Publié le 16 mai 2016
ENVIRONNEMENT
Climat : dix jours de négociations à Bonn, pour quoi faire ?
Après l'Accord de Paris, conclu en décembre, les négociateurs se retrouvent du 16 au 26 mai pour la première session officielle de négociation post-COP21, dans la tranquille ville de Bonn, en Allemagne. Au menu des discussions, la mise en application de l’accord. Quels sont les enjeux, les forces en présence ? Y-a-t-il des points de blocage ou de crispation ? Décryptage.

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Au coeur des négociations, les contributions nationales. C’est ce qui ressort d’une "note de réflexion" de 11 pages adressée conjointement aux négociateurs le 6 mai dernier par l’actuelle présidence française de la COP21 et la future présidence marocaine de la COP22. On peut y lire que "notre défi dorénavant consiste à rendre opérationnel l’Accord de Paris : de transformer les contributions prévues déterminées au niveau national (les désormais célèbres INDC en jargon onusien, NDLR) en des politiques publiques et programmes d’investissement en faveur de l’atténuation et l’adaptation et de tenir nos promesses".
De quoi s’agit-il ? En amont de la COP21, dans le cadre du processus de négociation, les pays avaient soumis leurs plans d'action pour le climat, appelés "contributions prévues déterminées au niveau national" ou INDC. Avec l’adoption de l'Accord de Paris, ces contributions ont changé de statut juridique : le texte transforme ce qui n’était que des intentions en plans d'action concrets dorénavant connus sous le sigle de NDC (article 4 de l’accord). Un nouveau chantier, capital, s’ouvre aux négociateurs qui vont se réunir à Bonn.
Concrétiser les stratégies climatiques
De fait, ces plans sont appelés à matérialiser les stratégies de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Pourquoi ? Les gouvernements y définissent les mesures pour réduire leurs émissions nationales et s’adapter aux changements climatiques. "Les pays ont pris des engagements. Nous sommes maintenant entrés dans la phase de la régulation et de la mise en place de dispositifs législatifs nationaux", résume Thomas Spencer, directeur du programme climat à l’IDDRI.
Tous les principaux secteurs économiques sont potentiellement concernés : transports, bâtiment (deux enjeux essentiels dans les pays émergents qui connaissent une urbanisation rapide), énergie, agriculture, finance.
Relever l’ambition
Le problème ? l’action de ces plans climat reste timorée. En l’état, ils conduiraient à une limitation du réchauffement compris entre 2,9°C et 3,1°C, bien loin du seuil des 2°C requis.
Une révision à la hausse du niveau d’ambition est donc cruciale si les 196 parties signataires de l’accord veulent respecter les objectifs fixés par l’accord. Et c’est ce qu’il prévoit : un mécanisme de révision des NDC tous les cinq ans, avec un premier bilan mondial des impacts prévus en 2023 (article 14 de l’accord). Mais une session intermédiaire est prévue dès 2018, présentée comme un "dialogue de facilitation entre les parties" en jargon onusien. "Cette échéance ouvre de fait une phase de travail de deux ans qui débutera avec la prochaine session des négociations", observe Thomas Spencer.
Un premier rendez-vous est d’ailleurs prévu : un registre public intérimaire des NDC sera présenté le 18 mai à Bonn, lors duquel "les pays auront l'occasion de formuler des commentaires sur la conception et les caractéristiques du registre", précise le communiqué de la CCNUCC.
Et l’occasion de voir si les pays "vont réellement mettre en oeuvre leurs engagements ou s’ils vont préférer faire marche arrière", analyse encore Thomas Spencer, pour qui les points de blocage et de crispation éventuels émergeront durant cette semaine de négociation. "Bonn sera l’occasion de prendre la température, de voir si Paris a ouvert une nouvelle ère. Ou pas."