Publié le 7 janvier 2025

La Pologne prend la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne. Allante sur la transition énergétique et l’industrie verte, elle l’est moins quand il s’agit de renforcer les règlementations pesant sur les entreprises et les agriculteurs.

La Pologne, de plus en plus ambitieuse sur la scène européenne, a pris le 1er janvier le relais de la Hongrie à la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne. Un changement accueilli avec soulagement à Bruxelles. Durant six mois, Varsovie devrait jouer beaucoup plus collectif que Budapest pour tenter de faire avancer les dossiers européens.

Parmi les priorités identifiées par les autorités polonaises, il y a la défense et la sécurité dans le contexte de la guerre en Ukraine, la protection des personnes et des frontières, la résistance à l’ingérence étrangère et à la désinformation ou encore la sécurité sanitaire. La Pologne entend aussi assurer la sécurité et la liberté des entreprises, mener à bien la transition énergétique et défendre une agriculture compétitive et résiliente.

Le bastion de l’industrie verte européenne

Les autorités polonaises devraient notamment accompagner le Pacte pour une industrie propre que la Commission européenne doit présenter fin février, l’un des dossiers les plus chauds en matière de transition. Le pays s’est positionné sur la fabrication de batteries au lithium pour les véhicules électriques, dont il est devenu un leader européen. “La Pologne est bien placée pour mettre à profit sa présidence afin d’obtenir un accord sur un solide programme d’investissements de l’UE dans les technologies propres”, avance Neil Makaroff, directeur du think tank Strategic Perspectives. Le pays de près de 37 millions d’habitants demeure très dépendant du charbon, à l’origine de 63% de sa production d’électricité en 2023. Mais il tente de prendre le virage des renouvelables, associé au projet de mettre en service une première centrale nucléaire à l’horizon 2030.

Ces dernières années, la Pologne a ainsi entrepris des transformations économiques majeures pour atteindre la neutralité carbone. Elle a stimulé le déploiement de l’énergie solaire et des pompes à chaleur, s’est lancée dans l’éolien offshore et relancé le déploiement de l’éolien terrestre. La Pologne est devenue “le bastion de l’industrie verte européenne“, souligne Neil Makaroff, qui a consacré un rapport à la présidence polonaise. Six batteries lithium-ion sur dix produites en Europe sont Made in Pologne, le pays se classant au deuxième rang mondial après la Chine. On peut aussi noter que 30% de la production européenne de pompes à chaleur devrait se situer à terme en Pologne selon le spécialiste. Et que le pays est le deuxième employeur du secteur solaire et le deuxième investisseur dans l’éolien en mer d’Europe.

La Pologne défend en outre l’élimination progressive des importations russes de combustibles fossiles avant 2027 et fait de la sécurité énergétique l’une de ses priorités. Cela passe aussi par le fait de garantir que les citoyens et les entreprises aient un accès à l’énergie en quantité suffisante et à un prix abordable, “sans discriminer aucune des sources d’énergie propres“, précise la présidence polonaise. Côté climat, la Pologne devra également mener à bien les négociations sur l’objectif proposé par la Commission de réduire de 90% les émissions de gaz à effet de serre en 2040, par rapport à 1990. Mais les discussions ont à peine démarré. Des ONG craignent que la présidence polonaise ne se montre guère allante sur le sujet et qu’il faille attendre le passage de témoin au Danemark au 1er juillet.

Simplifier la règlementation

Sur l’environnement, la Pologne place aussi parmi ses priorités la protection des agriculteurs, quitte à ne pas aller trop loin sur les obligations. “La présidence polonaise s’efforcera de façonner une politique agricole commune forte qui soutienne les agriculteurs et le développement des zones rurales. Cette politique devrait encourager, plutôt que forcer, les agriculteurs à prendre des mesures pour protéger l’environnement”, explique-t-elle.

Enfin, en ce qui concerne la compétitivité des entreprises européennes, la présidence polonaise appelle, tout comme un certain nombre d’autres pays, à réduire les obligations de déclaration et à simplifier la réglementation européenne. “Dans ce contexte, il sera important que les grandes politiques européennes adoptent une approche plus flexible, abandonnent les sanctions et les obligations et se concentrent sur les récompenses et les incitations”, note la présidence.

Exercée à tour de rôle par chaque Etat membre pendant six mois, la présidence tournante du Conseil de l’UE a une dimension symbolique mais permet de donner des impulsions au sein des 27. Les ambitions de la Pologne pourraient cependant être limitées par ses échéances électorales nationales. Une présidentielle y est prévue d’ici mai prochain et pourrait inciter Donald Tusk à la prudence sur la scène européenne. “Cela va les handicaper car ils sont dans une cohabitation très dure” avec le parti nationaliste polonais Droit et Justice (PiS), rappelle un diplomate européen. “Sur les grands choix, ils se positionneront tout le temps à l’aune de la présidentielle”.

Découvrir gratuitement l'univers Novethic
  • 2 newsletters hebdomadaires
  • Alertes quotidiennes
  • Etudes