Publié le 10 juin 2015

ENVIRONNEMENT

Climat : diminuer les polluants à courte durée de vie pour des effets positifs et rapides

Si la baisse des émissions de CO2 est indispensable pour limiter la hausse de la température globale à 2 degrés à la fin du siècle, il faut en parallèle réduire les émissions des polluants à courte durée de vie. L’enjeu ? Des effets positifs qui interviennent à court terme et qui permettent de gagner un peu de temps dans la lutte contre le réchauffement climatique. Certaines entreprises ont déjà pris des mesures dans ce sens. 

Les distributeurs réfrigérés contiennent des HFC, des gaz à effet de serre très nocifs pour le climat.
Stefan / Flickr

Coca-Cola Enterprise ne fabrique pas seulement ses bouteilles, devenues mondialement connues. L’entreprise américaine produit et assure aussi la maintenance de tout le matériel réfrigéré portant le nom de la marque : les distributeurs automatiques ou les armoires réfrigérées que l’on trouve dans les stations-essence, les supermarchés ou les boulangeries, constituent une activité à part entière du groupe.

Un matériel très gourmand en gaz réfrigérant (les hydrofluorocarbures ou HFC) qui, s’il n’est pas bien recyclé, peut être extrêmement nocif pour l’environnement. Les HFC ont en effet un potentiel de réchauffement global jusqu’à 14 800 fois supérieur à celui du CO2. Ils sont par ailleurs des polluants à courte durée de vie (15 ans) auxquels Coca-Cola Enterprise s’attaque depuis 2008.

 

97 % des nouveaux achats sans HFC chez Coca-Cola

 

"Nous avons décidé qu’à l’horizon 2025, notre matériel sera complètement HFC Free", indique Arnaud Rolland, responsable Développement Durable et RSE de Coca-Cola Enterprise. "Fin 2014, 97 % des achats de nos nouveaux équipements étaient HFC Free, en France et dans six pays européens." Coca-Cola Enterprise a opté pour la technologie CO2, un réfrigérant naturel qui élimine 99 % des émissions directes : "En tant que leader du marché, nous avons une responsabilité. Avec cette décision, nous avons un vrai impact sur le marché et auprès de nos fournisseurs."

La suppression des HFC s’inscrit dans une politique plus globale de l’entreprise, qui vise à diminuer d’un tiers son empreinte carbone entre 2007 et 2020. La transformation de son matériel réfrigéré a déjà contribué à diminuer l’empreinte carbone de Coca-Cola Enterprise de 37 % depuis 2007, en France.

 

Vers un accord mondial pour l’interdiction des HFC ?

 

L’interdiction de la production et de la consommation des HFC entre 2016 et 2050 a fait l’objet d’un amendement lors de la 26ème réunion des parties au protocole de Montréal à Paris en novembre dernier, sur les substances appauvrissant la couche d’ozone. La Chine, les États-Unis, l’Inde, l’Union européenne et la France s’étaient déclarés favorables à une telle mesure d'interdiction. Mais certains pays du Golfe, grands consommateurs de systèmes réfrigérés, ont rejeté la proposition, qui a besoin d’un consensus pour être adoptée.

Un séminaire technique s’est tenu en avril dernier pour convaincre les pays à climat chaud d’arriver à une décision consensuelle  à Dubaï lors de la 27e réunion des parties au protocole de Montréal qui se tiendra en novembre. Mais il paraît difficile de parvenir à un accord avant la conférence climatique (COP21) qui aura lieu un mois plus tard.

 

Baisse de la température de 0,5 degré

 

Si les émissions des HFC inquiètent tant, c’est parce qu’en 2050, elles pourraient contribuer à hauteur de 20% aux émissions de gaz à effet de serre. Or, la suppression de ce gaz permettrait d’atténuer de 0,1 degré le réchauffement d'ici à 2050 selon un rapport publié par Climate Analytics, le Potsdam Institute et Ecofys en juin 2013.

Plus globalement, les polluants à courte durée de vie – HFC, méthane, carbone suie, ozone troposphérique – contribuent à hauteur de 45% aux émissions de gaz à effet de serre. Leur réduction rapide pourrait permettre une réduction globale de la température de 0,5 degré à horizon 2050, selon le PNUE (Programme des Nations Unies pour l’Environnement). 2,5 millions de décès par an pourraient également être évités, et l'on pourrait sauver 52 millions de tonnes de cultures d’ici 2030.

 

60% du méthane capté d’ici 2020, promet Veolia

 

Réduire drastiquement les émissions de méthane est aussi l’un des engagements de Veolia pour aller vers une économie bas-carbone. L’entreprise espère ainsi capter plus de 60% du méthane issu de ses centres de stockage de déchets d’ici 2020 : "Le méthane est facile à capturer et à valoriser, explique Antoine Frérot, le PDG du groupe. Autant commencer par le plus simple et avoir des effets à court terme sur le réchauffement climatique". En 2014, le captage du méthane a permis de réduire les émissions de l’entreprise de 8 millions de tonnes équivalent CO2.

Dans l’une de ses usines de traitement des eaux usées, dans le Milwaukee (États-Unis), Veolia a mis en place un parfait exemple d’économie circulaire : elle capte le méthane issu d’une décharge située à proximité et le transforme en électricité pour alimenter l’usine. Par ailleurs, elle récupère également le gaz pour sécher les bactéries contenues dans les eaux usées et ainsi les revendre comme engrais à des agriculteurs. Chaque année, le rejet de 50 000 de tonnes de CO2 est ainsi évité.

 

150 000 décès par an

 

Le méthane est considéré comme le deuxième gaz à effet de serre le plus dangereux après le CO2. Il est responsable de l’augmentation des émissions d’ozone troposphérique (O3). Or, ce gaz provoque chaque année la mort prématurée de 150 000 personnes dans le monde, et cause des millions de maladies chroniques, en particulier chez les enfants et les personnes les plus âgées. Au rythme actuel, si rien n’est fait pour diminuer les émissions de méthane, celles-ci pourraient augmenter de 25% d’ici 2030.

"La réduction rapide des polluants à courte durée doit être intégrée dans l’accord qui sera signé à Paris en décembre", insiste Antoine Frérot, le PDG de Veolia. "On doit aller plus vite et changer d’échelle pour avoir un impact sur le réchauffement climatique. Mais on ne peut pas le faire seuls."

Deux tiers des émissions de méthane sont liées à l’activité humaine, et sa durée de vie dans l’atmosphère est estimée à douze ans. Une politique volontariste et contraignante, mise en place rapidement, pourrait donc être très efficace pour lutter contre le réchauffement climatique, tout en poursuivant la réduction des émissions de CO2.

Concepcion Alvarez
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