Publié le 05 novembre 2023
ENVIRONNEMENT
Les financements pour s'adapter au changement climatique sont encore plus faibles que prévus, à un mois de la COP28
Des efforts très loin d’être suffisants. Dans son rapport annuel "Adaptation Gap Report", publié le 2 novembre, le Programme des Nations unies pour l’Environnement souligne que les sommes nécessaires pour s’adapter au changement climatique sont "10 à 18 fois plus importantes que les flux financiers publics internationaux actuels". Et cet écart risque d’être difficile à rattraper, tant l’action "patine", selon l'ONU.

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"À mesure que les besoins augmentent, l’action stagne", a déploré le secrétaire général de l’ONU António Guterres, peu après la publication du nouveau rapport du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), jeudi 2 novembre. Intitulé "Adaptation Gap Report", ce document de 122 pages dresse le bilan des moyens financiers mis en place pour s’adapter au changement climatique, en comparaison des besoins actuels.
Today’s Adaptation Gap Report shows a growing divide between need and action when it comes to protecting people from climate extremes.
We are in an adaptation emergency.
We must act like it. https://t.co/kqjBguAKVT— António Guterres (@antonioguterres) November 2, 2023
Or les comptes ne sont pas bons, au point que certains experts du climat parlent plutôt d’"Abyss report". Car en dépit des signes évidents "d’une accélération des risques climatiques et de leurs impacts à travers le monde, le déficit de financement de l’adaptation se creuse". Il se situe désormais entre 194 et 366 milliards de dollars par an, soit plus du double des estimations précédentes de l’ONU. Ainsi, le monde devrait dépenser 10 à 18 fois plus que ce qu’il dépense actuellement. Or l'adaptation, autrement dit les mesures destinées à réduire l'exposition et la vulnérabilité, était l'un des points cruciaux de l'Accord de Paris.
S’adapter est devenue une nécessité
"Les risques climatiques s’accéléreront à chaque fraction de degré de réchauffement supplémentaire (…) et les risques persisteront même si les objectifs de l’Accord de Paris sont atteints", expliquent les auteurs de ce rapport. S’adapter est donc devenue une nécessité pour les pays en développement, les plus vulnérables face aux catastrophes naturelles. D’après le PNUE, leur besoin financier est estimé entre 215 et 387 milliards de dollars par an au cours de cette décennie. Une somme nettement réévaluée à la hausse par rapport au dernier rapport de 2020, dont la fourchette était estimée entre 160 et 340 milliards de dollars.
D'ailleurs, "les 55 économies les plus vulnérables du point de vue climatique ont déjà subi des dommages à hauteur de plus de 500 milliards de dollars au cours des deux dernières années", expliquent ces experts des Nations unies. Ils soulignent par ailleurs l’inégalité qui persiste entre les pays en développement et les pays industrialisés. Les premiers qui ont le moins contribué au changement climatique souffrent aujourd’hui le plus de la décision des pays les plus riches de ne pas abandonner les énergies fossiles.
Une aide qui "patine"
Or le soutien des pays les plus riches stagne, malgré les promesses émises lors de la COP26 de Glasgow. En 2021, ils avaient promis de doubler le montant des aides consacrées à l’adaptation pour atteindre le seuil de 40 milliards de dollars par an d’ici à 2025. Mais les flux financiers du Nord vers le Sud sur ce dossier ont baissé de 15%, passant de 25,2 milliards de dollars en 2020 à 21,3 milliards de dollars en 2021.
L’ONU souligne pourtant que chaque dollar investi dans des projets d’adaptation est rentable, car ils permettraient d'éviter des dommages climatiques encore plus coûteux. À titre d'exemple, chaque milliard de dollars investi dans la protection contre les inondations côtières pourrait réduire les dommages économiques de 14 milliards de dollars. Ou encore, les 16 milliards de dollars investis dans l'agriculture éviteraient à 78 millions de personnes de souffrir de la faim.
Publié moins d’un mois avant l’ouverture de la COP 28 à Dubaï, ce nouveau rapport rappelle aussi à quel point le financement de ces mesures d’adaptation permettraient de réduire les indemnisations versées par le fonds dédié "aux pertes et dommages". Créé lors de la COP 27 en Égypte, ce fonds destiné à aider financièrement les pays touchés par les dégâts irréversibles dus au dérèglement climatique, ne fait toujours pas l'unanimité entre les nations. Toutefois, un accord sur sa mise en place a été trouvé samedi 4 novembre lors d’une ultime réunion aux Émirats arabes unis... malgré les réserves émises par les États-Unis et le Japon d'enlever le caractère obligatoire de la contribution des pays riches.