Publié le 24 avril 2025

En réponse à Trump et à sa chasse aux chercheurs, l’ancien chef de l’État redevenu député, François Hollande, a déposé à l’Assemblée nationale une proposition de loi pour créer en France un statut de “réfugié scientifique”. Une première mondiale.

Après les réfugiés politiques et les réfugiés climatiques, nous accueillerons bientôt en France les premiers “réfugiés scientifiques”. C’est du moins le souhait émis par François Hollande, de retour sur les bancs de l’hémicycle comme député de Corrèze. Face au nombre croissant de scientifiques qui songent à quitter les États-Unis après les attaques de Donald Trump, l’ancien chef de l’État a déposé, lundi 14 avril, une proposition de loi afin de créer un statut de “réfugié scientifique”.

“Au même titre que les journalistes ou les opposants politiques, lorsqu’ils sont entravés ou censurés, les chercheurs doivent pouvoir être reconnus comme des réfugiés à part entière”, a écrit le député socialiste dans l’exposé des motifs de sa proposition. L’objectif de ce texte est de “faciliter les procédures” en “leur accordant un statut qui serait un statut de réfugié”. Et “au-delà du geste”, il s’agit “de donner l’image d’un pays qui est le nôtre, un pays qui accueille les scientifiques”.

Attirer des “nouveaux cerveaux”

Dans le détail, cette proposition de loi vise à ajouter une nouvelle catégorie aux bénéficiaires de cette protection : “les scientifiques et les chercheurs” qui “risquent de subir une atteinte grave et individuelle à leur liberté académique en raison de menaces ou d’une privation de liberté arbitraire”. Un tel statut, explique d’ailleurs l’ancien chef de l’État, “rappellerait que la liberté de la recherche et d’expression est une valeur fondamentale des sociétés démocratiques”, tout en permettant de simplifier les démarches administratives. “Ce qui peut rebuter un chercheur d’aller dans un autre pays”, comme la France, ce sont les procédures compliquées ou encore la non assurance de pouvoir rester dans le pays.

Il faut donc, selon François Hollande, “ouvrir très rapidement un cadre juridique durable et simple”, et le “faire maintenant, car c’est maintenant qu’il y a des licenciements et des fermetures de laboratoires”. Car il s’agit également pour la France de se positionner pour séduire de nouveaux cerveaux. “Nous ne sommes pas les seuls à vouloir les attirer”, a expliqué le député, prenant l’exemple de la Chine “qui fait des efforts considérables pour faire revenir” de nombreux chercheurs sino-américains. À noter que le Royaume-Uni et l’Allemagne ont également ouvert leurs portes à ces talents venus d’outre-Atlantique.

Les candidatures affluent en France

Selon un sondage publié fin mars par la revue Nature, plus de 75% des 1 600 scientifiques interrogés songent à quitter les États-Unis. En France, leur accueil s’organise déjà. Début mars, le ministre chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Philippe Baptiste, a appelé les universités françaises à réfléchir à des moyens d’accueillir les chercheurs américains. Plusieurs d’entre elles y ont répondu, notamment celle d’Aix-Marseille.

Son président, Éric Berton, a annoncé, par communiqué, avoir reçu 298 candidatures, dont 242 éligibles, pour le programme Safe Place for Science qu’il a mis en place pour “les scientifiques souhaitant poursuivre leurs recherches en toute liberté”. Parmi les dossiers déposés, en cours d’analyse par la faculté, 135 sont américains, 45 binationaux, 17 français et 45 sont en provenance d’autres pays. “Parmi ces dossiers, on retrouve 50% de femmes et 50% d’hommes, une majorité de profils ‘expérimentés'” et provenant d’universités et d’écoles diverses comme Johns Hopkins, Nasa, University of Pennsylvania, Columbia, Yale ou encore, Stanford. Au total, 77 de ces chercheurs travaillent dans les sciences humaines, 69 dans les sciences de la vie, 40 dans les sciences de l’environnement et 56 dans les sciences de l’univers, les mathématiques, la physique ou encore l’informatique, précise ce document d’Aix-Marseille Université.

Seule une vingtaine de scientifiques américains sera accueillie, dès le mois de juin. L’université provençale a ainsi débloqué un budget de 10 à 15 millions d’euros, avec une enveloppe moyenne pour un chercheur comprise entre 600 000 et 800 000 euros sur trois ans. Mais, les moyens alloués aux universités françaises, en baisse avec 30,9 milliards en 2025, contre 31,8 en 2024, sont insuffisants, ont déploré les syndicats de l’enseignement supérieur, qui dénoncent “une situation catastrophique”.

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