Publié le 21 mai 2024

L’appel est lancé. Dans le cadre du plan France 2030, le gouvernement va investir 55 millions d’euros pour relancer la fabrication et l’assemblage de vélos dans l’Hexagone. Un défi ambitieux qui devra répondre à de multiples enjeux pour s’adapter à un marché en pleine évolution depuis la fin de la crise sanitaire.

Un Français sur quatre enfourche son vélo au moins une fois par semaine. C’est la conclusion d’une enquête menée par l’institut CSA et publiée le 14 mai dernier par le ministère des Transports. Une pratique régulière dont l’attrait ne cesse de s’accroître depuis la sortie de la crise sanitaire. Surfant sur cet élan, le gouvernement a annoncé le 22 avril dernier le lancement d’un appel à projet visant à “faire du vélo un levier” pour l’économie française.

“Il faut que cette croissance du monde décarboné profite à [notre] industrie. Sur le vélo, on avait pris du retard, indique le ministre délégué chargé des Transports, Patrice Vergriete, lors d’une conférence de presse. L’enjeu est de monter en gamme, monter en puissance.” Doté d’une enveloppe de 55 millions d’euros, le dispositif a pour but de doper l’industrie tricolore du vélo, alors que la majorité des cycles vendus dans l’Hexagone est fabriquée à l’étranger. Si près de 2,6 millions de vélos ont été vendus en France en 2022, seulement 850 000 unités y ont en effet été fabriquées.

Rapatrier et massifier

Pour faire décoller la filière, le gouvernement a ainsi fixé un objectif très ambitieux : 1,4 million de vélos devront être assemblés par an d’ici 2027. Un chiffre qui passera à 2 millions de cycles par an, à l’horizon 2030. “Rapatrier des vélos en France, c’est rapatrier de l’emploi, mais c’est aussi une dynamique environnementale vertueuse”, fait valoir Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’Industrie. Autrefois grand pays du vélo, la France a commencé à les importer massivement à mesure qu’elle se désindustrialisait. Afin de relancer la production, l’appel à projet, lancé dans le cadre du plan “France 2030”, doit notamment aider les fabricants à compléter des investissements pour moderniser ou agrandir leurs usines.

“C’est un double enjeu. Nous devons massifier l’assemblage en France, par exemple grâce à des usines en marque blanche qui permettent à tout un écosystème de jeunes marques de relocaliser leurs activités”, explique à Novethic Florence Gall, déléguée générale de la filière vélo pour l’Association de promotion et d’identification des cycles et de la mobilité active (Apic). “Mais nous devons aussi fabriquer les composants, qui étaient historiquement produits en France”. Freins, cadre, transmission, ou encore batterie… La fabrication d’une bicyclette peut demander près de 150 pièces. Un foisonnement de composants dont il faudra reprendre ou lancer la production.

Le gouvernement compte également subventionner des projets innovants, comme dans l’écoconception et l’amélioration de l’impact environnemental des vélos. La durabilité, et par extension l’entretien et la réparabilité des cycles sont notamment au cœur de l’attention des acteurs du secteur. “Si l’on rapatrie la production pour faire des vélos jetables, cela n’a aucun intérêt. S’ils peuvent au contraire durer 50 ans, c’est une vraie évolution”, souligne à Novethic Jean Venet, président du cluster Vélo Vallée, qui rassemble plus de 70 entreprises en Occitanie.

Nouvelles pratiques

Pour répondre au marché français, dont les chiffres affichent une baisse de 5,5% en 2023 par rapport à 2022 selon l’union Sport & cycle, la relocalisation de la production de bicyclettes devra par ailleurs prendre en considération la diversification des besoins des usagers. “Il est essentiel de réfléchir à comment la filière peut s’adapter à la demande, et non l’inverse”, appuie Thibault Quere, porte-parole de la Fédération des usagers de la bicyclette (Fub), interrogé par Novethic. L’évolution des pratiques appelle en effet une modification des chaînes de production, comme c’est le cas pour les vélos-cargos ou les cycles longtails utilisés par les familles.

Autant d’enjeux en partie conditionnés à un renforcement de l’attractivité du secteur et de ses filières de formation, permettant l’émergence d’un bout à l’autre de la chaîne d’ingénieurs, de mécaniciens ou de vendeurs qualifiés. Mais aussi à une évangélisation du marché, selon Jean Venet. “Si l’on cherche à faire de la France un pays fabriquant de vélos, il doit également être un pays utilisateur de vélos qui investit dans la mobilité active, avec un réseau efficace de pistes cyclables par exemple. C’est le plus grand frein, explique le spécialiste. Il faut que ce soit une logique commune”.

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