Publié le 20 juillet 2017

ENVIRONNEMENT

États généraux de l’alimentation : "Je ne suis pas là pour désigner des coupables", assure Édouard Philippe

Le Premier ministre, Édouard Philippe, a ouvert le 20 juillet, les États généraux de l’alimentation, une promesse de campagne d’Emmanuel Macron. Avant de légiférer, le gouvernement mise sur des compromis et la bonne foi des acteurs de la filière pour trouver des solutions à la crise agricole. La priorité : mieux rémunérer les producteurs, sans "désigner des coupables" mais aussi comprendre qu’une alimentation de proximité, saine et nutritive est "le marché de demain".

Le jeudi 20 juillet, le Premier ministre Édouard Philippe a inauguré les États généraux de l'alimentation.
Martin BUREAU / AFP

Il y a une longue file d’attente devant le ministère de l’Économie et des Finances ce jeudi 20 juillet. Plus de 500 personnes sont présentes pour assister au lancement des États généraux de l’alimentation. Producteurs, distributeurs, transformateurs, associations environnementales et citoyennes… Toutes les parties prenantes sont représentées. L’enjeu est de taille : sortir de la crise agricole et se tourner vers une alimentation saine durable et accessible. Ces deux chantiers seront débattus entre les différentes filières sous forme d’ateliers d’août à décembre.

"Je le reconnais, l’équation est assez complexe", concède le Premier ministre Édouard Philippe, en ouverture de ces États généraux. Mais "la lucidité n’empêche pas l’optimisme !". D’autant plus que, selon lui, "Si le Président a voulu ces États généraux de l’alimentation, c'est aussi pour rappeler que notre puissance agricole est un élément de notre souveraineté nationale."

 

 

 

165 milliards d’euros de chiffre d’affaires

Pour trouver des solutions durables à une crise qui ne laisse pas entrevoir d’issue, le gouvernement mise surtout sur des compromis, sur "la bonne foi". "Je ne suis pas là pour désigner des coupables", rassure Édouard Philippe. "Il faut rétablir la confiance entre tous les acteurs", souhaite-t-il. Un vœu pieux alors que producteurs, transformateurs et distributeurs se rejettent la responsabilité de la situation.

A la fin des discussions, "il y aura une traduction législative et réglementaire des décisions prises, sinon cela ne sert à rien", assure Stéphane Travert, ministre de l’Agriculture. Jusqu’alors le ministère assurait qu’il ne souhaitait légiférer qu’en dernier recours. Les experts présents sur place s’attendent à ce que ces nouvelles règles soient fixées par décret.

L’objectif prioritaire pour l’exécutif est de mieux repartir la valeur. "Nous voulons que chaque agriculture puisse vivre de son travail (…) certaines fois, le bonheur n'est pas dans le pré", explique le chef du gouvernement. Et pour cause : un agriculteur sur deux vit avec moins de 350 euros par mois. "S'il n’y a pas de partage de la prospérité, il ne peut y avoir d’attractivité", insiste Stéphane Travert.

 

Chiffres cles de la filiere

Selon le ministère, la filière agricole compte pour 165 milliards d’euros de chiffre d’affaires généré par 400 000 entreprises agricoles et 15 000 entreprises industrielles. Du côté de la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles), la filière agro-alimentaire au sens large concerne 835 000 entreprises pour 650 milliards d’euros de chiffre d’affaires et 3,4 millions d’emplois.

 

 Les consommateurs conditionnent le marché 

 

Au-delà des débats entre professionnels, c'est aussi la confiance avec les consommateurs qu'il faut rétablir. La filière, entachée par des crises sanitaires à répétition, doit se renouveler, estime le Premier ministre. Et briser les tabous, notamment sur les perturbateurs endocriniens. Et pour bien comprendre ce qu’attendent les consommateurs, le lancement des États généraux marque aussi le début d'une grande consultation citoyenne en ligne.

 

 

 

"Les consommateurs conditionnent le marché", rappelle Édouard Philippe qui croit en une tendance durable vers une alimentation saine, nutritive et de proximité. Certes, pour l’instant ces pratiques alimentaires sont ceux d’un "trentenaire urbain", estime le Premier Ministre mais "ce sont des signes avant-coureurs de ce que pourrait être le marché de demain", explique-t-il.

Reste que "seulement 4 des 14 ateliers prévus concernent l’alimentation", regrette Alain Bizot, président de l’UFC Que Choisir. "Trois quarts du temps de parole est consacré au problème de revenu des agriculteurs. C'est un vrai sujet mais dans ce cas il fallait annoncer les états généraux de l’agriculture", assure-t-il.

Marina Fabre @Fabre_Marina


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