Un dossier loin d’être clos. Le chantier controversé de l’autoroute A69, qui doit relier Toulouse et Castres, rentre dans une quinzaine décisive pour son avenir, avec plusieurs échéances déterminantes. Annulé le 27 février dernier par le tribunal administratif de Toulouse, qui avait contesté l’autorisation environnementale du projet, le chantier, démarré il y a deux ans, avait été stoppé net. Depuis cette date, seuls les engins de sécurisation et le personnel de sécurité sont autorisés à accéder aux lieux.
Sauf que le gouvernement ne compte pas en rester là. Par la voix du ministre des Transports, le gouvernement avait demandé un sursis à l’exécution de la décision de justice pour permettre au chantier de reprendre rapidement. En attendant, la cour administrative d’appel de Toulouse examinera le 21 mai un premier recours contre l’arrêt des travaux de l’autoroute. Lors de cette audience, cette instance juridique pourra se prononcer sur leur reprise éventuelle.
Au tour du Conseil d’État de se prononcer
Avant cette date, le Conseil d’État va rouvrir le dossier et se pencher quant à lui sur la légalité du contrat, et ce, dès ce mercredi 14 mai. Les neuf membres que composent cette instance examinent un recours en nullité du contrat de concession de l’A69, “en raison de sa durée excessive”, qu’ont déposé trois associations opposées au projet. Le contrat de concession conclu entre l’État et le concessionnaire Atosca a été fixé pour 55 ans.
Pour Attac Tarn, Agir pour l’environnement et Les Vallons, la durée de ce contrat est “anormalement haute”. Ils dénoncent notamment les 15 années supplémentaires accordées, ajoutées aux 40 ans de base de la concession, censées couvrir les risques pris par l’entreprise. Pour le juriste Jean-Baptiste Vila, interrogé par Reporterre, “les contrats de concession n’ont normalement pas vocation à couvrir les risques du partenaire. C’est à ce dernier d’assumer ce risque, y compris celui d’une perte. Or, aucune justification de cet allongement de la durée du contrat ne se trouve dans les textes ou la jurisprudence du Conseil d’État”.
Ce n’est pas la première fois que le Conseil d’État est amené à annuler un contrat de concession, mais si tel était le cas, Atosca pourrait alors prétendre à une indemnisation des dépenses déjà engagées, si ces dernières sont considérées comme ayant été utiles à l’État. Ce montant s’élèverait à 300 millions d’euros aujourd’hui selon le concessionnaire, mais serait largement surestimé d’après le collectif La Voie est libre. La Cour des comptes a été saisie sur ce point le 12 mars dernier.
Le coup de force des sénateurs et des députés
De l’autre côté, les sénateurs du Tarn, Philippe Folliot et Marie-Lise Housseau, ont affiché leur détermination à voir le projet de l’A69 reprendre coûte que coûte. Le 7 mai, ces derniers ont fait approuver en commission une proposition de loi dont le but est de court-circuiter la suite de la procédure devant la justice administrative, en classant l’A69 en catégorie d’ “intérêt public majeur” (RIIPM). Le texte doit être examiné en séance publique jeudi 15 mai. Près d’une centaine de sénateurs, issus de plusieurs familles politiques, ont cosigné le texte et seule une poignée d’élus de gauche, majoritairement écologistes et communistes, se sont déjà prononcés contre.
Du côté du Palais Bourbon, on s’active également. Selon une information du Parisien, le groupe Ensemble pour la République, présidé par l’ancien Premier ministre Gabriel Attal, a inscrit le texte à l’ordre du jour en profitant de sa niche parlementaire, le 2 juin prochain. Ainsi, si les deux hémicycles adoptent conjointement le texte, il ne restera plus au Conseil constitutionnel qu’à le valider ou non, en cas de recours. Les partisans du projet espèrent ainsi voir une reprise prochaine du chantier par cette entremise. L’avenir de l’A69 se joue dans les prochaines semaines.
Mise à jour du 15 mai 2025 : Les sénateurs ont adopté, ce jeudi 15 mai, à une large majorité avec 252 voix pour et 33 contre, la proposition de loi visant à relancer le chantier de l’A69.