Publié le 29 juin 2018
NUMÉRIQUE
Carrefour, Walmart, Casino… La grande distribution mise sur la blockchain pour redonner confiance
La grande distribution se met à la blockchain. Traçabilité, transparence, lutte contre les fraudes... Les avantages de la blockchain sont multiples pour les distributeurs qui peuvent remonter à la source plus facilement. Une manière de sécuriser leur chaîne d'approvisionnement et de rassurer les consommateurs, de plus en plus méfiants après des crises sanitaires à répétition.

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The Economist la surnomme la "machine à confiance". La blockchain, cette technologie développée pour supporter l'essor du bitcoin, s’exporte dans de nombreux secteurs. Parmi eux, l’alimentaire. En Europe, c’est le distributeur Carrefour qui est le pionnier dans ce domaine.
Le 13 mars dernier il a lancé la première blockchain alimentaire d’Europe sur neuf de ses filières. Le groupe d’Alexandre Bompart a commencé par ses poulets d’Auvergne estampillés "filière qualité Carrefour". Chaque volatile a été équipé d’un QR code scannable par le consommateur qui indique le lieu et le mode d’élevage, le nom de l’éleveur, l’alimentation reçue (sans OGM, soja ou céréales), les labels, le lieu d’abattage…. Du champ à l’assiette, il n’y a qu’un pas.
La blockchain responsabilise toute la filière
Toutefois, un mois plus tôt, Casino avait lancé un hackathon consacré aux applications de la blockchain à la grande distribution. Le groupe va ainsi annoncer dans quelques jours le lancement d’une coopération avec une startup spécialisée dans le domaine. Le groupe ne dévoile pas encore les détails de son projet, mais met en avant les questions de traçabilité.
Cet engouement vient du fait que la blockchain offre une transparence absolue sur la chaîne d’approvisionnement. "Du producteur au distributeur en passant par le transporteur, chaque maillon entre ses informations et ces dernières seront accessibles à tous", explique Régis Chenavaz, enseignant-chercheur en économie et marketing à Kedge Business School. Cette "digitalisation" de la supply chain se fait donc sans anonymat, une manière de responsabiliser les acteurs.
Retrouver la source d’approvisionnement en 2,2 secondes
Le but est de redonner confiance aux consommateurs de plus en plus méfiants après de multiples crises sanitaires, des matières fécales dans les boulettes de viande Ikea aux lasagnes au cheval chez Findus en passant par les salmonelles dans les produits Lactalis. Et cet outil pourra également servir aux organismes certificateurs, avance Régis Chenavaz.
Le géant américain Walmart, leader incontesté de la grande distribution, a lui aussi mis en place un système de blockchain développé par IBM. De manière très concrète, il l’a expérimenté sur un paquet de mangues tranchées. Il a remonté toute la filière d’approvisionnement, jusqu’à la source. Sans la blockchain les équipes ont retrouvé la ferme mexicaine productrice en 6 jours, 18 heures et 26 minutes. Avec la blockchain, il a fallu 2,2 secondes.
Le facteur humain toujours imprévisible
Fort de cette réussite, IBM a signé des collaborations avec des grands noms de l’agroalimentaire comme Nestlé, Dole, Kroger, Tyson Foods ou encore Unilever. "Produire des aliments sains est essentiel à notre entreprise, il semble que la blockchain peut aider à donner confiance non seulement sur l’origine de la nourriture, mais aussi sur la façon dont cette nourriture a traversé la chaîne d’approvisionnement", explique Scott Stillwell, vice-président de la sécurité alimentaire chez Tyson Foods.
Reste que derrière cet éloge, des critiques émanent. "La blockchain est fantastique pour ce qui est de la création d’un document de références", reconnaît Mitchell Weinberg, fondateur de la firme de détection et de prévention de la fraude alimentaire Inscatech interrogé par New Food Economy. Mais il souligne que la grande "lacune" de cette technologie est que rien ne permet de certifier la qualité des personnes qui entrent les données et la validité de ces dernières.
Marina Fabre @fabre_marina