Publié le 02 janvier 2020

ENVIRONNEMENT

Si le transport maritime était un pays, il serait le huitième plus gros émetteur de l’Union européenne

Le transport maritime bénéficiait jusqu'à présent d'un régime d'exemption, n'étant encadré ni par l'Accord de Paris, ni par le marché carbone européen. Mais le secteur est forcé de prendre le virage de la transition écologique alors qu'il compte parmi les plus gros pollueurs. Taxe sur le carburant, gaz naturel liquéfié, réduction de la vitesse, plusieurs pistes sont à l'étude. 

MSC porte conteneurs classe dans les 10 plus gros pollueurs europeens CCO
Le transporteur de conteneurs, MSC, vient de rejoindre le podium des dix plus gros pollueurs en Europe, aux côtés de centrales à charbon et de la compagnie aérienne Ryanair.
@CC0

Le transport maritime depuis et vers l’Europe émet autant de gaz à effet de serre qu’un pays de l’Union européenne, selon les données que Bruxelles vient de publier pour la première fois et analysées par l’ONG Transport & Environment. Il apparaît que si le transport maritime était un pays, il se classerait bon huitième en Europe, juste derrière les Pays-Bas, avec 139 millions de tonnes de CO2 en 2018.  

Par ailleurs, un transporteur de conteneurs vient de rejoindre les centrales à charbon et la compagnie aérienne Ryanair dans le classement des dix principaux émetteurs de carbone établi par l’ONG. Il s’agit de la Mediterranean Shipping Company (MSC), qui transporte des biens de consommation, du matériel électronique, des fruits frais, des vêtements ou encore des jouets.  

Une taxe sur le carburant d’ici 2023  

Alors que le secteur représente déjà 3 % des émissions mondiales, et qu’il pourrait contribuer à hauteur de 20 % aux émissions en 2050, plusieurs initiatives voient le jour. D'abord, depuis le 1er janvier 2020, l'ensemble de la flotte mondiale de navires doit utiliser un carburant à basse teneur en soufre pour réduire ses émissions polluantes.

Plusieurs organisations internationales du transport maritime dont la première mondiale, Bimco, ou encore le World Shipping Council (WSC), ont par ailleurs proposé de créer un fonds pour l'innovation qui serait financé par une taxe sur le carburant. À raison de 2 dollars par tonne de carburant, payés par les transporteurs, le fonds atteindrait cinq milliards de dollars sur 10 ans, ont calculé les signataires.

Cette somme serait investie dans des projets de recherche et développement (R&D) "nécessaires pour rendre commercialement viable une flotte de navires à émission zéro carbone au début de la décennie 2030", précise leur communiqué. La mesure sera soumise aux membres de l'Organisation maritime internationale (OMI) en avril prochain, en vue d'une mise en œuvre "d'ici 2023". Une échéance jugée trop lointaine par les ONG environnementales.   

Le secteur maritime bientôt intégré au marché carbone européen ?

Parmi les autres propositions, la France préconise un ralentissement de la vitesse des navires de fret pour baisser les émissions. Le président Emmanuel Macron, sur l'initiative de l’armateur Louis-Dreyfus, avait repris cette proposition lors du G7 de Biarritz en août dernier. Selon les calculs du ministère de la Transition écologique, un pétrolier qui réduirait sa vitesse de seulement un nœud baisserait sa consommation et donc ses émissions de 18 %. Mais la mesure a été rejetée par l’OMI.  

D’autres initiatives, plus localisées, sont également lancées. L’armateur français CMA CGM, numéro quatre mondial du transport de conteneurs, vient de signer un accord de dix ans avec Total pour la fourniture en gaz naturel liquéfié (GNL) des neuf porte-conteneurs qu'il est en train de faire construire et qui fonctionneront avec cette énergie. D’ici à 2022, il devrait compter une vingtaine de navires GNL. Actuellement dans le monde, seuls 283 navires utilisent le GNL contre 60 000 le fioul.  

D’ici 2030, le transport maritime s’est engagé à réduire de 40 % ses émissions de gaz à effet de serre. Le secteur, qui n’entre ni dans le marché carbone européen, ni dans l’Accord de Paris, est désormais dans le viseur de la nouvelle Commission européenne. Le Pacte vert européen pour la neutralité climatique prévoit en effet d’inclure le transport maritime dans le système d’échange de quotas de CO2.  

Concepcion Alvarez @conce1


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