Publié le 28 août 2018
ÉNERGIE
Que reste-t-il des promesses du gouvernement sur l'énergie ?
Nicolas Hulot avait été nommé pour, entre autres, tenir l'objectif de réduction de la part du nucléaire dans le mix électrique français. Mais son pragmatisme sur le sujet lui a attiré les foudres de ses anciens alliés écologistes, tandis que le reste du gouvernement adoptait une position favorable à l'atome. Le départ de l'ancien animateur devrait influer la programmation pluriannuelle de l'énergie à venir censé donner une feuille de route pour la fermeture de réacteurs en France.

Nicolas Hulot lors des conclusions du débat public sur la programmation pluriannuelle de l'énergie.
C'est un sujet que Nicolas Hulot, désormais ancien ministre de la Transition écologique, n'a jamais réussi à prendre par le bon bout. Celui de l'atome. Il avait la charge de tenir la promesse présidentielle d'inscrire la France dans l'objectif de la loi de transition énergétique de 2015 qui vise à réduire la part du nucléaire à 50 % en 2025.
Dans un premier temps, fin 2017, il avait acté - à raison - le fait que, étant donné le retard pris sur ce sujet, l'objectif était inateignable. Il avait annoncé un décalage de cet échéance de quelques années. "Je préfère le réalisme et la sincérité à la mystification", assurait-il. Il précisait que cette remise à plat de cette question n'était pas un renoncement, mais la mise sur les rails de ce besoin de rééquilibrer le mix électrique nucléaire français dominé à 75 % de l'atome.
Anciens alliés
Il ajoute : "Si l'on veut maintenir la date de 2025 pour ramener dans le mix énergétique le nucléaire à 50 %, ça se fera au détriment de nos objectifs climatiques. Et ça se fera au détriment de la fermeture des centrales à charbon. Si l'on voulait s'acharner sur cette date, il faudrait même rouvrir d'autres centrales thermiques".
Mais cet argument n'a pas suffi à convaincre ses anciens alliés qui lui sont tombés dessus à bras raccourcis. Par exemple, Le député EELV Yannick Jadot dénonçait "un énorme renoncement de la France" et accusait l’ancien animateur de se soumettre au lobby nucléaire. Le député socialiste Luc Carvounas insistait : "Nicolas Hulot, qui est la caution environnementale du Président Macron et qui cède au lobbying, c'est inacceptable et je le dénonce". Greenpeace France évoquait même d’une "collusion entre l’État et les entreprises".
C'est peut-être cette pression qui poussera le ministre à affermir sa position sur l'énergie nucléaire. En janvier, il choisira de s'aligner sur un scénario de fermeture de 9 à 16 réacteurs nucléaires sur le parc de 58 tranches de l'Hexagone. Un nombre bien au-delà des scénarios voulus par EDF. L'entreprise assurant par ailleurs qu'aucun réacteur ne doit être mis à l'arrêt avant 2029.
Une dérive nucléaire
Ensuite, il écartera toute possibilité de construire un deuxième EPR en France, ces réacteurs de nouvelle génération dont un exemplaire devrait démarrer en 2020 à Flamanville (Manche). Enfin, en juin dernier, il finira par faire sa plus forte attaque sur cette énergie. Il jugera que "Une des raisons pour lesquelles EDF se retrouve en difficulté, c’est que, notamment, la filière nucléaire nous emmène dans une dérive".
Pendant toute cette période, Nicolas Hulot fera face à Emmanuel Macron, Edouard Philippe et Bruno Le Maire. Le Président, le Premier ministre et le ministre de l'Economie, à la manoeuvre pour refondre la filière électronucléaire, soutiendront cette filière. "N'ayez aucun doute : le nucléaire restera essentiel à long terme pour garantir la sécurité d'approvisionnement de notre pays, la compétitivité de notre pays, et l'indépendance énergétique de la nation française", assurait encore Bruno le Maire, fin juin, lors de l'ouverture de la troisième édition du salon World Nuclear Exhibition (WNE) à Paris.
Le départ de Nicolas Hulot risque d'avoir un impact important sur la programmation pluriannuelle de l'énergie que le gouvernement doit présenter d'ici la fin de l'année. Le Secrétaire de l'Elysée, Alexis Kohler, a assuré que la réduction du nucléaire y figurerait avec précision. Mais, sans la pression de l'ancien animateur TV, le gouvernement pourrait choisir une sortie "en douceur" de l'atome, arguant que celui-ci favorise les faibles émissions de CO2 du pays. A moins que le futur ministre nommé en remplacement ait son mot à dire.
Ludovic Dupin, @LudovicDupin