Publié le 5 septembre 2024

Fini le Nutri-Score sur les Actimel, Danonino ou encore Activia. Face aux durcissements des critères de ce logo nutritionnel qui fait dégringoler en bas du classement les notes des yaourts à boire de Danone, la multinationale fait machine arrière. Un désaveu pour le groupe qui a été un des premiers à l’afficher volontairement sur ses produits.

Il est loin le temps où Danone bataillait pour rendre obligatoire le Nutri-Score. Mercredi 4 septembre, le géant de l’agroalimentaire a annoncé qu’il n’afficherait plus ce logo nutritionnel arc-en-ciel, allant de A à E, sur ses yaourts à boire. En cause : des nouvelles règles qui viennent durcir les critères de notation. Actimel, auparavant classé en B, bascule en D. Pour la version multifruits, ce sera un E. Car désormais, les yaourts à boire sont considérés comme des boissons et non comme des aliments, et sont ainsi comparés aux autres produits de cette catégorie. Or la teneur en sucre de ces boissons les pénalise.

Le yaourt à boire pour enfants Danonino plonge aussi à D, “comme une boisson soda sucrée”, déplore un porte-parole, remarquant que le yaourt Danonino consommé à la cuillère “reste en B” avec “des valeurs nutritionnelles similaires”. Mais même si la quantité de sucre est équivalente, la distinction entre yaourt solide et à boire est “pertinente” pour Serge Hercberg, professeur de nutrition à l’université Sorbonne Paris Nord et concepteur du Nutri-Score : le second est surtout pris en dehors des repas, comme “snack liquide”, au risque d’amener “à une consommation importante chez les enfants et adolescents”.

Une “révision de l’algorithme” que Danone conteste. “Cette évolution apporte une vision erronée de la qualité nutritionnelle des produits laitiers à boire”, explique l’entreprise dans un communiqué transmis à Novethic. Elle a ainsi décidé de “retirer progressivement” le logo des produits mentionnés. Le Nutri-Score vient ainsi de perdre un de ses plus fervents défenseurs. Un “pionnier du Nutri-Score” comme le revendique l’entreprise elle-même sur son site internet.

“Le symbole d’un ancien monde qui se réveille”

“Danone a été une des plus grandes entreprises a réclamé que le Nutri-score devienne obligatoire, arguant que c’était un levier indispensable dans la lutte contre l’obésité, se rappelle David Garbous, ancien de Fleury Michon, qui avait signé une tribune aux côtés de la multinationale, appelant à cette réforme. C’était en 2020, il y a quatre ans. Depuis, les critères se sont durcis et Emmanuel Faber, ancien PDG du groupe et fer de lance de l’alimentation durable, a été évincé par les actionnaires jugeant la rentabilité insuffisante. “C’est un peu le symbole d’un ancien monde qui se réveille. Au lieu d’améliorer la qualité des produits, Danone préfère se retirer”, se désole David Garbous, désormais Président du collectif En Vérité, association qui milite pour la transparence alimentaire.

Pour les ONG comme Foodwatch et l’UFC-Que-Choisir, le retrait de Danone est une preuve de plus que “l’affichage du Nutri-Score sur la base du volontariat ne permet pas d’assurer la bonne information des consommateurs”. “Si le Nutri-Score était obligatoire, on ne serait pas dans cette situation”, dénonce auprès de Novethic Audrey Morice, chargée de campagnes chez Foodwatch. “La décision de Danone est inadmissible”, conclut-elle.

Risque de réputation

D’autant que Danone n’est pas le seul à avoir suivi ce chemin. En novembre dernier, deux mois avec le durcissement des critères, la marque française Bjorg, spécialisée dans le bio, avait également retiré le Nutri-Score de ses produits. Officiellement, elle souhaitait se tourner vers le Planet-Score, un indicateur dédié aux impacts environnementaux. Officieusement, l’UFC-Que-Choisir avait calculé que la moitié des biscuits de la marque et un tiers de ses boissons végétales auraient reçu la note E dans la nouvelle version du Nutri-Score.

En faisant le choix du retrait, les deux entreprises s’exposent pourtant à un risque réputationnel. Le Nutri-Score est devenu en quelques années un véritable marqueur pour les consommateurs. Plus d’un Français sur deux aurait ainsi changé au moins une de ses habitudes d’achats grâce à cette notation, selon une étude du gouvernement en 2021. “Les consommateurs vont évidemment questionner les convictions d’une entreprise comme Danone qui fait marche arrière. Cela met en danger sa crédibilité”, prévient David Garbous.

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