Publié le 27 janvier 2024
Gabriel Attal espérait une sortie de crise rapide. Le bilan est mitigé. Si le Premier ministre a cédé aux demandes les plus pressantes, aucun changement de fond, à long terme n’a été annoncé. Quelques barrages ont été levés mais la FNSEA et la Confédération paysanne ont appelé à poursuivre le mouvement.
C’est dire si Gabriel Attal était attendu par les agriculteurs. Après plusieurs jours de manifestations et de blocages, le Premier ministre s’est rendu vendredi 26 janvier dans une exploitation agricole à Montastruc-de-Salie en Haute-Garonne. “Je suis venu parce que vous avez voulu envoyer un message et je suis venu vous dire que le message, on l’a reçu 5 sur 5, que je vous ai entendus, qu’on vous a entendus”, a-t-il dit en promettant un “sursaut agricole”. 

 

Pour apaiser la colère des agriculteurs, le gouvernement a accédé aux demandes les plus pressantes. Après avoir dénoncé les “discours culpabilisateurs” et critiqué “ceux qui opposent la défense de nos agriculteurs et la défense de l’environnement”, Gabriel Attal a annoncé l’annulation de la hausse, pourtant actée dans le budget 2024, de la taxe sur le gazole non routier agricole, qui devait augmenter progressivement jusqu’en 2030.

 

Pas de sortie de crise rapide

 

Évoquant un “mois de la simplification” d’ici au Salon de l’agriculture qui s’ouvre fin février, le chef du gouvernement a aussi cité les “curages” des cours d’eau ou le raccourcissement des délais de recours contre les projets de stockage d’eau et d’extension des bâtiments d’élevage. Sur le volet de la rémunération et le respect des lois Egalim qui visent à protéger les revenus des agriculteurs dans le cadre des négociations avec les industriels et les supermarchés, Gabriel Attal a annoncé des sanctions contre trois entreprises qui ne respectent pas la loi. Il a par ailleurs promis un renforcement des contrôles et une “pression maximale” sur les négociations en cours entre les acteurs.

 

Est-ce suffisant ? Pour l’éleveur occitan Jérôme Bayle, initiateur du premier barrage, devenu une figure de la contestation, oui. “Si on s’est battus, c’est pour arrêter tout ça (…) ce soir je vous annonce que demain midi l’autoroute pourra circuler”, a-t-il annoncé aux côtés du Premier ministre. Mais l’Occitanie n’est pas la France, a rappelé quelques minutes plus tard le patron de la FNSEA, Arnaud Rousseau, douchant les espoirs d’une sortie rapide de la crise en appelant à “poursuivre cette mobilisation”. “Ce qui a été dit ce soir ne calme pas la colère, il faut aller plus loin”, a-t-il dit sur TF1, alors que le syndicat majoritaire, associé aux Jeunes agriculteurs, a mobilisé “plus de 72 000 agriculteurs” dans “85 départements” pour exprimer un malaise profond.

 

Pas de changement structurel et à long terme

 

Et ce malaise, qui s’était exprimé à coups de panneaux retournés de signalisation fin décembre pour dénoncer une “agriculture qui marche sur la tête”, n’est pas dissipé. Ce qui manque ? Le long terme. Si Gabriel Attal a tenté d’exposer sa “vision” insistant sur l’indépendance agricole et la souveraineté, il n’a tranché que sur des “mesurettes”. Il a ainsi annoncé que le Président de la République porterait la demande de dérogation sur la conditionnalité de la PAC imposant sur les terres arables, 4% d’infrastructure agroécologique et de jachères.
Il a cédé aux agriculteurs la mise sous tutelle de l’Office français de la biodiversité aux préfets. Des mains tendues pour apaiser. “Sans changement structurel, les réponses au coup par coup ne font pas une  politique agricole”, a dénoncé la Confédération paysanne, qui a également appelé à continuer la mobilisation sous “différentes formes”. 

 

Dans la sphère écolo, devenue une cible facile dans cette crise agricole, c’est la douche froide. Greenpeace dénonce ainsi des “pansements sur une jambe de bois”. “Nous le réitérons : l’écologie ne s’oppose pas à l’agriculture, bien au contraire”, insiste Sandy Olivar Calvo, chargée de campagne agriculture. “Le nouveau chapitre promis par Gabriel Attal est une promesse creuse, parce qu’en réalité, il n’envisage aucun changement de fond, aucune rupture avec la logique actuelle qui met les agriculteurs au pied du mur”, a également dénoncé l’eurodéputée écologiste Marie Toussaint.
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