Publié le 23 janvier 2015
GOUVERNANCE D'ENTREPRISE
Risque carbone : BP et Shell sous la pression des investisseurs
Quel sera l’impact du changement climatique sur les compagnies pétrolières ? Cette question devrait animer les prochaines assemblées générales de Shell et de BP au printemps 2015. Plus d’une cinquantaine d’investisseurs d’importance viennent de déposer des résolutions pour obliger ces deux gros émetteurs de CO2 à publier des informations sur leurs scénarios d’adaptation au bouleversement climatique.

© Hugo Philippott / AFP
Une coalition d’une cinquantaine d’investisseurs pesant plus de 200 milliards d’euros veut déposer une résolution sur le changement climatique dans les assemblées générales de Shell et de BP. "Le changement climatique est un risque économique et financier majeur", explique James Thornton, à la tête de ClientEarth organisation, une entité spécialiste du droit de l’environnement qui participe à la coordination de ces résolutions. "BP et Shell ont notre avenir financier et environnemental entre leurs mains et elles doivent faire plus et mieux pour prévenir les risques climatiques." Il conclut: "Les investisseurs peuvent les aider à progresser en votant pour les résolutions que nous proposons." Plus le score obtenu sera élevé, plus grande sera la pression sur l’entreprise.
Le débat est déjà lancé par média interposé. Un éditorialiste du magazine américain Forbes titrait le 21janvier: "Il est ridicule d’exiger de BP et Shell qu’elles investissent dans l’énergie verte", ajoutant: "Ce ne sont pas les producteurs d’énergies fossiles qui peuvent développer les énergies renouvelables et les technologies bas carbone."
Des réponses attendues au printemps
Les investisseurs, à l’origine de la résolution intitulée “Stratégie de résilience pour 2035 et au-delà” pensent au contraire que "les réglementations climatiques vont avoir des impacts importants sur la rentabilité des entreprises les plus émettrices de gaz à effet de serre". C’est le point de vue de Stéphanie Maier, à la tête du département RSE d’Aviva Investors: "C’est pour cela que le secteur de l’énergie doit modifier ses sources de production et de profits."
Les investisseurs responsables vont demander à BP en avril et à Shell en mai de faire toute la lumière sur la compatibilité de leurs scénarios de production d’énergie avec ceux de l’Agence internationale de l’énergie.
Il s’agit d’indicateurs clefs de performance sur l’économie bas carbone et sur des prises de position publiques sur le changement climatique.
Les compagnies prises en étau
Le modèle économique des compagnies pétrolières est plus que bousculé par la conjugaison de la baisse spectaculaire des prix du baril, du développement des gaz de schiste et de l’augmentation constante des coûts d’exploration. Elles doivent aussi répondre aux campagnes de désinvestissement dont l’ampleur ne cesse de grandir. BP et Shell font partie des entreprises ciblées par le mouvement Go Fossil Free qui organisent les 13 et 14 février 2015 une journée mondiale de désinvestissement. Elle a pour but d’inciter les citoyens à faire pression sur les acteurs financiers pour qu’ils se détournent des énergies fossiles au bénéfice des énergies renouvelables.
Entre les investisseurs et les acteurs de la société civile, les compagnies pétrolières sont prises en étau. Rien pourtant, aujourd’hui, ne garantit un changement de stratégie de leur part.