Publié le 21 septembre 2017
10 ans après "Le monde selon Monsanto", Marie-Monique Robin remet le couvert. La journaliste d'investigation livre un nouveau documentaire sur les coulisses du tribunal citoyen de Monsanto. À travers les témoignages d'agriculteurs, d'experts et de particuliers des quatre coins du monde, elle retrace l'ampleur du scandale sanitaire lié au glyphosate, l'agent actif du désherbant le plus vendu au monde, le Roundup.

C’est un tribunal citoyen inédit qu’a filmé Marie-Monique Robin dans son nouveau documentaire "Le Roundup face à ses juges". En avril 2017, à la Haye, un tribunal a jugé Monsanto, pour l’ensemble de ses activités. Les chefs d’accusation : écocide, atteinte au droit à l’environnement, à l’alimentation, à la liberté de recherche…
Même si le réquisitoire était étayé de faits, le jugement n’aura pas de répercussions immédiates. Les juges sont de vrais magistrats mais ce tribunal citoyen n’est pas officiel. Il a pour but de juger la firme en vertu du droit international, de fédérer les témoignages et de mettre en exergue les pratiques d’une société qui nuit profondément à la santé.
"Si, au XXe siècle, le tribunal de Nuremberg a défini "le crime contre l’humanité", aujourd’hui c’est la planète et la biodiversité que l’on détruit. Il faut inventer une figure pénale à la hauteur de cet enjeu, afin de pouvoir poursuivre au pénal les multinationales qui s’en rendent coupables", explique Marie-Monique Robin.


"Ce pulvérisateur nous a apporté la mort, alors qu’on voulait simplement gagner notre vie"
À la barre, des citoyens venus témoigner des ravages sur leur santé du glyphosate, l’agent actif du Roundup, l’herbicide le plus vendu au monde. La journaliste s’est focalisée sur quatre témoignages venant des États-Unis, de France, d’Argentine et du Sri Lanka. De la femme enceinte au producteur de riz ayant développé une maladie des reins, tous accablent le Roundup. "Ce pulvérisateur nous a apporté la mort, alors qu’on voulait simplement gagner notre vie", raconte ainsi un riziculteur srilankais, malade.
C’est à partir de ces témoins clés que Marie-Monique Robin raconte l’ampleur du scandale sanitaire lié au Roundup. "Cette molécule (NDLR, du glyphosate) est l’une des plus toxiques de l’histoire industrielle, et chacun en a des résidus dans son organisme. Il s’agit d’un énorme enjeu de santé publique !", alerte la journaliste qui pointe non seulement la responsabilité de Monsanto mais aussi celle des agences gouvernementales parfois minées par les conflits d’intérêt.
Une agence européenne copie-colle une expertise de… Monsanto
En témoigne cette nouvelle révélation diffusée vendredi 16 septembre par les quotidiens La Stampa et The Guardian. Selon les deux journaux, une centaine de pages du rapport de l’EFSA (Agence européenne de sécurité des aliments) sur le glyphosate serait un copié-collé de l’expertise déposée par la Glyphosate Task Force, un lobby créé et géré par Monsanto.
"D’un côté, il existe des chercheurs indépendants, en général des universitaires, qui n’ont pas d’intérêts financiers dans les résultats de leurs recherches, et de l’autre, des études commanditées par l’industrie – non publiées dans les revues scientifiques et couvertes par le secret commercial –, qui sont transmises aux agences de réglementation : une aberration", explique Marie-Monique Robin.
La France va voter contre une nouvelle autorisation du glyphosate
Un documentaire qui tombe à point nommé. En décembre, les pays membres de l’Union européenne devront enfin décider s’ils renouvellent ou pas l’autorisation du glyphosate. Le ministre de la Transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, a indiqué qu’il voterait contre cette ré-homologation. Au Sri Lanka, à la suite d’une bataille juridique, un lanceur d’alerte et un député bouddhiste ont obtenu l’interdiction du produit sur le territoire.
Le documentaire "Le Roundup face à ses juges" sera diffusé le 17 octobre prochain à 20h55 sur Arte.
Marina Fabre @fabre_marina

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