Publié le 10 juin 2015
ENVIRONNEMENT
La Californie, un État pionnier sur le chemin de la COP 21
Le "Golden state" a décidé de ne pas attendre une décision de Barack Obama ou du Congrès à Washington. À six mois de la conférence onusienne sur le climat (COP 21) organisée à Paris, la Californie s'est engagée d'elle-même, aux côtés de 12 autres pouvoirs régionaux en Europe et sur le continent américain, à réduire drastiquement ses émissions de gaz à effet de serre. Un geste politique fort, qui correspond à la stratégie économique ambitieuse des entreprises californiennes.

Sarah Swenty / USFWS
Au milieu du XIXe siècle, la Californie est devenue une terre de pionniers, attirés par l'or qui coulait dans ses rivières. 150 ans plus tard, c'est sur le chemin de la COP 21 que cet esprit "pionnier" pousse les Californiens.
À Sacramento, le 19 mai dernier, le gouverneur démocrate Jerry Brown a ratifié l'accord "Under 2 MOU", qui prévoit des réductions drastiques d'émissions de gaz à effet de serre pour limiter le réchauffement climatique à 2 degrés. "Il est temps de jouer un rôle décisif. Il est temps d'agir", a répété le gouverneur Brown. Un message adressé au monde entier... et à Washington, où Barack Obama va devoir batailler ferme face à un Congrès à majorité républicaine hostile à tout accord contraignant.
La Californie pèse aussi lourd que le Brésil
Aux côtés de la Californie, des représentants de 12 États ou régions, notamment le länder allemand du Bade-Wurtemberg, la communauté autonome espagnole de Catalogne ou encore l'État brésilien d'Acre, en attendant la région Rhône-Alpes début juillet, ont signé l'accord "Under 2 MOU". Mais avec ses 38 millions d'habitants et son économie qui pèse à elle seule près de 2 200 milliards de dollars, soit l'équivalent du Brésil, la Californie est bel et bien le partenaire dont les engagements pèsent le plus lourd.
Dans le détail, l'accord "Under 2 MOU" place la barre particulièrement haut : il prévoit en effet une réduction de 80 à 95% des émissions de CO2 d'ici 2050, par rapport aux niveaux enregistrés en 1990. La Californie s'est fixé un objectif intermédiaire à - 40% d'ici 2030. "Under 2 MOU" prévoit encore de ne pas dépasser les 2 tonnes métriques d'émissions annuelles par habitant. À titre de comparaison, le taux est aujourd'hui de 17,6 en moyenne aux États-Unis et 5,6 en France, selon les chiffres de la Banque Mondiale.
Objectif : 50% d'énergies renouvelables d'ici 2030
Pour atteindre ces objectifs, les régions partenaires s'engagent à investir massivement dans les énergies renouvelables et les véhicules propres. Elles sont d'ailleurs censées travailler main dans la main dans ces deux secteurs, l'accord prévoyant un partage de technologies. La Californie vise ainsi 50% d'énergies renouvelables d'ici 2030. Et avance vers cet objectif à un train d'enfer : en l'espace de deux ans, elle est passée de 15 à 23% d'énergies renouvelables, talonnant désormais l'Allemagne en la matière.
Car la Californie n'est pas seulement un des États américains les plus exposés au réchauffement climatique, confrontée à une sécheresse catastrophique depuis plusieurs années. Elle "est aussi depuis longtemps en pointe pour mettre en place des politiques environnementales innovantes qui sont ensuite reprises au niveau fédéral. Ça a été le cas avec les normes de consommation électrique des appareils électro-ménagers ou sur les niveaux de pollution des voitures par exemple, qui ont été suivies par l'administration Obama", analyse Annie Notthoff, directrice au sein de NRDC (Natural Resources Defense Council), l'une des ONG environnementales qui effectue le travail de lobbying le plus puissant aux États-Unis.
Le secteur solaire, créateurs de richesses et d'emplois
Il ne faut pas s'y tromper : la Californie a trouvé son intérêt dans une économie durable. Depuis huit ans, cet État mène ainsi une politique volontariste pour doper le secteur de l'énergie solaire. Sur la même période, le nombre d'installations annuelles a été multiplié par 40, tandis que le coût de revient par mégawatt était divisé par trois, selon les calculs du groupe de recherche Next 10, spécialisé dans les liens entre économie et environnement.
54 000 Californiens travaillent aujourd'hui dans le secteur du solaire. Dans le secteur des véhicules électriques, Tesla fait figure de fleuron mais d'autres groupes californiens comme Google et Apple planchent aussi sur le sujet.
Cette expertise vaut aussi à la Californie de bénéficier d'investissements extérieurs massifs : en 2014, plus de 5 500 milliards y ont été investis en capital-risque pour financer des entreprises de technologies vertes. C'est cinq fois plus que pour l'ensemble de l'Union européenne.
"La Californie est aujourd'hui la preuve vivante que protection de l'environnement et économie en bonne santé vont de pair. Notre politique environnementale est sans aucun doute un des moteurs de notre prospérité", confirme Annie Notthoff.