Publié le 12 septembre 2024

L’usine historique Poulain ne fermera pas. Marque française emblématique, l’usine du chocolatier et sa centaine de salariés jusqu’ici détenus par Carambar & Co sont repris par Andros. Mais les défis sont nombreux alors que le prix du cacao s’envole, dopé par la spéculation et le changement climatique.

Poulain pourra continuer à hennir. Mardi 10 septembre, les syndicats du chocolatier, dont l’usine historique de Blois, dans le Loir-et-Cher, était menacée de fermeture, ont appris qu’un accord de reprise avait été conclu avec Carambar & Co à qui l’usine appartient depuis 2017. Poulain passe ainsi dans les mains du groupe Andros, propriétaire de Bonne Maman et de Mamie Nova. “Carambar & Co et Andros ont annoncé avoir trouvé les bases d’un accord de reprise par Andros de la totalité du site et de ses équipes avec un maintien de la production actuelle ainsi que de nouvelles perspectives de développement”, a indiqué Carambar & Co, dans un communiqué de presse.

En juin dernier, les syndicats avaient en effet appris la volonté de Carambar & Co et du fonds d’investissement français Eurazeo de fermer le site historique de Poulain. Ce dernier, joyau du patrimoine français, a été ardemment défendu par les élus locaux, les habitants de Blois, très attachés à la marque, et les salariés eux-mêmes. Sur le groupe Facebook “Touche pas à mon Poulain”, suivi par plus de 5 400 personnes, des photos de boîtes en fer à l’effigie de Poulain datant du siècle dernier et dénichés dans des greniers défilent au côté de goodies de l’époque Poulidor quand le chocolatier était sponsor du Tour de France ou encore de T-shirts “Poulain c’est Blois, Blois c’est Poulain depuis 1848”.

Andros, un groupe familial plutôt qu’un fonds d’investissement

Il faut dire que l’usine a particulièrement marqué le territoire. Une pétition contre sa fermeture a ainsi récolté plus de 15 000 signatures. “C’est une très grande satisfaction et un soulagement pour les salariés et leur famille”, a réagi dans un communiqué l’intersyndical composé de FO, CGT et CFDT. “Nous sommes également enthousiastes à l’idée de rejoindre Andros, un groupe familial et industriel français, qui valorise le savoir-faire des salariés et la qualité de la production, à la différence des fonds d’investissements qui n’ont pour seul but que la réalisation de profits à court terme.”

Contacté par Novethic, Carambar & Co affirme qu’il n’y aura pas de communication supplémentaire avant que le projet ne soit présenté aux partenaires sociaux. Les syndicats restent ainsi prudents, attendant l’accord définitif. Quant aux élus locaux qui ont reçu le 10 septembre l’équipe dirigeante d’Andros, ils se disent “séduits par l’ambition industrielle” du groupe, mais aussi qu’ils “seront attentives aux négociations à venir sur les modalités de cette reprise”, précisent dans un communiqué Agglopolys, la communauté d’agglomération de Blois, et la Région Centre-Val de Loire. Car ce n’est pas la première fois que Poulain change de main : l’anglais Schweppes en 1988, l’américain Mondelez International en 2010, Carambar & Co en 2017 et aujourd’hui Andros.

Le changement climatique menace la filière

L’enjeu est de taille pour le secteur qui fait face à un double enjeu. D’abord la hausse spectaculaire des coûts de l’énergie mais surtout, l’envolée du prix du cacao, matière première de base de Poulain. Le 12 septembre, le Ghana, deuxième producteur mondial, a d’ailleurs annoncé une augmentation de 45% du prix des fèves pour la saison 2024 / 2025. Or le début d’année a été particulièrement difficile pour le marché. Le 19 avril dernier, le cours du cacao à la bourse de New York a atteint la somme spectaculaire de 12 000 dollars la tonne, soit quatre fois plus qu’au début de l’année. Si la spéculation est en cause, le changement climatique l’est aussi.

Au Ghana, la dernière récolte a subi une baisse de 55% en volume en raison des pluies torrentielles. Le bilan est également catastrophique pour le premier producteur au monde, la Côte d’Ivoire. “En 2023, pendant les périodes de fructification, le climat a été très humide, ce qui a provoqué une hausse des pourritures brunes des cabosses, un pseudo-champignon Phytophthora, qui a beaucoup fait baisser les rendements. Les niveaux de pluies ont été assez exceptionnels, je n’ai pas le souvenir qu’on ait connu ça dans le passé”, expliquait en mars dernier à Novethic Christian Cilas, spécialiste des cultures pérennes tropicales. Alors comment Andros va résister et anticiper cette crise sur le court et long terme ? C’est toute la question.

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