Publié le 17 juillet 2019
ENVIRONNEMENT
Élection d'Ursula von der Leyen : l'Union européenne à l'ère de l'urgence climatique
L'élection de l'Allemande Ursula von der Leyen à la tête de la Commission européenne, était loin d'être gagnée. Elle confirme pourtant le nouveau virage pris par les institutions européennes depuis les dernières élections de mai et la percée des Verts car la fidèle d'Angela Merkel est passée de justesse après avoir largement verdi son programme, allant jusqu'à proposer un Green New Deal dans les 100 premiers jours de son mandat.

@Parlement européen
Virage vert. L'Allemande Ursula von der Leyen a été élue présidente de la Commission européenne mardi 16 juillet dans la soirée à l'issue d'un scrutin serré. La fidèle d'Angela Merkel a obtenu la majorité de justesse avec 383 voix pour (il lui en fallait 374), 327 voix contre et 22 abstentions, après avoir sérieusement infléchi sa position, désormais plus écologiste que libérale, sans toutefois parvenir à convaincre les Verts. Le besoin d’une "planète saine est notre plus grand défi et notre plus grande responsabilité", a déclaré la future présidente de la Commission, qui devient la première femme à présider l'institution.
Un Green deal dans les 100 jours
La prétendante n’avait pas hésité à verdir son discours prononcé le matin même devant les députés réunis à Strasbourg, en amont du vote. En réponse à la forte mobilisation citoyenne des derniers mois, elle a d’emblée promis un "Green deal européen dès les 100 premiers jours de son mandat", avec la "première loi européenne pour le climat". Objectif: faire de l’Union européenne "le premier continent neutre en carbone dès 2050" alors que le sujet est loin de faire l’unanimité. Le principe, a-t-elle dit, sera inscrit dans la "première loi européenne sur le climat". Et elle a confirmé son soutien à un objectif de réduction des émissions de CO2 de 50 à 55 % en 2030 contre les 40 % actuellement envisagés (et soutenus par son groupe politique, le PPE).
L'ancienne ministre allemande de la Défense entend par ailleurs faire de la Banque européenne d’investissement une banque pour le climat et ainsi mobiliser 1 000 milliards d’euros pour les dix années à venir. Un projet notamment porté par le président de la République français, Emmanuel Macron.
Elle envisage aussi une taxe carbone aux frontières, proposition soutenue par la France depuis 2009 mais farouchement rejetée par l’Allemagne, dont l’industrie est fortement exportatrice. Et elle s’est engagée à étendre le marché carbone européen au secteur de la construction et des transports routier et maritime. De quoi convaincre les eurodéputés sceptiques encore nombreux avant le vote.
La grande priorité du mandat : la réponse à la crise climatique
Si le verdissement du discours était si nécessaire, c'est que la nouvelle Commission, qui entrera en fonction en novembre pour un mandat de cinq ans, devra plus que jamais faire de l’écologie sa priorité. Le scrutin de mai l’avait déjà clairement démontré avec une percée surprise des Verts notamment en Allemagne, en France, au Royaume-Uni, en Belgique ou encore aux Pays-Bas. Ils sont ainsi devenus la quatrième force politique au sein du Parlement européen avec 74 sièges.
L’élection de Pascal Canfin, ancien directeur du WWF France, candidat sur la liste LREM, à la présidence de la commission Environnement est également un signal positif, d’autant que c’est désormais la plus fournie avec 76 eurodéputés. "C'est le symbole que ce Parlement prend très au sérieux l'urgence climatique, la protection de la biodiversité et la santé des consommateurs. Il y a toujours une grande priorité dans un mandat : en 2009, c'était la crise financière ; en 2014, c'était la crise migratoire : ma conviction, c'est qu'en 2019 ce sera la crise climatique et la réponse à cette crise", a-t-il assuré à l'AFP.
Vers une relève de l'engagement climatique ?
Parmi les chantiers prioritaires qui attendent la nouvelle Commission, et à quelques semaines de l'organisation d'une conférence sur l'ambition climatique à l'ONU le 23 septembre, il faudra s'entendre sur une relève des engagements de réduction des émissions de CO2. Et ce, alors que les 28 campent toujours sur l'objectif de - 40 %, largement insuffisant pour respecter l'Accord de Paris. Fin juin, quatre États seulement avaient réussi à bloquer les discussions sur l'adoption d'un principe de neutralité carbone en 2050, pourtant bien avancées.
Le prochain mandat aura aussi à cœur de mettre en œuvre le paquet Énergie Climat 2030 alors que le premier bilan effectué en juin s'est révélé désastreux. Selon la Commission européenne, aucun État membre ne présente actuellement de plan national énergie-climat respectant intégralement les objectifs fixés. Enfin, elle devra aussi se pencher sur les normes de pollution des transports et trancher sur une éventuelle taxe kérosène, voulue par la France, et défendue par quatre autres pays
"La Commission devrait enfin prendre des dispositions pour rappeler les 43 millions de véhicules en circulation qui ne respectent pas les normes et mettre en place une agence européenne d’homologation", a demandé la Française Karima Delli, reconduite à la tête de la commission Transports du Parlement. Les cartes semblent bel et bien rebattues pour faire de l'Union européenne un véritable leader climatique.
Concepcion Alvarez, @conce1