Chaque nouvel événement extrême révèle l’ampleur des impacts du changement climatique et met au jour des phénomènes jusqu’alors méconnus. Plume ou vague de chaleur, Medicane (contraction de Méditerranée et de Hurricane), épisode cévenol, DANA à Valence (pour dépression isolée à niveau élevé) et désormais “coup de fouet hydroclimatique” (ou “hydroclimate whiplash” en anglais) pour expliquer les incendies de Los Angeles qui ont fait au moins 25 morts.
Le coup de fouet désigne l’alternance de temps humide et sec. La Californie est le dernier exemple en date. La région a subi deux hivers inhabituellement humides en 2023 et 2024, ce qui a entraîné une forte croissance de la végétation. Des épisodes qui ont été suivis par un été et un automne extrêmement secs, et un hiver 2025 lui aussi anormalement sec, alimentant les incendies.
“Multiplié par deux le risque d’incendie”
“Cette séquence de coups de fouet en Californie a multiplié par deux le risque d’incendie : d’abord en augmentant considérablement la croissance des herbes et des broussailles inflammables dans les mois précédant la saison des incendies, puis en les asséchant à des niveaux exceptionnellement élevés avec la sécheresse et la chaleur extrêmes qui ont suivi”, explique Daniel Swain, climatologue à l’université de Californie à Los Angeles (UCLA).
Il est également l’auteur principal d’une étude qui vient d’être publiée dans la revue Nature Reviews et qui montre que les coups de fouet hydroclimatiques ont déjà augmenté en raison du réchauffement climatique. “Les relevés météorologiques mondiaux montrent que les coups de fouet hydroclimatiques ont augmenté à l’échelle mondiale de 31 à 66% depuis le milieu du XXe siècle, plus encore que ce que les modèles climatiques suggèrent”, expliquent les auteurs.
Ils comparent ce phénomène à une éponge. Lorsque l’atmosphère se réchauffe, elle absorbe davantage d’humidité telle une éponge, puis cette eau est soudainement libérée provoquant des événements extrêmes telles que des pluies torrentielles plus abondantes et des glissements de terrain. Mais cela aggrave aussi les sécheresses lorsqu’il fait sec, car l’atmosphère plus assoiffée absorbe plus d’eau du sol et des plantes. À mesure que la température augmente, l’éponge atmosphérique grossit encore plus vite.
“L’un des changements mondiaux les plus universels”
Les experts estiment ainsi que les coups de fouet vont plus que doubler si les températures mondiales augmentent de 3°C par rapport aux niveaux préindustriels. Ils calculent également que chaque degré supplémentaire correspond à 7% d’eau absorbée en plus et libérée par la suite.
“L’augmentation des effets hydroclimatiques pourrait bien être l’un des changements mondiaux les plus universels sur une Terre qui se réchauffe”, a déclaré Daniel Swain. “La planète se réchauffe à un rythme essentiellement linéaire, mais au cours des cinq ou dix dernières années, on a beaucoup parlé de l’accélération des impacts climatiques. Cette augmentation du coup de fouet hydroclimatique, via l’éponge atmosphérique en expansion exponentielle, offre une explication potentiellement convaincante“, conclut le spécialiste.
Les effets hydroclimatiques devraient s’intensifier surtout en Afrique du Nord, au Moyen-Orient, en Asie du Sud, dans le nord de l’Eurasie, dans le Pacifique tropical et dans l’Atlantique tropical. Mais la plupart des autres régions ressentiront également ce changement, estime l’étude.