Publié le 11 septembre 2018

ÉNERGIE

En raison de sa perte de compétitivité, la puissance nucléaire mondiale pourrait baisser de 10 % d’ici 2030

Malgré l’appétence de certains pays asiatiques et du Moyen Orient pour le nucléaire, cette énergie peine à trouver son second souffle. Les renforts de sûreté demandée pour faire face à un accident du type Fukushima grève la compétitivité de l’atome, en particulier face à des énergies bon marché comme le gaz. Selon l’AIEA, d’ici 2030, la puissance installée pourrait ainsi diminuer de 10 %.

Aujourd'hui, le nucléaire représente 5,7 % du mix énergétique mondial.
Pixabay

L'énergie nucléaire fait face à une baisse de compétitivité qui pourrait se traduire par une chute de plus de 10 % du parc mondial de réacteurs d'ici à 2030, estime l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) dans une étude annuelle publiée lundi 10 septembre.

"La capacité de production électrique nucléaire risque de se réduire dans les prochaines décennies, des réacteurs vieillissants étant arrêtés et cette industrie faisant face à une baisse de compétitivité", note cette agence onusienne basée à Vienne, censée promouvoir un développement sûr du nucléaire civil.

Confronté au bas prix du gaz naturel et à l'"impact des énergies renouvelables sur les prix de l'électricité", le secteur continue également de se ressentir des effets de la catastrophe de Fukushima au Japon en 2011, reconnaît l'AIEA.

La technologie EPR en difficulté

Plusieurs pays, comme l'Allemagne et la Suisse, ont entrepris de se désengager de l'atome et cette catastrophe engendre "une hausse des temps de construction ainsi que des coûts en raison de normes de sécurité renforcées", relève l'agence, qui pointe par ailleurs des difficultés de "déploiement" de nouvelles technologies de type EPR.

Cette technologie française, portée par EDF et l’ancien Areva, connaît une histoire industrielle difficile. Sur les quatre réacteurs en construction, deux sont achevé en Chine. Mais les modèles européens connaissent respectivement 8 ans et 10 ans de retard. Quant à leurs coûts, ils ont explosé. L’électricien français va en construire deux tranches supplémentaires à Hinkley Point en Angleterre. Dans le même temps, l’industriel travaille à un design plus facile à construire et plus compétitif.

Dans ce contexte, et alors qu'"un nombre considérable de réacteurs doivent être désaffectés vers 2030 et ensuite", la capacité nucléaire du parc mondial pourrait chuter de plus de 10 % d'ici cette date par rapport aux 392 gigawatts (GW) recensés fin 2017, selon l'hypothèse basse de l'agence.

5,7 à 2,8 % du mix mondial

Le parc nucléaire pourrait notamment décroître de près d'un tiers en Europe et en Amérique du Nord d'ici à 2030, dans ce scénario. De façon plus générale, "les nouvelles projections suggèrent que l'énergie nucléaire pourrait avoir du mal à conserver sa place actuelle dans le mix énergétique mondial", avec des capacités pouvant chuter à 2,8 % en 2050 contre 5,7 % aujourd'hui.

L'AIEA n'exclut cependant pas dans son hypothèse maximale une hausse de 30% des capacités nucléaires mondiales d'ici 2030, à 511 GW. Ce chiffre apparaît toutefois en recul de 45 GW par rapport à celui avancé par l'agence il y a un an.

Le monde compte aujourd'hui 455 réacteurs nucléaires en activité, représentant une capacité installée record de 399,8 GW, selon l'AIEA.  A lui seul, le parc nucléaire Français compte 58 réacteurs pour une puissance de 63 GW environ.

Ludovic Dupin avec AFP


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