Publié le 23 avril 2025

En pleine guerre commerciale avec Donald Trump, l’Union européenne vient d’infliger un sérieux revers aux géants de la tech américains Meta et Apple. Ils écopent à eux deux d’amendes de 700 millions d’euros. Dans le même temps, 200 médias français attaquent Meta pour “pratiques illégales” dans la publicité en ligne.

La Commission européenne a annoncé ce mercredi 23 avril des sanctions financières contre les géants américains de la tech Apple et Meta (Facebook, Instagram) pour des infractions à la concurrence. Apple se voit infliger une amende de 500 millions d’euros pour des clauses abusives dans sa boutique d’application App Store, au détriment des fournisseurs d’applications et de leurs clients. Meta, géant des réseaux sociaux, devra quant à lui payer 200 millions d’euros pour avoir enfreint une règle encadrant l’usage des données personnelles.

Ces sanctions sont les premières prononcées dans le cadre du nouveau règlement européen sur les marchés numériques (DMA), entré en vigueur l’an dernier pour mettre fin aux abus de position dominante des géants de la tech. Elles interviennent un an après l’ouverture de procédures contre les deux groupes californiens, mais surtout à un moment délicat pour les relations transatlantiques. L’Union européenne est en effet en pleines négociations avec l’administration américaine pour obtenir la levée de droits de douane imposés par Donald Trump.

“Bâtons dans les roues”

Apple est sanctionné pour des restrictions dans son magasin d’applications App Store. Selon la Commission, la marque à la pomme entrave la capacité des fournisseurs d’applications distribuées dans sa boutique en ligne à communiquer directement avec les utilisateurs finaux pour proposer éventuellement des tarifs inférieurs sur d’autres canaux. Meta est lui visé pour manquement à la règle qui le contraint à demander le consentement des utilisateurs afin de pouvoir combiner des données personnelles issues de ses différents services, comme Facebook et Instagram, à des fins de profilage publicitaire. Le groupe de Mark Zuckerberg a cependant proposé une modification de son offre pour se mettre en conformité, d’où une sanction financière inférieure à celle imposée à Apple. Cette proposition, actuellement étudiée par les services de la Commission, pourrait mettre fin à la procédure si elle est jugée satisfaisante.

La Commission affirme rechercher la mise en conformité des entreprises par le dialogue, la punition étant un moyen de dissuasion mais pas un objectif du règlement. La facture pourrait toutefois rapidement s’envoler si Apple et Meta ne faisaient pas preuve de bonne volonté. Les deux entreprises “sont tenues de se conformer aux décisions de la Commission dans un délai de 60 jours, faute de quoi elles s’exposent à des astreintes périodiques”, avertit la Commission. Contrairement à l’usage, les annonces ont été faites par simple communiqué, sans conférence de presse de l’exécutif européen. “Les décisions d’aujourd’hui envoient un message fort et clair“, a affirmé la commissaire à la Concurrence, Teresa Ribera, dans un communiqué, qualifiant les sanctions de “fermes et équilibrées”.

Apple s’est dit “injustement ciblé” et a annoncé aussitôt que le groupe ferait appel tout en poursuivant le dialogue avec les régulateurs. Meta a été encore plus virulent. “La Commission européenne tente de mettre des bâtons dans les roues d’entreprises américaines prospères tout en permettant aux entreprises chinoises et européennes d’opérer selon des normes différentes”, a affirmé Joel Kaplan, directeur des affaires internationales du groupe, ancien membre du Parti républicain et allié de Donald Trump.

“Première historique”

Apple et Meta, tout comme l’autre géant du secteur Alphabet (Google), font l’objet de multiples procédures pour abus de position dominante, tant en Europe qu’aux Etats-Unis. Hasard du calendrier, ce mercredi 23 avril, plus de 200 médias français, dont TF1, France Télévisions, Radio France ou Le Figaro, ont également annoncé qu’ils attaquaient en justice Meta pour des “pratiques illégales” dans la publicité en ligne. Ces médias reprochent au géant d’internet un “ciblage publicitaire basé sur la collecte massive et illicite de données personnelles des utilisateurs“, selon un communiqué de leurs avocats, Me Didier Théophile du cabinet parisien Darrois et le cabinet américain Scott+Scott.

Les plaignants entendent “obtenir réparation du préjudice économique massif (…) causé par les pratiques commerciales déloyales du géant américain“. Ce dernier a, selon eux, “collecté massivement les données personnelles de ses utilisateurs sans informer ni solliciter (leur) consentement”, en “violation flagrante des règles européennes sur la protection des données (RGPD)”. “En exploitant ces données pour proposer des publicités ultraciblées, Meta a pu capter la majorité des investissements publicitaires au détriment des médias“, argumentent les avocats, en qualifiant de “première historique” un tel front commun.

Les avocats des médias concernés font valoir que Meta et Google, autre géant américain d’internet, accaparent l’essentiel du marché de la publicité en ligne. “A eux deux, ils représentent 75 % du marché et 90% de sa croissance”, assurent-ils, en notant que la publicité “constitue l’essentiel” des revenus de Meta, soit “98% de son chiffre d’affaires mondial”. “Sans les pratiques déloyales de Meta, les médias français auraient bénéficié d’une part significativement plus importante des investissements publicitaires numériques”, estiment les avocats.

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