Publié le 21 août 2025

Partout dans le monde, les acteurs du secteur hôtelier et du tourisme font face à la hausse des risques climatiques : montée des eaux, érosion, canicules… Mais le secteur peine encore à s’adapter, malgré l’inquiétude.

“Pour nous, le climat est le risque numéro un”. Ces mots ne sont pas ceux d’une militante écologiste, mais bien ceux de la vice-présidente du grand groupe hôtelier espagnol Iberostar, Gloria Fluxà Thienemann. Pour la femme d’affaire, qui s’exprimait fin juin lors de la Semaine du Climat de Londres, le changement climatique constitue en effet une menace existentielle pour les industries hôtelières et pour le secteur du tourisme d’une manière générale. “Nous opérons plus de 80% de nos hôtels dans des zones exposées, comme les zones côtières”, explique ainsi Gloria Fluxà Thienemann. Des zones qui sont les plus exposées aux conséquences de la crise climatique : montée des eaux, événements météorologiques destructeurs, érosion côtière, mais aussi canicules et feux de forêt… 

L’inquiétude est partagée par un nombre grandissant d’acteurs du secteur, qui constatent année après année la hausse des risques physiques, économiques et financiers associés au réchauffement climatique. Dans toute l’Europe, mais aussi dans les principales destinations touristiques mondiales à travers le monde, les industriels du secteur font désormais face à l’immense défi de l’adaptation climatique.

Le secteur hôtelier menacé par la crise climatique

En février dernier, c’est Sébastien Bazin, le CEO du géant hôtelier Accor, qui déclarait renoncer à la construction de deux hôtels dans les îles grecques de Mykonos. Les raisons invoquées ? Les risques accrus d’incendies et de manque d’eau, sur un territoire désormais marqué par la crise climatique. Au Mexique, dans l’Etat du Quintana Roo, au cœur de la très touristique péninsule du Yucatan, de nombreux hôtels en bord de mer font déjà les frais des diverses dégradations écologiques. Les zones côtières paradisiaques subissent désormais la montée des eaux et l’érosion côtière, la prolifération des sargasses, des algues brunes favorisées par la hausse des températures océaniques, et la multiplication des températures caniculaires. En Thaïlande, fin 2024, des inondations monstre, alimentées là encore par la crise climatique, ont affecté près de 90% des hôtels de la province de Surat Thani, avec des baisses de près de 30% des taux d’occupation durant plusieurs semaines.

En Europe, près de la moitié des acteurs de l’industrie hôtelière partagent désormais un sentiment d’inquiétude. Selon une enquête de Statista et Booking basée sur les données du Baromètre européen de l’hébergement, 44% des hôteliers grecs ou italiens estiment que le changement climatique aura un impact fort ou très fort sur leur activité dans les trois prochaines années. Ils sont 45% en Espagne et même 59% au Portugal. Mais en réalité, les conséquences sont déjà là : en Grèce ces deux dernières semaines, la canicule a poussé les autorités à mettre en place des mesures d’urgence, dont une limitation des heures de travail aux heures les plus chaudes. C’est évidemment tout le secteur touristique qui est concerné.

Tentatives d’adaptation

Avec l’augmentation des risques, ce sont aussi les coûts qui augmentent. En 2023 en Californie, le secteur hôtelier a par exemple dû faire face à une hausse de près de 30% de ses primes d’assurance, notamment suite aux inondations de début 2023. Avec les feux qui ont ravagé la région de Los Angeles cette année, les coûts risquent encore d’augmenter. A Quintana Roo, le gouvernement a mis en place en 2018 un système d’assurance, en partie financé par les acteurs du tourisme, pour sauvegarder les récifs coralliens qui protègent les zones côtières.

Face à cette crise qui se dessine, les acteurs du secteur et les autorités locales commencent doucement, et sans doute trop lentement, à prendre conscience de la nécessité de changer de modèle. Des mesures commencent ainsi à être mises en place, pour restaurer les écosystèmes, lutter contre l’érosion côtière, ou adapter les zones touristiques et les infrastructures à une nouvelle réalité climatique. En Jamaïque, Iberostar a par exemple mis en place avec les autorités locales un programme de restauration des mangroves, qui ont un rôle protecteur face à la montée des eaux et aux événements climatiques extrêmes.

Mais difficile pour autant de sortir du paradigme du tourisme de masse, qui continue à être le moteur de la croissance dans de nombreux territoires. Selon le Forum mondial pour le voyage et le tourisme, le secteur du tourisme aura besoin de plus de 200 milliards d’euros pour faire face à la crise climatique, dont 55 milliards pour la seule protection des zones côtières.

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