L’approche du printemps signifie pour de nombreuses personnes l’inévitable “rhinite allergique”, ou “rhume des foins” : éternuements, nez qui coule, démangeaisons… Mais avec le climat qui se réchauffe, les périodes allergiques s’étendent et s’intensifient. “Les pollens de cyprès sont observés désormais toute l’année. Avant, nous arrêtions les capteurs de mesure l’hiver, ce n’est plus le cas”, témoigne auprès de Novethic Samuel Monnier, ingénieur porte-parole du Réseau National de Surveillance Aérobiologique (RNSA), association dédiée au suivi du risque allergique.
Une invasion pollinique qui prend donc de l’avance. “Les pollens des noisetiers ont eu un mois d’avance dans le Grand-Est l’an dernier, la faute à un temps plus doux, illustre Samuel Monnier. Et cette année, l’alerte rouge liée aux cyprès a eu quelques jours d’avance”. Ambroisie, Aulnes, Bouleaux… L’allongement des périodes à risques concerne de nombreuses espèces, même s’il existe des disparités. “Les pollens ont augmenté de près de 20% en 30 ans”, affirme Samuel Monnier.
Des effets en cascade
Le changement climatique d’origine humaine produit des effets en cascade. En effet, les températures plus douces mais aussi l’augmentation de la concentration de gaz à effet de serre stimulent la floraison, produisant plus de pollens, plus tôt et avec “un contenu allergique majoré”, précise l’INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale). D’autres effets s’y ajoutent : certaines espèces migrent vers le Nord, comme les cyprès ou l’ambroisie, très allergisantes.
Les fortes chaleurs l’été produisent aussi une pollution à l’ozone qui elle-même exacerbe les allergies, selon plusieurs études. La perte de biodiversité, amplifiée par le changement climatique, pourrait aussi jouer un rôle. Une étude publiée en janvier 2024 dans la revue française d’allergologie évoque sa possible responsabilité dans la recrudescence des rhinites allergiques chez les enfants.
“L’asthme d’orage”, une manifestation grave
Résultat, la fréquence des allergies aux pollens augmente. S’il est difficile d’y accoler un chiffre, la tendance est claire pour de nombreux médecins. Alors que près de 30% de la population française déclare déjà souffrir de rhinites allergiques, selon une étude publiée en 2019 par le Centre de recherche en épidémiologie et santé des populations (CESP), la moitié d’entre eux déclare que les pollens les déclenchent.
Un problème de santé publique alors que les allergies aux pollens peuvent produire, dans certains cas, de graves réactions. Les 10 et 11 juin 2023, “la région parisienne a connu un pic exceptionnel, avec une augmentation de 650% des visites aux urgences pour asthme”, relate le RNSA. Il s’agissait d’un épisode exceptionnel d’“asthme d’orage”, lorsque les orages désintègrent les pollens en plus petites particules qui pénètrent ensuite plus facilement dans nos poumons. Plus globalement, 80% des asthmes sont d’origine allergique chez l’enfant, selon l’association Asthme-allergie.
D’autres facteurs que l’effet du changement climatique contribuent à cette explosion des pollens comme la plantation d’arbres particulièrement allergisants, tels que les bouleaux ou encore les haies de cyprès. Si les études manquent pour évaluer la part du changement climatique dans ces manifestations, il est certain que les allergies aux pollens augmentent et que le changement climatique y contribue.