquent d’être à nouveau les grands oubliés de la politique gouvernementale”, ajoute-t-il.
A gauche, les critiques sont également acerbes. “Tout ça ressemble à du mauvais vaudeville”, a fustigé, sur BFM-TV, Marine Tondelier, la secrétaire nationale des Ecologistes. “C’est incompréhensible sur le plan électoral”, a-t-elle ajouté, en référence aux résultats des dernières élections législatives. La patronne des écologistes estime que ses députés n’auront “d’autre choix” que de censurer le gouvernement de François Bayrou s’il ne change pas de politique économique et s’il garde “Bruno Retailleau à l’Intérieur”.
Mathilde Panot, pour La France Insoumise, a d’ores et déjà annoncé que son groupe déposerait une motion de censure que le RN ne devrait, a priori, pas voter. “Ce sera la censure, sauf épiphanie“, indique également François Ruffin, le député de la Somme, rattaché au groupe écologiste à l’Assemblée nationale. Il estime qu’avec ce choix Emmanuel Macron “se moque des Français”. “Eux exigent du changement, lui choisit son allié depuis sept ans ! Le gardien de son bilan ! C’est une folie pour le pays, pour sa démocratie”, a-t-il lancé. Le PS demande à François Bayrou de renoncer au 49.3 en échange d’une non-censure. Quant au groupe Les Républicains, une réunion est organisée cet après-midi pour définir sa position.