Publié le 16 juin 2017
GOUVERNANCE D'ENTREPRISE
Rémunération de Carlos Ghosn : pourquoi un rejet des actionnaires n’aurait rien changé
Le 15 juin, lors de l'Assemblée générale de Renault, les actionnaires ont approuvé la rémunération de 7 millions d'euros du PDG Carlos Ghosn pour 2017. Un vote négatif n'aurait cependant rien changé. En effet, la loi prévoit, en cas de rejet, la reconduction de la rémunération antérieure, soit... 7 millions d'euros.

Jeudi 15 juin, lors de l’Assemblée générale de Renault, les actionnaires ont approuvé à 53,05% la rémunération du PDG du groupe automobile, Carlos Ghosn. Elle s'élève à 7 millions d'euros pour 2016. Ce vote était consultatif. Un second vote, contraignant cette fois, concernait la politique de rémunération définie pour 2017. Là aussi, les actionnaires ont validé les futurs 7 millions d’euros du PDG, à 54,01%. Ces taux exceptionnellement bas n'ont en réalité jamais mis en danger le grand patron.
Une "déception" pour Loïc Dessaint, directeur de Proxinvest, cabinet de conseil auprès des investisseurs, qui avait appelé à voter contre. Ainsi que pour l’État, actionnaire du groupe, qui s’était positionné en leader de la fronde. En effet, un rejet de ces politiques de rémunération était de l'ordre du possible. L’année dernière, alors que le vote n’était pas encore contraignant, les actionnaires avaient refusé à 54 % la rémunération de Carlos Ghosn. À cette époque, les 7 millions touchés chez Renault, ajoutés aux 8 millions d’euros de Nissan (dont Carlos Ghosn est PDG), avaient soulevé de nombreuses critiques. Pour comparaison, la rémunération médiane d’un PDG du CAC 40 avoisine plutôt les 4,3 millions d’euros.
Soutien des deux agences de conseil américaines
Reste à comprendre pourquoi les actionnaires ont fait volte-face par rapport à l’année dernière. "Les deux grandes agences de conseil américaines ont appelé à voter pour, contrairement à 2016", explique Loïc Dessaint. "La raison en est que, depuis le rejet des actionnaires, Renault a amélioré la transparence, il fait maintenant partie des meilleurs élèves français dans ce domaine. Il communique les critères de performances et les objectifs à atteindre. Chez Proxinvest, cela nous a permis de voir que les critères de performances étaient établis au rabais, que la rémunération variable de Carlos Ghosn était forcément assurée".
Au rang des marques de bonne volonté de la marque, Renault a également concédé l’annulation d’un bonus annuel différé sur plusieurs années ainsi qu’une baisse du pourcentage du variable. "Au total, la baisse n’est que de 2% sur le total de la rémunération. C’est une plaisanterie !", s’insurge le directeur de Proxinvest.
En cas de rejet, la rémunération antérieure demeure
Cependant, un rejet des actionnaires n’aurait pas vraiment changé la donne. La loi Sapin 2, qui a instauré un vote contraignant des actionnaires, prévoit qu’en cas de rejet, la rémunération antérieure demeure. Un vœu des parlementaires qui voulaient éviter un vide juridique. Or, la rémunération de Carlos Ghosn n’a pas évolué entre 2016 et 2017.
À partir de 2018 en revanche, en cas de vote négatif de l’Assemblée, les rémunérations variables ou exceptionnelles ne pourront pas être versées. De quoi abaisser considérablement les rémunérations de Carlos Ghosn.
Marina Fabre @fabre_marina