Publié le 15 février 2021

ENVIRONNEMENT

Pour atteindre la neutralité carbone, le secteur aérien européen mise sur les progrès technologiques sans diminuer le trafic

Le transport aérien européen vient de dévoiler sa feuille de route pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Le secteur mise sur plusieurs piliers comme les progrès technologiques tel l'avion à hydrogène d'Airbus, les carburants alternatifs ou encore la compensation carbone, et assure qu'il peut atteindre son objectif tout en maintenant une croissance de 1,4% par an de voyageurs. Une trajectoire à l'opposé de ce que préconisent certains experts pour qui augmenter le nombre de passagers annihile les efforts fournis.

Aeroport avion inegalites revenus pixabay
Le secteur aérien européen mise sur une croissance de 1,4 % par an du nombre de passagers pour atteindre la neutralité carbone.
CC0

C’est un secteur de plus en plus pointé du doigt pour son impact environnemental. Le transport aérien, qui est responsable de 7,3 % de l’empreinte carbone de la France si l’on prend en compte les traînées de condensation et les cirrus, est sommé de se verdir pour entrer dans les clous de la politique climatique européenne notamment. Dans ce contexte, le 11 février, cinq organisations à l'origine de l'initiative "Destination 2050", réunissant compagnies aériennes, gestionnaires d'aéroports et industriels, ont publié la feuille de route du secteur aérien européen pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. 

Le but des promoteurs de cette initiative est de voir "tous les vols à l'intérieur ou en partance de l'UE, du Royaume-Uni et de l'AELE, parvenir à zéro émission nette de CO2 d'ici à 2050". Pour eux, une telle cible pourrait être obtenue en premier lieu par "des améliorations de la technologie des avions et des moteurs", tel l'avion à hydrogène auquel travaille actuellement Airbus, ou des solutions électrifiées, un potentiel de baisse des émissions de 37% par rapport à 2018.  

Compensation carbone jusqu'en 2030

Le secteur aérien compte également recourir à des carburants alternatifs aux hydrocarbures qui pourraient à eux seuls permettre de réduire les émissions du secteur de 34%, affirment en outre les promoteurs de "Destination 2050". Il s'agit par exemple de biocarburants, ou de "kérosène synthétique durable" élaboré à base de CO2, d'eau et d'énergies renouvelables qui a été récemment testé dans un vol commercial par la compagnie KLM. 

Le secteur veut également s'appuyer sur un système d'échanges de quotas d'émissions pour amorcer la transition, ainsi qu'une amélioration de la gestion des vols et des mouvements au sol. Mais il va falloir du temps pour que les solutions à faible émission soient disponibles. Dans cette perspective les promoteurs de Destination 2050 misent sur la compensation carbone jusqu'en 2030. "Le secteur tout entier ne s'engage pas seulement sur la voie de la décarbonation, mais trace la voie pour qu'elle se réalise afin de contribuer concrètement aux objectifs climatiques de l'UE", a noté Olivier Jankovec, directeur général du Conseil international des aéroports - Europe (ACI Europe), cité dans un communiqué. 

Croissance du nombre de passagers 

Reste un point crucial : la croissance du trafic. Le collectif "Destination 2050" estime qu’il est possible d’atteindre la neutralité carbone tout en augmentant le nombre de passagers d’environ 1,4% par an. Or dans un récent rapport sur l’aviation le cabinet B&L Évolution notait : "L’intégralité des efforts nécessaires pour aligner la France sur la trajectoire de la neutralité carbone serait annihilée par le secteur aérien s’il devait continuer de croître". Même avec des leviers techniques poussés, le cabinet affirmait qu’une diminution du nombre de passagers comprise entre 2,5 % et 4 % par an était nécessaire. "En d’autres termes, il faudrait réduire de moitié le nombre de passagers annuels d’ici 20 ans maximum", concluait-il. Une trajectoire à l’opposé de la feuille de route publiée le 11 février par le secteur aérien européen. 

Les nuages assombrissent de plus en plus l’horizon du secteur. Outre la pandémie de Covid-19 qui a cloué au sol les avions, le transport aérien subit les foudres des voyageurs sensibilisés au réchauffement climatique à travers le mouvement flygskam (honte de prendre l’avion) mais aussi des gouvernements qui refusent de cautionner des extensions d’aéroports trop coûteuses économiquement et environnementalement. Le 11 février, la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili a ainsi annoncé l’abandon de l’extension de l’aéroport parisien Roissy-Charles-de-Gaulle jugé "obsolète" à l’heure de la lutte contre le réchauffement climatique. 

Marina Fabre, @fabre_marina avec AFP


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