Sonner la mobilisation. C’était l’objectif du Conseil de planification écologique organisé ce lundi 31 mars, à l’initiative du président de la République en présence du Premier ministre et d’une quinzaine de ministres. Emmanuel Macron renoue avec cette tradition lancée dès son premier mandat avec les conseils de défense écologique et mise en pause depuis septembre 2023. Mais alors que les premières rencontres de ce type avaient abouti sur des annonces fortes comme l’abandon de la Montagne d’or ou du projet Europacity, il faudra cette fois se contenter de déclarations d’intention.
“L’objectif était de remettre la lumière sur la planification écologique, remettre de l’ambition et du rythme dans la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre”, affirme le cabinet de la ministre de la Transition écologique, Agnès Panier-Runacher. “C’est une étape nécessaire pour faire le point secteur par secteur à un moment où les chiffres du Citepa révèlent une baisse des émissions qui marque le pas en 2024 notamment dans le bâtiment et les transports“, complète la ministre. Ces deux secteurs feront ainsi l’objet d’une revue de planification dans les prochains mois qui aboutira sur des mesures pour rattraper la trajectoire.
Leasing social électrique
Parmi les principales annonces de ce Conseil de planification écologique, il y a la relance du leasing social pour les véhicules électriques à partir de septembre 2025, un dispositif qui s’adresse aux ménages modestes et qui avait été victime de son succès début 2024. Le dispositif sera financé par les certificats économies d’énergie. Concernant la lutte contre les passoires thermiques, la ministre a indiqué qu’une opération “zéro passoires thermiques” serait lancée dans une dizaine d’agglomérations pilotes volontaires, dans les quartiers et rues où le problème est le plus grave.
Des opérations de porte-à-porte y seront menées pour informer les habitants sur les mesures de soutien et d’accompagnement pour la rénovation thermique, avec l’établissement d’un guichet unique pour simplifier les démarches. Au-delà de ces deux secteurs, la ministre a évoqué un “soutien au plan d’action européen sur l’automobile, l’acier, la chimie et la volonté de la France d’accélérer et de les rendre plus mordants”.
Le secteur agricole fera spécifiquement l’objet d’un “plan de souveraineté engrais” avec par ailleurs “le soutien au développement de légumineuses, plan protéines végétales et la production d’acides aminés pour renforcer l’autonomie protéique des élevages et réduire notre dépendance aux acides aminés et au soja importés“. La stratégie nationale sur l’alimentation, la nutrition et le climat devrait en outre être mise en consultation dans les prochains jours.
Des ONG s’inquiètent toutefois d’un possible abandon des objectifs chiffrés de baisse de la consommation de viande, sous la pression des industriels et avec le soutien de la ministre de l’Agriculture. “Cette évolution des régimes alimentaires doit permettre de maintenir, puis de créer, des débouchés à des modes de production français plus écologiques mais aussi de soutenir la structuration des filières de l’amont agricole à la commercialisation”, soutient Thomas Uthayakumar, directeur du plaidoyer de la FNH.
Une décarbonation qui s’essouffle
Autres pistes avancées : “un plan d’action sur le recyclage du plastique qui favorise également l’écoconception et le réemploi” et “l’accélération de la production en Europe et en France des minéraux et des matériaux critiques nécessaires à la transition écologique et à la poursuite de leur cartographie”.
Enfin, le gouvernement entend lancer une mission sur “la fracture écologique entre les différentes catégories de populations”, qui sera confiée dans les prochains jours “à une personnalité reconnue dans le domaine économique”. Il veut également relancer le cycle des COP régionales pour évoquer cette fois le sujet de l’adaptation aux changements climatiques avec des feuilles de route territoriales (forêts, littoral, montagne, ville…). Le gouvernement n’a toutefois pas fourni de précisions sur tous ces points, renvoyant aux annonces ultérieures.
Selon le dernier bilan du Citepa, la France marque le pas sur son rythme de décarbonation, avec seulement 1,8% de baisse des émissions de gaz à effet de serre en 2024, l’année la plus chaude jamais mesurée dans le monde. Cela représente une baisse des émissions brutes de 6,7 Mt de CO2e. Or la baisse annuelle est censée atteindre en moyenne 15 Mt CO2e sur la période 2024-2030 pour que la France tienne ses objectifs, selon le Haut Conseil pour le climat, organisme indépendant institué par le président Macron.
“Les reculs politiques en matière de transition écologique ont fait décrocher la France de ses objectifs climatiques“, a réagi auprès de l’AFP Anne Bringault, directrice des programmes du Réseau Action Climat, qui regroupe de nombreuses ONG. “Si le but du conseil de planification écologique était de remettre en avant la transition écologique, n’annoncer aucune nouvelle mesure pour réagir au ralentissement de la baisse des émissions de GES n’était certainement pas le bon moyen !”, a-t-elle commenté à l’issue de la réunion.