Publié le 2 septembre 2024

Google installera bien un data center en Uruguay, malgré l’opposition de nombreux habitants et des ONG pointant les impacts environnementaux d’un tel projet. Le géant de l’informatique a certes revu sa copie, proposant une technologie moins consommatrice d’eau, mais quid de la pression sur le réseau électrique ?

Google pourra bien installer son data center à 30 km de la capitale uruguayenne Montevideo. Le géant de l’informatique a en effet annoncé jeudi 29 août qu’il investirait 850 millions de dollars dans ce centre de données qui sera chargé des services numériques de Google tels que Search, YouTube, Maps et Workspace. “Nous sommes très heureux d’annoncer cette étape importante qui s’inscrit dans le cadre de trois engagements clés : notre engagement soutenu envers l’Amérique latine, notre objectif en matière de durabilité et notre forte conviction que l’Uruguay est un centre d’innovation dans la région”, a déclaré Eduardo Lopez, président de Google Cloud Latin America, dans le communiqué.

Ce projet n’a pourtant pas été bien accueilli par les ONG environnementales et les habitants. En 2023, alors que le pays connaissait sa “pire pénurie d’eau depuis 74 ans”, contraignant les habitants à boire de l’eau nauséabonde avec un taux de salinité élevé, des manifestations ont éclaté. “No es sequia, es saqueo”, “Ce n’est pas la sécheresse, c’est du pillage”, scandaient alors les manifestants.

Google corrige (en partie) le tir

“Il ne s’agit pas d’une crise de l’eau mais d’une crise écopolitique”, défendait Varey Viera membre de la FEUU (Fédération des étudiants universitaires d’Uruguay) dans le journal El Salto. Il pointait “l’ingérence des multinationales dans le territoire” qui “conduit à une situation où l’eau, un droit et un besoin fondamental, est affectée”. Une situation d’autant plus inacceptable pour les Uruguayens que le pays est le premier au monde à avoir inscrit l’eau comme un droit humain dans la Constitution, en 2005. Dans ce contexte, Google a dû revoir sa copie.

Le premier projet proposé par le géant était particulièrement gourmand en eau utilisant ainsi 7,6 millions de litres d’eau chaque jour, selon le ministère de l’Environnement, soit l’équivalent de la consommation domestique de 55 000 personnes. Refroidir les data center nécessite en effet une grosse quantité d’eau. Mais face à la levée de boucliers Google a dû changer de méthode. Fini le refroidissement par l’eau, il opte pour une “technologie de refroidissement par air” qui est “respectueuse de l’environnement” sans plus de précision. Un changement qui a permis à Google de recevoir l’approbation des autorités environnementales.

Une pression trop forte sur le réseau électrique

La ministre de l’Industrie, de l’énergie et des mines, Elisa Facio, a ainsi salué ce projet qui positionne l’Uruguay comme “centre d’innovation” et a insisté sur le respect de l’environnement. “Nous considérons que la possibilité de développer ce projet sans modifier de manière significative les niveaux d’émissions de CO2 est une valeur en soi”, car il est conforme aux objectifs du gouvernement en matière d’investissement dans l’innovation et le développement durable, a-t-elle fait remarquer.

Outre la réduction de la consommation d’eau, Google s’est également engagé à alimenter son data center en énergies renouvelables. L’Uruguay produit plus de 90% de son électricité à partir de renouvelables, c’est l’un des taux les plus élevés au monde. Mais justement, prévient dans le journal The Guardian María Selva Ortiz, de l’association uruguayenne Friends of the Earth, le centre de données va exercer une pression supplémentaire sur le réseau électrique obligeant le pays à recourir plus souvent aux énergies fossiles. Selon les calculs des Amis de la Terre, le data center va consommer la même énergie que 222 898 foyers dans un pays d’un peu plus de 3,4 millions d’habitants. “Nous avons le sentiment que les multinationales étrangères viennent exploiter nos ressources naturelles sans que cela ne nous apporte aucun bénéfice”, a déclaré Selva Ortiz.

Google rencontre de plus en plus de difficultés à installer ses data center. En 2015, le géant a installé son premier data center en Amérique du Sud au Chili à Quilicura, près de Santiago. Mais depuis, il a rencontré des difficultés pour ce deuxième data center de la région, à Montevideo et a même vu un projet de data center récemment annulé au Chili. En février dernier, un tribunal environnemental chilien a en effet partiellement annulé un permis d’autorisation demandant à l’entreprise américaine de revoir sa copie pour prendre mieux en compte les impacts du changement climatique.

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