Publié le 30 décembre 2020
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Journalistes tués dans des pays en paix et emprisonnements records, la liberté de la presse mise à mal
Si le nombre de journalistes tué n’a pas cru en 2020 par rapport à 2019, Reporters Sans Frontières note que de plus en plus de cas ont eu lieu dans des pays sans conflit. Par ailleurs, le nombre d’arrestations a augmenté, un effet qui semble lié à des mesures d’exceptions prises pendant la crise épidémique mondiale.

@RSF
Avec 50 journalistes tués en 2020 dont la majorité dans des pays en paix, et près de 400 autres emprisonnés, selon Reporters sans frontières (RSF), cette année témoigne de nouveau de sévères atteintes au droit à l'information. Ce chiffre est stable par rapport aux 53 journalistes tués l'an dernier, malgré la réduction du nombre des reportages du fait de la pandémie de Covid-19, constate RSF dans son bilan annuel. Sur 10 ans, l'ONG dénombre 937 journalistes tués.
L'organisation de défense de la presse constate la réduction du "nombre de journalistes tués sur les terrains de guerre", mais de plus en plus d'assassinats dans des pays dits en paix, une tendance amorcée dès 2016. En 2016, 58 % des journalistes étaient tués dans des zones de conflits contre 32 % cette année dans des pays en guerre comme la Syrie et le Yémen ou "des zones minées par des conflits de basse ou moyenne intensité" (Afghanistan, Irak).
En 2020, près de sept journalistes sur dix -soit 34 journalistes représentant 68 % du nombre total- ont été tués dans des pays en paix, souligne RSF qui a réalisé son décompte annuel entre le 1er janvier et le 15 décembre. Le Mexique est le pays le plus meurtrier pour la profession avec huit morts, suivi par l'Inde (4), le Pakistan (4), les Philippines (3) et le Honduras (3).
Assassinats "particulièrement barbares"
Sur l'ensemble des journalistes tués en 2020, 84 % ont été sciemment visés et délibérément éliminés, contre 63 % en 2019. "Certains l'ont été dans des conditions particulièrement barbares", souligne RSF. A l'image du journaliste mexicain Julio Valdivia Rodriguez du quotidien El Mundo de Veracruz retrouvé décapité dans l'est du pays, et de son confrère Víctor Fernando Alvarez Chavez, rédacteur en chef d'un site d'information locale, découpé en morceaux dans la ville d'Acapulco.
En Inde, le journaliste Rakesh Singh "Nirbhik" a été "brûlé vif après avoir été aspergé de gel hydro-alcoolique, hautement inflammable, tandis que le journaliste, Isravel Moses, correspondant d'une chaîne de télévision du Tamil Nadu, a été tué à coups de machettes", rapporte RSF. En Iran, c'est l'Etat qui a condamné à mort puis exécuté par pendaison l'administrateur de la chaîne Telegram Amadnews, Rouhollah Zam.
Arrestations en hausse
Par ailleurs, RSF a recensé 387 journalistes emprisonnés, "un nombre historiquement haut". L'organisme avait également relevé un effet pandémie avec l'apparition au printemps d'un "pic non négligeable de violations de la liberté de la presse", favorisé par "les lois d'exception ou les mesures d'urgence adoptées" dans la plupart des pays. Selon RSF, qui a lancé en mars l'Observatoire 19, dédié à la question, "les interpellations et arrestations" ont ainsi été "multipliées par 4" entre mars et mai.
"La liberté de la presse est partout en déclin", prévient aussi dans son rapport annuel la Fédération internationale du journalisme (FIJ) qui a recensé 2 658 journalistes tués dans le monde depuis 1990, déplorant dans 90 % des cas d'assassinats "peu, voire pas de poursuites".
La Rédaction avec AFP