Publié le 05 juillet 2021
ENVIRONNEMENT
La sécheresse sera la "prochaine pandémie", alerte l'ONU
L'ouest des États-Unis, Madagascar, le Brésil… Plusieurs régions du globe sont actuellement touchées par des épisodes de sécheresse historique rendant l'approvisionnement en eau, en électricité et en nourriture de plus en plus complexe. Un nouveau rapport de l'ONU estime même que la sécheresse va devenir la "prochaine pandémie" et appelle les États à prendre les mesures à la hauteur de l'urgence.

ARUN SANKAR / AFP
C’est un véritable fléau. La quasi-totalité de l’ouest des États-Unis subit depuis plusieurs semaines une sécheresse historique aggravée par une canicule. À certains endroits, les températures ont même avoisiné les 50 °C en raison d'un dôme de chaleur. Les réservoirs d’eau sont au plus bas, les lacs et les rivières se découvrent poussant plusieurs comtés a déclaré l’état d’urgence. Et ceci n’est qu’un aperçu d’un phénomène qui va s’aggraver dans les prochaines années. "La sécheresse est sur le point de devenir la prochaine pandémie et il n’y a pas de vaccin pour la guérir", a alerté le 17 juin Mami Mizutori, la représentante spéciale de l’ONU pour la réduction des risques de catastrophe.
À l’occasion de la journée mondiale de la lutte contre la désertification et la sécheresse, le 17 juin dernier, l’ONU a publié un rapport alarmant sur la question. L’Organisation estime que de 1998 à 2017, au moins 1,5 milliard de personnes ont été touchées par les sécheresses et qu’au moins 124 milliards de dollars ont été perdus dans le monde. Mort du bétail, mauvaises récoltes, faim ou conflits, la sécheresse affecte "de manière disproportionnée les pauvres et les marginalisés à travers le monde, pour qui le coût de la sécheresse se mesure en termes de vies, de moyens de subsistance et d’appauvrissement", écrivent les auteurs.
Drought could be next pandemic and there is no vaccine to cure it. Drought has directly affected 1.5 billion people this century. This number will grow dramatically unless we manage this risk, understand its root causes and take preventive action #GAR2021 https://t.co/Oqm0oRKnaY pic.twitter.com/XLkrGTb0dU
— Mami Mizutori (@HeadUNDRR) June 17, 2021
Famines et conflits
Ce phénomène est une réalité que subissent déjà plusieurs populations à travers le monde. À Madagascar par exemple plus d’un million de personnes se trouvent dans une situation d’insécurité alimentaire aiguë liée à la pire sécheresse que le pays ait connue depuis 40 ans. Pour l'ONU, Madagascar est le premier pays confronté à une famine liée au réchauffement climatique. Parallèlement, le Brésil vient d’émettre sa première alerte sécheresse depuis un siècle. Le manque de pluie menace l’approvisionnement en électricité du pays qui est très dépendant de ses centrales hydroélectriques. Cette situation menace l’industrie agricole qui représente un tiers du PIB du pays.
Or la sécheresse peut aussi provoquer des révoltes populaires. Les experts l'ont constaté en 2019, à Chennai, sixième ville de l’Inde et capitale du Tamil Nadu. Les réservoirs quasi vides ont créé des émeutes. Un homme a ainsi poignardé six personnes qui l’empêchaient de prendre plus de bidons d’eau qu’autorisés par les autorités. L'institut de recherche américain Pacific Institue a ainsi montré une augmentation significative des conflits liés à l'eau ces dix dernières années passant d'une vingtaine en 2010 à plus de 70 en 2018. Et de fait, selon l’ONU, d’ici 2050, cinq milliards de personnes pourraient être touchées par une pénurie d’eau.
Le changement climatique aggrave ce fléau
"Nous devons avoir une vision modernisée de la sécheresse", a expliqué au Guardian Roger Pulwarty, scientifique principal à la National Oceanic and Atmospheric Administration des États-Unis et co-auteur du rapport. "Nous devons examiner comment gérer les ressources telles que les rivières et les grands bassins-versants", a-t-il ajouté prenant l’exemple du Danube en Europe dont la sécheresse affecte les transports, le tourisme ou encore la production d’énergie.
C’est surtout la lutte contre le changement climatique qui permettra de mieux gérer les épisodes de sécheresse. Selon les recherches de l’ONU, ce dernier accroît le stress hydrique et a un effet sur la multiplication, l’intensité et la durée des épisodes de sécheresse. Le rapport appelle à une action "audacieuse et systémique car les structures et politiques actuelles de gestion de la sécheresse sont loin de répondre aux besoins".
Marina Fabre, @fabre_marina