Retour à l’envoyeur. Les pétroliers, dont la responsabilité dans l’accélération de la crise climatique n’est plus à démontrer, pourraient voir leurs activités souffrir des conséquences de la hausse des températures. Alors que celles-ci ont atteint des seuils extrêmes ces derniers jours dans les régions d’Europe du Sud et de l’Est, et que le mois de juin 2024 a été classé par Copernicus comme le plus chaud jamais enregistré au niveau mondial, certaines raffineries de pétrole pourraient être contraintes de réduire leur production selon le média Bloomberg.
The temperature anomaly for the next 7 days is pretty telling.
Cooler across western Europe with searing heat expected across eastern Europe. pic.twitter.com/usOOZQvneL
— Met4Cast. (@Met4CastUK) July 11, 2024
En cause, la conception datée des usines situées sur le Vieux Continent, davantage prévues pour résister aux températures basses, qu’aux fortes chaleurs. “Les raffineries européennes ont été conçues dans les années soixante et soixante-dix. Le monde est devenu plus chaud depuis”, explique à Bloomberg Alan Gelder, vice-président chargé du raffinage, des produits chimiques et des marchés pétroliers au sein de la société de conseil Wood Mackenzie.
10% de la production impactée
Si les sites de production sont équipés de tours de refroidissement, il s’agit d’un système très énergivore pouvant provoquer une sur-sollicitation du réseau électrique et l’arrêt inopiné des raffineries. Par ailleurs, la chaleur a un impact sur les performances même des usines. “Les unités de traitement fonctionnent moins bien et les raffineries peuvent être amenées à réduire leurs cadences”, note Andy Hurburun, responsable du raffinage chez Energy Aspects, interrogé par Bloomberg. Le processus de raffinage implique en effet de chauffer le pétrole brut afin de le transformer en vapeur puis de le ramener à l’état liquide.
Une opération clé qui peut être perturbée par des températures extérieures intenses. Résultat, 10% de la production des usines européennes a été impactée en 2022 selon les estimations du groupe financier Macquarie. Les sites du bassin méditerranéen ont particulièrement été touchés, réduisant leur débit de près d’un tiers durant le second trimestre. Si de nombreux paramètres entrent en compte, des conditions de chaleur extrême pourraient obliger les raffineries à réduire leurs activités de 15% sur une journée, fait valoir auprès du média américain Steve Sawyer, ancien directeur du raffinage chez FGE.
Les ouragans, une autre menace
Un phénomène qui n’est pas limité à l’Europe. Aux Etats-Unis, les sites de production de pétrole connaissent le même sort. Conçus pour fonctionner entre 0°C et 35°C, ils rencontrent régulièrement des dysfonctionnements au-delà de ces températures, faisant varier, en bout de chaîne, le prix des carburants. En 2022, les températures extrêmes ont ainsi engendré une baisse équivalente à 500 000 barils par jour dans les usines situées sur la côte du Golfe, rapporte Reuters. Et la chaleur n’est pas la seule menace qui pèse sur les raffineries. Les tempêtes, ouragans et autres cyclones sont également pointés du doigt par les observateurs du secteur.
En 2021, l’ouragan Ida a entraîné à lui seul la suspension de la production, équivalent à plus d’1,7 million de barils de pétrole. Un scénario qui pourrait se répéter alors que les tempêtes se multiplient dans le pays. Cette année, les prévisionnistes anticipent le passage de sept ouragans dans les mois à venir. Cela représente le double de la moyenne annuelle dans la région de l’Atlantique Nord. Tout comme la hausse des températures, l’intensification de ces catastrophes naturelles est imputable au changement climatique, analysent les scientifiques. D’après les rapports du Giec, les cyclones qualifiés comme très intenses devraient augmenter de 14% durant notre siècle.