Publié le 5 avril 2024

L’adaptation aux effets du changement climatique risque de coûter cher. L’institut I4CE a remis au ministère de la Transition écologique un rapport pour tenter de donner un chiffrage et apporter des pistes pour mener à bien ce chantier. L’anticipation reste le maître mot.

Difficile d’estimer le coût global de l’adaptation de l’économie française au réchauffement climatique. L’Institut de l’économie pour le climat (I4CE) travaille sur la question depuis un an, à la demande du ministère de la Transition écologique qui doit présenter le troisième Plan national de l’adaptation au changement climatique (PNACC-3) dans les prochaines semaines. Les auteurs viennent de remettre leur rapport au gouvernement, intitulé “Anticiper les effets d’un réchauffement de +4°C : quels coûts pour l’adaptation ?”, dans lequel ils tentent d’estimer les coûts nécessaires pour adapter l’économie et donner des pistes pour les pouvoirs publics.

Et ce n’est pas une mince affaire. Les experts d’I4CE se sont penchés sur trois secteurs distincts, le bâtiment, les infrastructures de transport terrestre et la production agricole végétale, pour lesquels ils donnent des fourchettes d’investissements nécessaires. Pour le bâtiment, ils comptent entre 1 et 2,5 milliards d’euros par an pour le neuf, plusieurs milliards d’euros pour l’ancien en plus des travaux de rénovation énergétique. Les réseaux routiers et ferrés auraient besoin de quelques centaines de millions à quelques milliards d’euros par an. Le secteur agricole pourrait avoir besoin de 1,5 milliard d’euros dans les dix ans pour maintenir les rendements actuels, les coûts d’une transformation plus profonde du modèle étant difficile à évaluer.

Beaucoup de paramètres en jeu

Le chiffrage demeure donc assez flou. “Il dépend de beaucoup de paramètres tels que le degré de risque acceptable, le degré d’adaptation du secteur, voire la double comptabilisation de certaines dépenses prises en compte aussi bien pour l’atténuation du changement climatique, la lutte contre la perte de biodiversité et l’adaptation“, explique-t-on au ministère de la Transition écologique. Le coût final dépendra en fait du niveau d’adaptation que la société souhaite adopter. Le rapport prend l’exemple d’une route submergée par des crues : soit les pouvoirs publics font de coûteux travaux pour la rendre insubmersible, soit ils préfèrent organiser la fermeture temporaire de la route.

I4CE donne plutôt les clés pour prendre des décisions. “Le niveau d’anticipation et les choix de politiques publiques impacteront le coût total et le partage de ces coûts. Car le coût de l’inaction repose toujours sur les finances publiques, tandis que l’anticipation permet de le partager“, expliquent les services du ministère. Et sans anticipation, I4CE s’attend à une “hausse continue des dépenses et des besoins d’intervention pour réparer ce que l’on n’aura pas anticipé”. Sans compter que les dépenses faites en réaction à un événement climatique, qu’il s’agisse de réparation d’infrastructures de transport, de reconstruction suite à une tempête, etc., viennent souvent grever le budget d’investissement dans la transition écologique. Une véritable double peine !

Des réponses locales et sectorielles

Autre difficulté liée à l’adaptation, les mesures doivent être affinées en fonction de chaque secteur. “On n’agit pas de la même façon sur un réseau ferré qui a une durée de vie jusqu’à 70 ans, et sur des choix d’infrastructures qui sont amortis sur dix ans“, indique les porte-paroles du ministère. “Cela nous invite à réinterroger les choix faits aujourd’hui non pas selon le climat actuel, mais sur le niveau attendu à la fin de la durée de vie de l’infrastructure”, ajoutent-ils. L’une des mesures d’adaptation préconisées par I4CE tient justement au fait de revoir les projets d’investissements prévus à l’aune de l’adaptation, ce qui permettrait aussi de limiter les coûts.

Reste à mettre en œuvre les travaux et investissements pour l’adaptation. Le prochain Plan national d’adaptation doit proposer une méthode pour prendre les décisions qui seront faites, souvent, au niveau local et au niveau des secteurs économiques. “Le PNACC ne vise pas à répondre à ces questions, mais à préparer les réponses quand les questions se poseront“, indique le ministère.

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