C’est la fin d’un long feuilleton à rebondissements. La droite européenne a finalement fait marche arrière et renoncé à assouplir le règlement anti-déforestation, qui devait entrer en vigueur au 1er janvier 2025. Le texte sera finalement reporté d’un an, comme l’avait proposé la Commission européenne, mais sans modification, après un feu vert du Parlement européen ce mardi 17 décembre. Il entrera donc en vigueur au 30 décembre 2025.
Ce texte inédit au niveau mondial, adopté en 2023, entend mettre fin à la commercialisation sur le continent européen de produits issus de la déforestation tels que le cacao, le café, le soja, l’huile de palme, le bois, la viande bovine ou le caoutchouc. Les entreprises importatrices, responsables de leur chaîne d’approvisionnement, devront prouver la traçabilité de ces produits via des données de géolocalisation fournies par les agriculteurs, associés à des photos satellites.
Catégorie “sans risque”
Mais le règlement était de plus en plus critiqué par une partie du monde économique et par certains pays d’Amérique du Sud et d’Asie. Sous pression, la Commission européenne avait donc proposé début octobre de reporter l’application du texte d’un an pour laisser à chacun le temps de s’y préparer. Cette proposition, approuvée le 16 octobre par le Conseil de l’Union européenne, avait été mise au vote le 14 novembre au Parlement. Le PPE, le parti conservateur majoritaire dans l’hémicycle, et l’extrême-droite, en avaient alors profité pour affaiblir davantage la portée du texte.
Le PPE s’était notamment prononcé en faveur de la création d’une nouvelle catégorie de pays considérée comme “sans risque”, en plus des trois catégories existantes de risque “faible”, “standard” et “élevé”. Dans le viseur des élus : les pays européens, qui pour certains, ont découvert sur le tard qu’ils seraient eux aussi concernés par le règlement. Ils auraient été pour certains d’entre eux exemptés de ce règlement. Plus globalement, selon le décompte de l’association Canopée, 136 pays entraient dans cette catégorie en raison des critères très faibles. Cette catégorie “sans risque” n’a pas été retenue.
“Un grave retard”
Les représentants des Vingt-Sept avaient en effet refusé ce nouvel assouplissement, et écarté la modification portée par la droite européenne. Le PPE, groupe de droite et première force au Parlement, a fini par se raviser. Sans accord en trilogue, le risque était que le texte entre en vigueur sans aucun report, dans deux semaines. Pour faire bonne figure, la droite met en avant un engagement de la Commission, sans valeur contraignante, à réduire les lourdeurs administratives.
L’ONG environnementale Greenpeace a dénoncé le report d’un an de la loi, un “grave retard” dans la lutte contre la déforestation. “C’est une mauvaise nouvelle : l’UE vient de valider une année supplémentaire d’inaction contre la déforestation, déplore Eric Moranval, chargé de campagne Forêts à Greenpeace France. Nous redoutons aussi que ce texte soit à nouveau attaqué par d’autres manœuvres politiques dans les mois à venir : toute modification visant à créer des failles dans le règlement est inacceptable.”