Publié le 06 novembre 2020
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Les Californiens soutiennent le modèle d'Uber, malgré les critiques des travailleurs
C'est le "Réferendum Uber". Le 3 novembre, en même temps que l’élection présidentielle, les Californiens ont voté pour décider du sort de l’économie des plateformes, appelée "gig economy" outre-Atlantique. Alors que le chômage monte en flèche avec le Covid-19, les électeurs ont accepté que les chauffeurs et livreurs utilisant les plateformes Uber ou Lyft, restent indépendants.

@T&E
Sous pression, le modèle Uber s’offre une respiration grâce aux électeurs californiens. Le jour de l’élection présidentielle américaine, ceux-ci devaient aussi voter pour une dizaine de propositions locales, dont celle initiée par les géants de la Gig economy, l’économie à la tâche, Uber et Lyft. Ils ont tranché à près de 60% en leur faveur. Les chauffeurs et livreurs utilisant leur plateforme resteront indépendants moyennant de nouveaux droits sociaux. Un vote local sur lequel entendent capitaliser les leaders de l’ubérisation pour imposer leur modèle dans les autres Etats et pays contestataires.
En Californie, Uber et ses concurrents, Lyft et DoorDash, n’ont jamais appliqué la loi qui s’imposait à eux depuis janvier 2020, malgré les rappels à l’ordre de la justice. Pour contrer cette nouvelle loi, les leaders de l’ubérisation se sont ainsi mobilisés pour récolter les signatures nécessaires à la tenue d’un référendum sur leur proposition dite 22, présentée comme un "compromis" entre les deux statuts.
La gig economy jouait gros. Se conformer à la loi californienne aurait coûté à Uber jusqu'à 500 millions de dollars par an. Et ce, alors que l’entreprise valorisée à 62 milliards de dollars a perdu 1,8 milliard de dollars au cours de son dernier trimestre. Uber, Lyft et consorts n’ont donc pas lésiné à mettre la main au pot pour des campagnes massives destinées à convaincre des électeurs jusqu’au bout indécis. Plus de 200 milliards de dollars ont été dépensés. Du jamais vu pour un référendum local.
Un "compromis" qui pourrait être débouté par la justice
L’argument de l’emploi a fait mouche dans un pays où le chômage a grimpé en flèche dans l’Etat depuis la crise du Covid-19 (de 4% en janvier à plus de 15% aujourd’hui). Uber avait notamment annoncé qu’il devrait se passer d’une partie des 158 000 chauffeurs californiens actifs sur sa plateforme en cas de rejet de la proposition 22 quand, en cas de succès, il ferait appel à 50 000 nouveaux chauffeurs. Pour les consommateurs, Uber avait annoncé des hausses de prix allant de 25 à 110%.
"Aujourd'hui, les électeurs californiens ont convenu qu'au lieu d'éliminer le travail indépendant, nous devrions l'améliorer", a déclaré Uber à l’annonce du résultat, précisant que, "bientôt, les conducteurs californiens se verront garantir un salaire minimum de 120% du salaire minimum et auront accès à de nouveaux avantages importants tels que les soins de santé, l'assurance accident, etc." Mais le diable se cache dans les détails dénoncent les chauffeurs qui militaient pour un statut de salarié, plus protecteur. Les prestations offertes par la proposition 22 dépendent en effet du temps de travail "effectif" des chauffeurs, soit le temps passé à conduire, alors que l’attente est parfois longue entre deux courses, souligne l’association Gig Workers Rising.
La bataille n’est pas pour autant définitivement gagnée pour Uber et ses concurrents qui ont encore de nouveaux procès en cours avec différents arguments juridiques destinés à requalifier le statut des collaborateurs des plateformes. "La fin de cette campagne n'est que le début de la lutte", a ainsi déclaré la California labor federation. Des syndicats envisagent ainsi de contester la constitutionnalité de la mesure. Au niveau fédéral, le candidat démocrate, Joe Biden s’était lui clairement prononcé contre la proposition et prévoir, en cas de victoire, une régulation de la Gig economy.
Béatrice Héraud @beatriceheraud