Publié le 5 novembre 2024

Antoine Armand, le ministre de l’Economie, va plaider devant la Commission européenne pour décaler les sanctions qui pèsent sur les constructeurs automobiles européens. Ceux-ci craignent de ne pas réussir à atteindre leurs objectifs de réduction d’émissions de CO2 en 2025, en raison des faibles ventes de voitures électriques. Plusieurs modèles électriques abordables doivent cependant arriver sur le marché prochainement.

Le gouvernement veut rassurer les constructeurs automobiles, qui craignent de ne pas atteindre les objectifs de la réglementation européenne pour 2025 en matière de réduction des émissions des voitures qu’ils mettent sur le marché. “Les constructeurs fermement engagés dans l’électrification des véhicules ne devraient pas avoir à payer d’amendes en 2025. Je défendrai cette position avec Marc Ferracci (le ministre de l’Industrie, ndr) auprès de la Commission et de nos homologues“, a déclaré Antoine Armand, le ministre de l’Economie dans une interview aux Echos.

A partir du 1er janvier 2025, la réglementation européenne imposera aux constructeurs automobiles de ne pas dépasser le seuil d’émissions moyen de 95 grammes de CO2 par kilomètre sur toute leur gamme de voitures. S’ils ne tiennent pas cet objectif, ils seront sanctionnés à hauteur de 95 euros pour chaque gramme en dépassement. Or depuis plusieurs mois, plusieurs constructeurs européens alertent sur le fait qu’ils risquent de ne pas atteindre ce seuil. Luca de Meo, le directeur général de Renault et président de l’Association des constructeurs automobiles européens (ACEA), a demandé aux autorités européennes de repousser l’objectif. Il estime à près de 15 milliards d’euros le montant des amendes que pourraient devoir payer les constructeurs.

Fin du moteur thermique en 2035

Il semble avoir convaincu le nouveau ministre de l’Economie. “Il faut garder le cap de la décarbonation et l’échéance de 2035 sur la fin du moteur thermique. Mais ne nous tirons pas une balle dans le pied !“, déclare Antoine Armand, en amont des réunions de l’Eurogroupe (ministres des pays de la zone euro) et de l’Ecofin (ministres de l’Economie et des finances de l’Union européenne) à Bruxelles les 4 et 5 novembre. Il ajoute : “si nous devons infliger des amendes gigantesques aux constructeurs parce qu’ils ne sont pas allés assez vite, la première conséquence sera d’affaiblir l’investissement et surtout de renforcer nos concurrents asiatiques“.

La norme de 95 grammes de CO2 par kilomètre a été fixée en 2020 par l’Union européenne. Elle vise à réduire progressivement les émissions de gaz à effet de serre des voitures pour atteindre l’objectif de ne plus vendre de véhicule à moteur thermique en 2035. La vente de véhicules électriques doit permettre aux constructeurs de respecter leurs objectifs. Mais depuis le début de l’année, celles-ci sont à la peine. Si elles se sont légèrement redressées en septembre 2024 (+9,8%), elles demeurent en retrait de 5,8% sur les neuf premiers mois de l’année, par rapport à l’année dernière.

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Des voix dissidentes dans l’industrie

La Commission européenne ne semble cependant pas prête à accéder aux demandes de l’industrie. Un porte-parole a ainsi jugé “prématuré” le fait de reporter les sanctions contre les constructeurs automobiles, en rappelant qu’ils étaient prévenus dès 2019 des seuils de réduction de leurs émissions. La Commission préfère donc attendre les résultats des ventes de voitures en 2025 pour estimer le volume d’émissions de CO2 correspondant.

Tous les constructeurs ne sont pas non plus d’accord avec le report des normes demandé par l’ACEA. Fin septembre 2024, 40 industriels (dont Volvo cars, Rivian, Polestar, etc.) avaient signé une lettre commune adressée à la Commission européenne pour l’exhorter à ne pas toucher à l’objectif de zéro émission pour les voitures et véhicules utilitaires en 2035. Carlos Tavares, le PDG de Stellantis, s’est lui aussi positionné pour un maintien de la règle, au motif que tous les constructeurs la connaissaient depuis plusieurs années et devaient s’organiser.

Un argument que l’ONG Transport et environnement appuie en rappelant que, dans les prochains mois, une douzaine de véhicules électriques abordables devraient arriver sur le marché, dont la Renault 5 e-tech ou la Citroën ëC3. Ces véhicules à moins de 25 000 euros devraient permettre de redresser les ventes et d’atteindre, selon les projections de Transport et environnement, une part de marché comprise en 20 et 24% des ventes pour l’électrique. De quoi éviter les sanctions européennes.

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