Publié le 30 septembre 2022
ENVIRONNEMENT
Pollution plastique : des géants de l’alimentaire attaqués par des ONG sur leur devoir de vigilance
Auchan, Carrefour, Casino, Danone, Lactalis, Les Mousquetaires, Picard Surgelés, Nestlé France et McDonald's France sont mis en demeure par une coalition d’ONG. Les associations leur reprochent de proposer des plans de vigilance sur la pollution plastique "au mieux insuffisants pour identifier les risques et prévenir les atteintes, au pire inexistants". Auchan, Carrefour et McDonald's France contestent ces accusations.

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Des ONG mettent la pression sur des géants de l'agro-alimentaire pour qu’ils s’engagent concrètement contre la pollution plastique. Les conséquences de ce fléau sont considérables avec 460 millions de tonnes de plastiques produites chaque année dont 22% sont abandonnées. Or cette production devrait tripler d'ici 2060, selon l'OCDE. La responsabilité du secteur agro-alimentaire est régulièrement pointée du doigt mais cette fois des associations se basent sur le devoir de vigilance pour tenter de faire changer les choses.
Ainsi, ClientEarth, Surfrider Foundation Europe et Zero Waste France mettent en cause les plans de vigilance déployés par Auchan, Carrefour, Casino, Danone, Lactalis, Les Mousquetaires, Picard Surgelés, ainsi que Nestlé France et McDonald’s France. Ils "sont au mieux insuffisants pour identifier les risques et prévenir les atteintes, au pire inexistants", lancent les associations.
Or depuis 2017, la loi française sur le devoir de vigilance oblige les entreprises basées en France et employant plus de 5 000 personnes sur le territoire, ou plus de 10 000 dans le monde, à prendre des mesures effectives pour prévenir les atteintes aux droits humains et à l'environnement sur l'ensemble de leur chaîne d'approvisionnement.
Créer un choc de "déplastification"
Mais les associations déplorent des stratégies qui, "lorsqu’elles existent sont basées quasi-exclusivement sur les produits recyclables, dont on sait qu'une infime partie seulement est en fait recyclée", indique maître Sébastien Mabile, un des avocats des ONG. "Nous leur demandons des choses extrêmement précises et individuelles," détaille par ailleurs le conseil.
Ainsi, le but de la coalition est de "créer un choc de "déplastification", il faut que ces entreprises se mettent sur une bonne trajectoire, avec des mesures chiffrables", explique Antidia Citores, porte-parole des ONG. "Nous dialoguons avec la plupart de ces entreprises depuis des années" autour de cette question, ajoute la militante. Elle estime que "ces mises en demeure sont dans la continuité de ce dialogue, quand force est de constater que rien ou pas assez n'est fait".
Les groupes pointés du doigt contestent toutefois les accusations. Mc Donald's France "regrette une communication qui ne reflète pas la réalité de nos pratiques et des résultats obtenus", assurant avoir "supprimé et substitué 97% des emballages en plastique à usage unique". "Ce travail de fond, initié il y a plusieurs années, a permis d’éviter la mise en circulation de plus de 10 000 tonnes de plastique par an", a souligné le groupe.
Les groupes se défendent et détaillent leurs mesures
De son côté, Carrefour se dit "surpris". Le distributeur affirme être "l’un des acteurs de la grande distribution les plus mobilisés sur cette question" avec "la fin des emballages sur le textile, les bananes bio, les concombres, mais aussi les ampoules, les piles, les jouets", précise-t-il. Il affirme avoir supprimé 11 000 tonnes de plastique depuis 2017 et 20 000 d’ici 2025.
Auchan quant à lui "juge infondée la prise de position des ONG" et "réaffirme son engagement dans la lutte contre la pollution plastique". Le géant de la grande distribution affirme par ailleurs ne pas avoir été sollicité par les ONG. "Au titre de son devoir de vigilance, Auchan Retail détaille expressément dans son plan de vigilance des chapitres traitant des actions environnementales portant spécifiquement sur le plastique. Affirmer qu’Auchan ne respecterait pas son devoir de vigilance est clairement infondé", déplore le distributeur.
Selon la loi, les entreprises ont trois mois pour respecter leurs obligations ou dialoguer avec les ONG qui peuvent sinon lancer des assignations en justice. La menace est prise au sérieux par les groupes car l'arme juridique est de plus en plus employée par la société civile. Le Giec, le groupe intergouvernemental d’experts pour le climat note en effet dans un rapport qu’en "dehors des processus formels de politique climatique, les litiges climatiques sont une autre arène importante pour que divers acteurs puissent se confronter et interagir sur la manière dont le changement climatique devrait être gouverné".
Mathilde Golla @Mathgolla