Publié le 17 juin 2014
ÉNERGIE
Appels à la mobilisation pour financer la transition énergétique
La conférence bancaire et financière sera finalement organisée le 23 juin. Sa préparation étant pour le moins précipitée, les contributions des acteurs susceptibles de financer la transition énergétique sont précieuses. Le Réseau des Administrateurs pour l'Investissement Responsable (RAIR) propose par exemple de dédier 5 % des réserves des institutions de retraite professionnelles à des financements verts. De leur côté les financiers, spécialistes de l’investissement responsable, plaident pour un label attribué aux produits d’épargne. Deux questions demeurent : le gouvernement entendra-t-il leurs appels ? Est-il prêt à mettre en œuvre leurs propositions ?

© EELV
"Nous sommes le porte-voix des citoyens qui cotisent et bénéficient des régimes de retraites français" explique Eric Loiselet, membre du Réseau des Administrateurs pour l'Investissement Responsable (RAIR), et administrateur de l’ERAFP, fonds de pension de la fonction publique. "A ce titre nous lançons des propositions pour faire prendre conscience aux décideurs politiques que les institutions de retraite sont des acteurs économiques clefs. La transition énergétique nous concerne puisque les menaces qui pèsent sur la planète sont aussi des menaces sur l’emploi et les ressources financières des salariés et retraités."
Cette idée, nouvelle en France, doit encore faire son chemin mais les propositions faites par le RAIR nourrissent le débat. Il suggère de donner à ses institutions financières publiques que sont l’ERAFP, l’ Ircantec et la Prefon un rôle politique en orientant une partie de leurs placements vers le financement d’une économie moins destructrice de l’environnement.
A elles trois, elles détiennent 41 milliards d’euros. En dédiant 5 % de leurs réserves à la transition énergétique et écologique, on peut mobiliser 2 milliards d’euros.
La COP 21 en ligne de mire
Le RAIR pose deux autres propositions sur la table : obliger les investisseurs institutionnels français à réaliser leur empreinte carbone, c'est-à-dire mesurer les émissions de gaz à effet de serre qu’émettent indirectement leurs portefeuilles, et créer des obligations vertes (green bonds) pour faciliter le financement de la transition.
"Notre objectif est de participer aux débats que va ouvrir la conférence bancaire et financière. La prochaine étape c’est la conférence environnementale d’octobre où une table ronde sera dédiée à la mobilisation de la société civile puis la COP 21, la conférence sur le climat, organisée à Paris en décembre 2015. Nous participons d’un mouvement plus global porté par la Confédération Syndicale Internationale dans le cadre du comité du capital des travailleurs. 300 milliards de dollars sont mobilisables pour lutter contre le changement climatique et financer la transition énergétique. Ça vaut le coup de prendre au sérieux nos propositions" conclut Eric Loiselet.
Mobilisation in extremis
La conférence bancaire et financière, annoncée de longue date, aura donc finalement lieu le 23 juin, en présence de Michel Sapin et Ségolène Royal. Les deux ministères (finances et écologie) sont les deux co-organisateurs de cette manifestation. Un évènement qui attise l’intérêt de tous ceux qui travaillent sur l’intégration de critères environnementaux et sociaux dans la gestion financière.
Pour Philippe Zaouati, le président de la Commission ISR de l’association Française pour la Gestion Financière, qui participait à un débat sur le financement de la transition énergétique le 11 juin à Paris, "Il y a de l'épargne disponible mais pour l’orienter vers le financement de la transition, il faut remplir plusieurs conditions. D’abord définir l’objectif avec un cadre clair et stable que doit poser le projet de loi sur la transition énergétique (dont la publication reste incertaine, NDLR), ensuite identifier les entreprises dont l'activité répond à cette ambition et trouver des outils qui permettent de mesurer le bénéfice environnemental qu'elles apportent , enfin labelliser les offres de placements crédibles sur le sujet. La dernière étape consiste à créer des incitations. On peut par exemple conditionner le maintien des avantages fiscaux existants à l’orientation d’une partie des placements des Français vers le financement de la transition. »
Les idées ne manquent pas, les spécialistes de l’investissement responsable, dont Novethic fait partie, sont prêts à contribuer. Mais il reste un élément sur lequel le pouvoir politique doit jouer son indispensable rôle : la mobilisation des citoyens sur l’impérieuse nécessité de mettre en œuvre la transition écologique. "Les mots finance et changement climatique sont des mots repoussoirs pour les Français, explique Elisabeth Reiss, qui analyse leurs comportements de consommation sur le développement durable depuis dix ans. Le débat d'experts est nécessaire mais il doit donner envie aux gens d’être associés à la transition. Il faut montrer les bénéfices du changement et travailler sur les comportements."