C’est un crève-cœur pour bon nombre d’agriculteurs mais, faute de débouchés et de bras pour récolter, ils n’ont pas le choix. Ils sont obligés de broyer leur production.
Fin de journée broyage des asperges vertes faute de récolte hier et de débouché . Ironi de l histoire une amende de 90 € pour avoir répondu au tél en allant broyer et prendre une commande de 6€ . Vive la france vive la république . J’ai l’impression payer mon coup de sang pic.twitter.com/zLVbmJgII0
— laurentbourdil (@bourdillaurent) May 4, 2020
Sur les réseaux sociaux, ils sont plusieurs à avoir posté des photos de leurs récoltes partant à la poubelle.
Toutes ces plantations vont prendre le chemin poubelle faute de marché de plein vent merci du soutien GMS . Solidarité à Pierre pic.twitter.com/8kouq3wT7B
— laurentbourdil (@bourdillaurent) May 3, 2020
Et la promesse de la grande distribution de s’approvisionner en fruits et légumes français ne suffit pas. Il faut dire que les excédents sont massifs. L’un des cas les plus emblématiques est celui de la pomme de terre, dont l’Hexagone est le premier exportateur mondial. Les producteurs français ont 450 000 tonnes de tubercules sur les bras dont 200 000 étaient destinés au marché français et le reste à l’exportation, a indiqué le groupe interprofessionnel de la pomme de terre (GIPT).
"Une crise d’ampleur industrielle"
En cause notamment, la fermeture des fast-foods et des usines à frites surgelées qui sont restées à l’arrêt deux mois. À lui seul, le géant de la restauration rapide McDonald’s consomme près de 190 000 tonnes de pomme de terre par an pour ses frites dont l’origine est 100 % française. Les agriculteurs se retrouvent donc avec des montagnes d’invendus dormant dans leurs entrepôts. "Le risque est de voir se développer des dépôts sauvages de déchets de pommes de terre dans la nature, qui sont vecteurs de foyers infectieux de maladies fongiques ou de pollution par fermentation", a affirmé à l’AFP Bertand Ouillon, délégué du GIPT.
Si des dons ont été réalisés, ils ne sont pas suffisants car la "crise est d’ampleur industrielle", affirme Bertrand Ouillon qui souhaite rediriger les stocks vers de l’alimentation pour bétail par exemple. La situation est similaire dans de nombreuses filières. Le regroupement des Brasseurs de France affirme que 10 millions de litres ont été perdus à cause de "la fermeture brutale des cafés, restaurants, l’arrêt des activités touristiques et l’annulation de tous les festivals et salon". Du côté des fromages AOP et IGP c’est la catastrophe. Bleu d’Auvergne, Cantal, Fourme d’Ambert, Neufchâtel… Plus de 2 000 tonnes de fromages, soit 10 % de la production annuelle, attendent ainsi de trouver des débouchés.
Miser sur l’approvisionnement local dans les cantines scolaires
Si le déconfinement devrait améliorer la situation, la fermeture des restaurants et bars met les producteurs dans une situation critique. La FNSEA, le principal syndicat agricole, essaye donc de pousser au maximum l’achat français. Avec la réouverture des écoles, elle tente d’atteindre les cantines scolaires. "La restauration collective est un débouché majeur pour l’agriculture française alors qu’elle est confrontée à de graves difficultés pour commercialiser ses produits", explique le syndicat. "Les collectivités locales doivent pouvoir mettre en avant dans les cantines scolaires, les produits du terroir et en valoriser ainsi l’origine France, dont la qualité sanitaire et la traçabilité sont irréprochables par ailleurs", ajoute Arnold Puech d’Alissac, membre de la FNSEA.
Cette situation ne concerne pas que la France. L’Italie, la Grande-Bretagne, la Belgique… tous les pays producteurs sont touchés. La présidente de la FNSEA a ainsi demandé au ministre de l’Agriculture, Didier Guillaume de "demander à Bruxelles d’envisager le plus vite possible des mécanismes d’accompagnement financier, pour pouvoir stocker, reporter, congeler, bref faire en sorte que les produits ne soient pas jetés ou détruits et que la perte économique pour les producteurs soit atténuée".
Marina Fabre, @fabre_marina avec AFP