Publié le 17 février 2020
GOUVERNANCE D'ENTREPRISE
Luca de Meo, le nouveau patron de Renault, sera mieux payé que Carlos Ghosn
Le prochain directeur général de Renault devrait être mieux payé que ses prédécesseurs. Sa rémunération pourrait atteindre six millions d’euros par an en fonction de la performance du groupe, soit plus d’1 million d’euros de plus que Carlos Ghosn. Un niveau de salaire qui risque de faire grincer des dents les actionnaires. D’autant que le groupe vient d’annoncer des résultats en baisse et un plan d’économie de 2 milliards d’euros sur les trois prochaines années.

@Renault
Jusqu’à six millions d’euros par an. C’est le salaire que devrait toucher Luca de Meo, ex-patron de la marque Seat (groupe Volkswagen) qui va prendre la direction générale de Renault à partir du 1er juillet prochain. La marque au losange n’a pas lésiné sur les moyens. Le dirigeant italien touchera un salaire fixe de 1,3 million d’euros, auquel devrait s’ajouter une part variable correspondant à 150 % du fixe annuel, soit près de 2 millions d’euros, et une rémunération en actions pouvant aller jusqu’à 75 000 actions par an.
L’addition est plus salée que pour Carlos Ghosn. Un fait surprenant alors que le niveau de salaire de l'ancien patron de la marque suscitait régulièrement la colère des actionnaires, notamment de l’État, qui avait poussé à réduire sa rémunération de 30 % en 2018. Celle-ci ne pouvait ainsi plus dépasser 4,7 millions d’euros en 2018, part fixe et variable comprises, à laquelle s’ajoutait néanmoins le salaire versé par Nissan qui portait le total à près de 15 millions d’euros. Quant à Thierry Bolloré, directeur général pendant quelques mois suite au départ de Carlos Ghosn, sa part fixe avait été limitée à 900 000 euros et un variable de 125 % de ce montant.
Le salaire de Luca de Meo risque donc de faire tiquer quelques actionnaires. "Sa rémunération nous semble élevée, avec un fixe qui est supérieur à la médiane des rémunérations des dirigeants du CAC 40, remarque Charles Pinel, associé chez Proxinvest, l’agence de conseil en vote. Nous avons une limite à 240 Smic, sa rémunération totale peut potentiellement la dépasser." Selon la dernière étude de Proxinvest, la rémunération fixe médiane des patrons du CAC 40 atteignait 1,1 million d'euros et la rémunération totale (fixe et variable), 4,1 millions d'euros en 2018.
Des critères de performance à surveiller
Les actionnaires seront particulièrement vigilants sur les conditions d'attribution de la part variable. "Pour Carlos Ghosn, la plupart des critères ne nous paraissaient pas suffisamment élevés et il était sûr d’obtenir le bonus", rappelle Charles Pinel. Luca de Meo, lui, sera d'autant plus scruté que le constructeur a annoncé le 14 février des résultats dans le rouge pour 2019.
Chiffre d’affaires en recul de 3,3 %, ventes de voitures en baisse de 3,4 %, résultat d’exploitation à 2,1 milliards d’euros contre 2,9 milliards l’année précédente… Et une année 2020 qui risque de n’être pas meilleure. La rémunération élevée du nouveau dirigeant est-elle proportionnelle au défi qui l’attend ? "Il faudra alors que sa part variable soit prédominante et que les critères de performance prennent en compte le long terme", prévient Proxinvest.
Lors de la présentation des résultats annuels 2019, Clotilde Delbos, la directrice générale par interim du groupe Renault, a prévenu qu’un plan d’économies serait annoncé en mai. Elle vise une réduction des coûts de structures de deux milliards d’euros sur trois ans. Avec un impact possible sur l’emploi, le constructeur n’excluant notamment pas de fermer des usines dans le monde, voire en France. Dans ces conditions, la rémunération élevée de Luca de Meo risque d’avoir encore plus de mal à passer auprès des salariés.
Arnaud Dumas, @ADumas5