Publié le 09 mai 2017
GOUVERNANCE D'ENTREPRISE
Soupçons de conflits d’intérêts entre Monsanto et un universitaire canadien
Nouvelle polémique en vue pour Monsanto ? Le journal CBC News et Gary Ruskin de l'US Right to Know, organisation américaine pour le droit à l'information, viennent de publier plus de 700 pages d'échanges entre un chercheur de l'Université canadienne de Saksatchewan et la firme de biotechnologies. Ces documents mettraient en évidence des liens étroits entre les deux parties.

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Gary Ruskin, chercheur d'US Right to Know, organisation américaine pour le droit à l’information, dénonce de possibles conflits d’intérêts entre l’Université de Saskatchewan au Canada et la firme américaine Monsanto. Il vient de publier, avec le journal canadien CBC News, plus de 700 pages de mails et de documents entre l’entreprise agrochimique et un des professeurs de l’université de Saksatchewan, Peter Phillips, spécialiste en politique publique.
Parmi ces échanges, une "demande urgente" écrite par le responsable de Monsanto, Eric Sachs, dans laquelle il demande à Peter Philips d’examiner les modifications qu’il a faites sur un de ses articles. "Monsanto avait commandé à des chercheurs de l’université de Saskatchewan, de l’université de Havard et d’autres écoles, des articles conformes à la vision de l’entreprise", note CBC, "Sachs voulait que les articles soient publiés rapidement en raison d’un rapport négatif qu’il attendait bientôt d’un panel scientifique américain". L’article a été publié, mais sans la mention de participation de Monsanto.
"Monsanto s'appuie sur les universitaires pour diffuser son message au public"
Gary Ruskin ne mâche pas ses mots. Bien que l'Université juge qu'il n'y a pas de conflit d'intérêts, l'Américain considère que l'établissement universitaire et Peter Philipps agissent comme des "marionnettes" du géant de l’agroalimentaire. "Monsanto s’appuie sur ces universitaires pour diffuser son message au public et aux régulateurs", estime-t-il. Sur ce dernier point justement, un mail du chercheur de l'université canadienne conseille Monsanto sur la façon de traiter avec l’Agence de protection de l’environnement des États-Unis. Il écrit par exemple : "Je pense qu’il y a une chance de déplacer le curseur sur la réglementation. Mais pour l’instant, nous sommes bloqués".
Peter Philips, interviewé par CBC, se défend de tous conflits d’intérêts et affirme n’avoir jamais reçu d’argent de Monsanto. La firme, dans un courrier envoyé au journal canadien estime que "les collaborations public-privé sont essentielles à l’avancement de la science, de l’innovation et de l’agriculture".
Atteinte à la liberté de recherche scientifique
Pour rappel, Monsanto a été condamné par le tribunal citoyen de la Haye pour atteinte à la liberté de recherche scientifique dans de multiples affaires. "La conduite de Monsanto est entièrement non compatible avec la liberté de recherche scientifique, elle-même liée à la liberté d’expression et au droit à l’information. Une telle atteinte est aggravée étant donnés les risques sanitaires et environnementaux des produits Monsanto", estimait le juge Schrybman.
Le 21 mars 2017, 250 pages de correspondances internes de la firme ont été déclassifiées par la justice américaine dans le cadre d’une enquête sur le glyphosate (composant principal du désherbant Roundup). Ces documents ont révélé que Monsanto connaissait depuis 1999 le caractère mutagène du glyphosate et avait tenté d’étouffer l’affaire en commandant une étude pour convaincre les régulateurs de la non dangerosité de ce produit.