Publié le 19 novembre 2024

Un an après un mouvement de colère inédit, les agriculteurs sont à nouveau dans la rue. Ils dénoncent la perspective d’un accord de libre-échange entre l’Union européenne (UE) et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay et Bolivie) qui mettrait à mal certaines filières françaises.

Lundi 18 novembre, ils étaient des dizaines d’agriculteurs à descendre dans la rue. Quelque “85 points de manifestation sont en train de se mettre en route, on ne souhaite pas de blocage concrètement comme on a pu le voir l’année dernière”, a indiqué sur la radio RMC Pierrick Horel, président des Jeunes Agriculteurs (JA), citant comme exemples d’actions “des barrages filtrants, des feux de la colère, des manifestations devant les préfectures”. C’est l’alliance de syndicats agricoles majoritaire (FNSEA-JA) qui a appelé à cette journée d’action nationale. Dimanche, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a prévenu qu’il y aurait une “tolérance zéro” en cas de “blocage durable” des routes.

Dans la soirée déjà, des agriculteurs se sont rendus en cortège près de la base aérienne de Villacoublay, près de Paris, pour dénoncer le projet d’accord de libre-échange avec les pays du Mercosur, bloquant deux des trois voies de circulation sur la nationale 118, où une partie d’entre eux étaient toujours présents lundi matin avec leurs tracteurs après y avoir passé la nuit. Yohann Barbe, porte-parole de la FNSEA, au micro de la radio Europe 1 également lundi matin, a estimé que l’ampleur du mouvement allait “être à nouveau sans précédent puisqu’on sent quand même des agriculteurs toujours aussi agacés par un gouvernement qui traîne à réagir”.

Un an après la crise agricole, le feu n’est pas éteint

Moins d’un an après un vaste mouvement de colère dans les campagnes, qui avait abouti en janvier à des blocages de sections d’autoroutes dans le pays, les syndicats agricoles appellent à nouveau leurs troupes à manifester, mais en ordre dispersé, à l’approche de leurs élections professionnelles qui se tiendront en janvier.

Percutés par les mauvaises récoltes et les maladies animales émergentes, ils estiment n’avoir toujours pas récolté les fruits de la colère de l’hiver dernier. Et ils jugent les normes toujours aussi complexes, et les revenus insuffisants. Si les taxes sur le carburant agricole avaient été un des ferments de la mobilisation l’an dernier, c’est l’aboutissement du projet d’accord de libre-échange de l’Union européenne (UE) avec les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay, Bolivie) qui pourrait mettre le feu aux poudres cette année.

Incompatibilité avec l’accord de Paris

En dépit de l’opposition de la classe politique comme des acteurs agricoles français, l’UE semble déterminée à signer d’ici la fin de l’année cet accord, qui permettra notamment aux pays latino-américains d’écouler plus de bœuf, poulet ou sucre sans droits de douane en Europe. Plusieurs pays européens, dont l’Espagne et l’Allemagne, veulent la conclusion l’accord, qui favoriserait l’exportation de voitures, machines ou produits pharmaceutiques de l’Union européenne. Mais les agriculteurs français redoutent une concurrence déloyale de produits n’étant pas soumis aux normes environnementales et sanitaires strictes en vigueur en Europe.

A l’initiative du sénateur Les Ecologistes Yannick Jadot, plus de 600 parlementaires ont ainsi signé une tribune soulignant l’incompatibilité de ce texte avec l’accord de Paris sur le climat, notamment en matière de déforestation. “Nous le savons, cette déforestation, qui contribue massivement aux émissions de gaz à effet de serre et à l’effondrement de la biodiversité, est principalement liée au changement d’usage des terres pour l’élevage bovin et la production de soja. Cet accord commercial est donc incompatible avec l’accord de Paris”, écrivent-ils. Les signataires de la tribune demandent ainsi d’instaurer, à minima, des mesures miroirs en matière sanitaire et environnementale.

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