Publié le 28 janvier 2022

SOCIAL

De caissier à aide-soignant ou agent de crèche : quand les entreprises se chargent des reconversions de leurs salariés

Les entreprises sont de plus en plus nombreuses à faciliter les reconversions de leurs salariés depuis des métiers en déclin vers ceux qui manquent de bras à l'instar de Monoprix, Derichebourg, Korian. Dans une société en pleine mutation accélérée par le Covid, les reconversions apparaissent comme une solution à la pénurie de main d’œuvre tout en évitant des plans de licenciements.

Aide soignant ok
La France connait une pénurie d'aides-soignants
@truthseeker08 sur Pixabay

D’un côté, des salariés dont les emplois sont menacés et de l’autre des métiers qui manquent de bras. Contre ce déséquilibre, certaines entreprises s’entendent pour former les salariés des uns, dont le poste est voué à disparaître, vers des emplois en tension pour les autres. Les salariés qui acceptent les propositions de leurs entreprises ne passent par la case "licenciement" et conservent leur salaire.

Aujourd'hui, près de la moitié des dirigeants d’entreprises reconnaissent qu’ils ont du mal à recruter avec 400 000 postes qui ne trouvent pas preneur. "Nous avons besoins de recruter 2 500 aides-soignants chaque année mais nous n’avons pas assez de candidats", confirme Nadège Plou, directrice des ressources humaines chez Korian, gérant de maisons de retraite. "Nous avons donc multiplié les dispositifs pour former nos salariés et nous ouvrons le champ des possibles aux reconversions depuis des métiers sinistrés", affirme la responsable qui a passé des accords avec plusieurs grands groupes et PME.

500 millions d'euros débloqués

Ainsi Korian forme pendant 14 mois les salariés identifiés par Monoprix et Derichebourg au métier d’aide-soignant, sans que ces derniers ne perdent de salaire et avec une promesse d’embauche en CDI s’ils obtiennent leur diplôme. L’entreprise d’origine finance les rémunérations de ses anciens salariés avec une aide d’Etat et la nouvelle entreprise prend la formation en charge. "Aujourd’hui, environ 50 personnes suivent ce processus mais à terme le but est de recruter entre 150 à 200 personnes par ce biais", souligne Nadège Plou. La dirigeante est en discussion pour étendre ces échanges avec des entreprises des secteurs aéroportuaires ou du commerce.

À l’inverse, chez Monoprix, les caissiers sont en surnombre, sans toujours de possibilités de reclassements en interne. Or "beaucoup de nos collaborateurs nous ont indiqués qu’ils aimaient être au contact de personnes âgées, d’enfants, jardiner, cuisiner …. C’est donc tout naturellement que nous avons signé ce partenariat avec Korian pour permettre à ceux qui l’avaient évoqué de poursuivre leur carrière dans les métiers de la santé", indique Sandra Hazelart, directrice des ressources humaines de Monoprix. Face au succès des premières reconversions, "une seconde étape a d’ores et déjà débuté visant l’élargissement de la démarche à l’ensemble du territoire et à de nouveaux partenaires, notamment dans les secteurs des crèches collectives et de la restauration", indique la responsable. De son côté, l'exécutif a, pour l'instant, débloqué 500 millions d'euros pour co-financer le dispositif, une somme qui pourrait faciliter la reconversion de 30 000 personnes.

"Un CDI apprenant"

D’autres entreprises s’engagent également dans la voie de la reconversion des salariés pour répondre aux pénuries de mains d’œuvre. À l’image d’Adecco qui a lancé un "CDI apprenant" l’an passé. Le spécialiste de l’intérim embauche des salariés en CDI, rémunérés le temps de leur formation, puis il leur trouve des missions. "Nous avons ouvert la liste des métiers éligibles à ce dispositif après une année compliquée et une forte demande", indique Florence Oumerretane qui pilote le dispositif au sein du groupe Adecco.

"Au total, 10 200 personnes ont signé un CDI Apprenant et intérimaire incluant un parcours de formation l’an passé", précise cette dernière. Ainsi, des salariés des secteurs de la restauration ou du commerce se sont orientés vers ceux de la logistique, du BTP ou encore des transports. "Nous avons eu une grande diversité de candidatures", souligne Florence Oumerretane dont le groupe signe une "année record avec 40 900 personnes formées tous secteurs et tous dispositifs confondus. On a constaté que le système d’activité partielle a été un vrai amortisseur à la crise", ajoute-t-elle. Là encore, les aides publiques jouent donc un rôle pour rééquilibrer le marché de l’emploi.

Mathilde Golla @Mathgolla


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