Publié le 02 août 2022

SOCIAL

Sanofi lance une marque à but non lucratif et tente de redorer son image

Le laboratoire a lancé Impact, sa marque de médicaments vendus sans profit dans 40 pays pauvres. Une trentaine de médicaments considérés comme essentiels par l’OMS seront ainsi distribués. Pfizer a annoncé une initiative comparable, tout comme l'IFPMA, la fédération internationale réunissant 38 grands laboratoires, qui milite pour un accès favorisé aux médicaments à ces pays. Ces démarches qui visent aussi à réhabiliter l’image des laboratoires ne sont pas sans contreparties.

Paul Hudson PDG Sanofi GonzaloFuente AFP
Sanofi propose 30 médicaments à prix coûtant dans 40 pays pauvres
Paul Hudson PDG Sanofi GonzaloFuente AFP

"Poursuivre les miracles de la science pour améliorer la vie des gens", devient la nouvelle raison d’être de Sanofi. "Cette ambition passe par l’amélioration de l’accès aux soins de santé et à des médicaments de qualité pour les populations mal desservies", précise Paul Hudson, DG de Sanofi. Pour joindre les actes à la parole et tenter au passage de réhabiliter une image laminée par les récents scandales, le groupe pharmaceutique lance sa nouvelle marque, Impact, à but non lucratif. 

Sanofi propose ainsi une trentaine de médicaments à prix coûtant dans une quarantaine de pays pauvres, dont une majorité d’États Africains mais également la Syrie et des pays asiatiques dont le Cambodge et la Birmanie. Le géant de la pharmacie s’engage à ne pas réaliser de profit sur des remèdes à des maladies courantes comme le diabète, les maladies cardiovasculaires, la tuberculose, le paludisme ou encore le cancer. Ces médicaments sont "considérés comme essentiels par l’Organisation mondiale de la Santé" et "couvrent une palette élargie d’aires thérapeutiques", assure Sanofi. Il s’agit de l’insuline et d’autres molécules comme le glibenclamide ou l’oxaliplatine.

Pierre angulaire de la stratégie RSE de Sanofi 

Ces produits seront pilotés par Sanofi Global Health, une unité à but non lucratif crée en mai 2021 et "pierre angulaire de la stratégie RSE de Sanofi", souligne le groupe. "Nous allons vendre nos produits au prix le moins haut possible. Si nous dégageons une marge, chaque centime d'euro gagné sera réinvesti dans des programmes de santé et d'éducation dans ces pays", promet Jon Fairest, responsable de Sanofi Global Health. Le but est "d’améliorer l’accès aux soins grâce à la distribution de médicaments, et de bâtir et renforcer les systèmes de santé dans les pays où le PIB par habitant figure parmi les plus faibles au monde", martèle Sanofi qui vise d’ici 2030 à "réduire d’un tiers la mortalité précoce liée aux maladies non transmissibles par la prévention et l’accès aux traitements". 

L'entreprise annonce en outre la création d'un fonds de 25 millions d'euros destiné à soutenir les jeunes entreprises et les innovateurs pour contribuer "à la mise en place de systèmes de santé durables dans les régions mal desservies".

L’initiative vise aussi à toucher de nouveaux patients sur l’ensemble de la planète et à lutter contre les contrefaçons. Un fléau important dans les pays à revenu faible et intermédiaire où un médicament sur dix en circulation est soit de qualité inférieure, soit falsifié, selon des travaux récents de l’OMS. Ces initiatives sont "un coup de billard à plusieurs bandes, car on restaure son image, on évite la concurrence, on évite aussi la contrefaçon", lance sur RFI Nathalie Coulinet, économiste spécialiste des questions de santé. 

D'autres laboratoires se lancent

Sanofi n’est d'ailleurs pas le seul laboratoire à se mobiliser en faveur des pays pauvres. En mai dernier, le concurrent Pfizer s'était engagé à vendre à prix coûtant certains de ses médicaments et vaccins à 45 pays pauvres, notamment contre le Covid-19. Par ailleurs, la fédération internationale des fabricants et associations pharmaceutiques (IFPMA), qui regroupe 38 grands laboratoires, a fait une proposition au G7 et au G20, baptisée la "déclaration de Berlin", qui promet de garantir un accès plus équitable aux médicaments aux pays défavorisés lors des futures pandémies. "Nous sommes prêts à réserver une allocation de temps de production à ces populations", annonce l'IFPMA. En contrepartie, l'organisation demande le maintien des brevets, qui ont récemment été levés par l'OMC sur les vaccins Covid. 

Ironie du sort : ces mêmes laboratoires se sont peu mobilisés pour aider les pays les plus démunis à vacciner leurs populations au plus fort de la pandémie. Si la plupart des laboratoires ont reçu "des milliards de dollars de financements gouvernementaux, les développeurs de vaccins ont monopolisé la propriété intellectuelle, bloqué les transferts de technologie et limité de manière agressive les mesures qui permettraient d'étendre la fabrication dans le monde de ces vaccins", accuse Amnesty International dans un rapport.

Mathilde Golla @Mathgolla


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