C’est ce qui s’appelle se renvoyer la patate chaude. Alors que les négociateurs à la COP29 de Bakou avaient placé beaucoup d’espoir dans le G20 de Rio, qui se tenait les 18 et 19 novembre, la déclaration finale des plus grandes puissances du monde – et aussi les plus émettrices de CO2 – risque de les décevoir. Celle-ci se contente de réaffirmer le besoin d’arriver à un accord sur un nouvel objectif de financement climatique Nord-Sud, objectif principal de la COP. “Nous nous engageons à soutenir la présidence de la COP29 et à assurer le succès des négociations à Bakou”, indique le communiqué final du G20.
“Nous soulignons la nécessité d’une collaboration et d’un soutien internationaux accrus, notamment en vue d’accroître le financement et l’investissement publics et privés en faveur du climat pour les pays en développement”, concèdent également les dirigeants. Il faut dire que le G20 est une sorte de COP miniature, avec les mêmes lignes de fracture entre les pays du Nord et la Chine, le Brésil, l’Inde, la Russie ou encore l’Arabie saoudite. Celle-ci aurait particulièrement insisté pour que le texte soit moins ambitieux que prévu, un rôle que la pétromonarchie tient aussi à la COP29.
“Pas à la hauteur”
Pour les ONG réunies au sein du Réseau action climat, “le G20 n’est pas à la hauteur alors que l’urgence climatique est plus forte que jamais”. “Alors que les négociations sur le nouvel objectif de financement (NCGQ) comme sur les réductions d’émissions sont au point mort à Bakou, les dirigeants du G20 à Rio n’ont pas envoyé de signaux politiques pertinents : pas de chiffre et une attention encore trop importante à la finance privée”, réagissent-elles auprès des journalistes. “C’est d’autant plus décevant que les pays du G20 constituent de loin les plus gros émetteurs et que leur engagement est nécessaire pour débloquer l’ambition climatique à la fois directement et indirectement”, ajoute Céline Kauffmann, directrice des programmes à l’Iddri.
Le texte aurait pu être plus ambitieux et débloquer un point crucial des négociations à la COP29 de Bakou. Aujourd’hui, seuls les pays dits riches et inclus dans l’annexe 1 de la Convention cadre des nations unies sur le changement climatique sont tenus de participer au financement climatique. Mais ils appellent à élargir la base des donateurs à d’autres pays non inscrits à l’annexe 1 comme la Chine, Singapour, la Corée du Sud ou encore aux pays du Golfe avant de s’engager sur un quelconque montant dans le cadre du nouvel objectif de financement. Une porte de sortie pourrait être d’acter une contribution “volontaire” pour les pays non-inscrits à l’annexe 1, comme l’a suggéré le commissaire européen au climat, Wopke Hoekstra, dans une interview à plusieurs médias européens lundi 18 novembre, sans modifier la classification traditionnelle des pays développés et en développement.
La Chine a également envoyé un signal en ce sens la semaine dernière à la COP29, évoquant pour la première fois en public ses “investissements climatiques dans les autres pays en développement”, alors qu’elle se limitait jusqu’ici à qualifier ses versements de “coopération Sud-Sud”. Un “important petit pas” pour les observateurs sur place qui notent que le pays est prêt à faire des concessions pour faire avancer les négociations. Dans ce contexte, dimanche 17 novembre, le projet de communiqué du G20 prévoyait justement de mentionner que les pays en développement pouvaient apporter des “contributions volontaires” au financement du climat, ce qui aurait été d’une grande aide pour les négociateurs à Bakou. Mais ce point n’a pas été retenu dans le communiqué final.
“Toi d’abord”
Concernant la taxe sur les milliardaires, qui avait fait l’objet d’un accord au G20 Finances en juillet dernier, le communiqué note simplement que les pays chercheront “à coopérer pour garantir que les personnes très fortunées soient effectivement taxées”. Sur l’atténuation, le G20 est là aussi resté timide. Si la déclaration finale soutient le consensus obtenu à la COP28 de Dubaï, il ne reprend pas explicitement l’engagement des pays à “opérer une transition juste, ordonnée et équitable vers une sortie des combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques”. Un blocage que l’on retrouve également à Bakou, où la sortie des énergies fossiles n’est pas du tout portée par la présidence azerbaïdjanaise et où le programme de travail sur l’atténuation a bien failli être reporté à l’année prochaine avant d’être sauvé in extremis.
Des points positifs sont toutefois à souligner. Dans un contexte géopolitique particulièrement tendu, le G20 a ainsi réussi à réaffirmer son engagement “ferme” en faveur du multilatéralisme, et réitère sa détermination à “rester unis dans la poursuite des efforts visant à atteindre le but et les objectifs à long terme de l’Accord de Paris”. L’objectif 1,5°C est en outre mentionné. Une affirmation qui doit désormais se traduire dans les actes à la COP29, qui “ne peut pas se permettre que tout le monde dise “toi d’abord””, ou que les pays attendent que d’autres fassent le premier pas, a tancé Simon Stiell, le secrétaire exécutif de l’ONU Climat.