C’est une enquête à 360° à laquelle s’est livrée le magazine 60 millions de consommateurs, détenu par l’Institut national de la consommation. Les huit principales banques françaises ont été mises au banc d’essai sur plusieurs critères relatifs aussi bien à l’inclusion financière, la politique climatique, le bien-être en entreprise, qu’aux pratiques fiscales de l’établissement. Une première pour le magazine qui publie régulièrement des comparatifs sur les biens et services, mais sans se pencher sur les questions d’éthiques. “Nous avons eu l’ambition de faire un comparatif sur des critères et des valeurs que demandent de plus en plus les consommateurs”, justifie Lionel Maugain, chef de rubrique argent pour 60 millions de consommateurs.
Verdict : un bilan très contrasté entre les grandes banques multinationales qui se retrouvent au bas du classement, et les autres. Le magazine a en effet choisi d’analyser aussi de petits établissements comme le Crédit coopératif, Crédit mutuel Arkéa et La Banque postale, qui revendiquent des pratiques plus éthiques que les grands groupes bancaires. “Nous voulions vérifier que leurs allégations étaient avérées et elles le sont“, résume Nina Godart, journaliste chez 60 millions de consommateurs.
Les grands réseaux bancaires sur la sellette
Le financement du développement des énergies fossiles et de la déforestation fait partie des sujets qui plombent le plus le bilan des grandes banques. Pour des banques multinationales, qui ont développé de longue date des activités de financement de marché pour les entreprises, l’exposition aux énergies fossiles est forcément plus importante et la décarbonation de leur activité, plus difficile à mettre en œuvre. “Mais ce qu’il faut regarder, c’est la dynamique de transformation en cours“, rappelle Lucie Pinson, la directrice générale de Reclaim finance.
“On voit que toutes les grandes banques sont mauvaises notamment pour le financement des terminaux et de l’exportation de gaz naturel liquéfié“, souligne Lucie Pinson. En ce qui concerne l’extraction des énergies fossiles, certaines d’entre elles se distinguent, comme BNP Paribas qui n’a plus soutenu d’entreprises liées à l’expansion des énergies fossiles depuis des mois, tant dans son activité de prêt que dans celle d’émissions d’obligations sur les marchés.
Le point noir de l’inclusion financière
Mais les grandes banques pêchent aussi sur des aspects sociaux, tels que l’inclusion financière. En l’occurrence, le Crédit coopératif est la seule banque à obtenir une note “plutôt satisfaisante”, alors que la Société générale et BNP Paribas, les deux grandes banques commerciales non mutualistes, obtiennent les moins bons scores. Le magazine a notamment pris pour critère les frais et commissions que prennent les banques lorsqu’une personne est à découvert. Le simple envoi de la lettre d’information pour compte débiteur, que la banque envoie au consommateur lorsque son compte tombe dans le rouge, est ainsi facturé jusqu’à 20 euros chez BNP, selon 60 millions de consommateurs. Pire, les frais pour incidents bancaires dépassent régulièrement le plafond de 25 euros auquel les banques s’étaient engagées, allant jusqu’à 300 euros mensuels dans certaines caisses du Crédit agricole.
Même chose pour l’optimisation fiscale, une pratique plutôt réservée aux grands groupes. Aidé de l’Observatoire européen de la fiscalité, le magazine révèle que la Société générale a placé 16% de ses revenus dans des pays à fiscalité réduite, tandis que le Crédit coopératif affirme conserver 99% de ses revenus sur le sol français. “On voit cependant que la tendance à l’optimisation fiscale s’essouffle, en raison de la réglementation et des nombreux scandales comme les Panama papers“, remarque Ninon Godart.
Au final, le Crédit agricole affiche le score cumulé le plus mauvais, selon l’enquête de 60 millions de consommateurs, notamment en raison du soutien aux entreprises impliquées dans la déforestation, à sa présence dans les paradis fiscaux ou encore au fort taux de turnover des équipes de la banque. Il est talonné par les autres grandes banques, BNP Paribas et Société générale. Le palmarès risque d’entacher encore la réputation de ces établissements. “Mais plus on en parle, plus les banques vont devoir revoir leurs politiques“, veut croire Lionel Maugain.