Publié le 22 mai 2023
ÉNERGIE
TotalEnergies, Shell… la pression monte aux Assemblées générales des compagnies pétrolières
La fin du mois de mai s’annonce agitée pour les compagnies pétrolières. De nombreuses résolutions climatiques sont attendues pour leurs assemblées générales, certaines recueillant des soutiens de poids parmi les grands investisseurs mondiaux. TotalEnergies fait également l’objet de campagnes d’ONG en raison de ses investissements dans de nouvelles capacités pétrolières et gazières.

@Denis Meyer / ANVCOP21, Alternatiba, Amis de la Terre, Greenpeace
L’assemblée générale de TotalEnergies, le 26 mai, se déroulera-t-elle dans les mêmes conditions qu’en 2022 ? Des manifestants avaient empêché l’accès aux actionnaires de la salle Pleyel, à Paris, où se déroule la réunion annuelle du pétrolier. Cette année encore, plusieurs ONG et activistes ont signé une tribune prévenant : "ceci est un avertissement : l’assemblée générale de Total n’aura pas lieu", ciblant les investissements pétroliers et gaziers de Total, notamment au travers de projets comme Eacop.
À quelques jours de l’assemblée générale, 25 ONG ont par ailleurs lancé une campagne baptisée "Defund TotalEnergies" pour demander aux banques et investisseurs de ne plus accorder de financements à l’entreprise tant que celle-ci poursuivra des projets d’investissement dans de nouvelles capacités pétrolières et gazières.
Le scope 3 dans le viseur
Outre les manifestations d’ONG, de plus en plus d’investisseurs se mobilisent lors des assemblées générales pour pousser les industriels à transformer leur modèle. Chez TotalEnergies toujours, l’ONG Follow This, associée à une coalition de 17 investisseurs internationaux, dont PGGM, La Banque Postale AM, Sycomore AM, Edmond de Rothschild AM Degroof Petercam, a déposé une résolution climatique orientée sur les émissions de scope 3 de la major, c’est-à-dire celles correspondant notamment à l’utilisation de ses produits. Les investisseurs demandent d’aligner ces émissions de scope 3 à l’Accord de Paris.
De son côté, TotalEnergies a accepté de soumettre au vote cette résolution mais a appelé ses actionnaires à la rejeter car elle "serait contraire aux intérêts de la Société, de ses actionnaires et de ses clients", explique le groupe dans un communiqué. Le pétrolier va également soumettre au vote de ses actionnaires son plan climatique. Un plan jugé insuffisant par le Forum de l’investissement responsable (FIR) et l’Ademe, qui déplorent notamment un manque d’informations sur la transformation du mix énergétique du groupe. Ils pointe également les investissements du groupe, majoritairement orientés vers le développement des énergies fossiles.
Des soutiens de poids pour les résolutions climatiques
La compagnie pétrolière française n’est pas la seule visée par des résolutions climatiques. Follow This cible également les majors américaines ExxonMobil et Chevron, et les Britanniques Shell et BP. Et certaines de ces résolutions ont déjà obtenu des soutiens de poids, en amont des assemblées générales de ces entreprises. Chez TotalEnergies, le cabinet américain de conseil en vote ISS s’est ainsi prononcé en faveur de la résolution déposée par les investisseurs. Il pourrait ainsi entraîner de nombreux actionnaires qui suivent automatiquement les conseils de ces "proxy advisors".
Chez Shell, dont l’assemblée générale se tient le 23 mai, la position d’ISS est moins nette. Le cabinet conseille de voter contre la résolution pour son activité de conseil classique, estimant que la résolution pourrait entraîner "un changement de stratégie". Mais elle conseille de voter pour dans le cadre de son activité de finance durable pour permettre de mieux comprendre la manière dont l’entreprise prévoit de réduire son empreinte carbone.
Climate Action 100+ se positionne
Les investisseurs leaders de la coalition Climate Action 100+ se sont également positionnés en faveur de ces résolutions climatiques externes. Les Néerlandais PGGM et MN prévoient ainsi de soutenir la résolution à l’AG de Shell, et MN à celle de TotalEnergies. Si tous les membres de la coalition, la plus puissante dans l’univers de la gestion d’actifs avec 700 membres et 68 000 milliards de dollars d’actifs sous gestion, suivent les votes des deux leaders, les résolutions climatiques pourraient obtenir des scores élevés.
L’assemblée générale de BP, qui s’est tenue le 27 avril, donne en effet une indication du poids de la coalition. La résolution demandait au pétrolier, comme à TotalEnergies, d’aligner ses émissions de scope 3 aux objectifs de l’Accord de Paris. Cette demande intervenait dans un contexte particulier car, en début d’année, BP a réduit ses ambitions climatiques en déclarant qu’il ralentirait moins vite que prévu la production d’énergies fossiles. Les membres leaders de Climate Action 100+ ont pourtant annoncé qu’ils voteraient contre la résolution, qui n’a obtenu que 17% de voix favorables.