Publié le 09 octobre 2017
ENVIRONNEMENT
De l'urgence de récupérer les vieux portables pour structurer la filière du recyclage
Si vous fouillez dans vos tiroirs, vous trouverez certainement un ou deux vieux portables que vous gardez au cas où mais dont vous ne vous servirez certainement plus jamais. Pour inciter les citoyens à les valoriser, Bouygues Telecom lance du 9 au 21 octobre une opération spéciale de collecte. L’objectif est d’augmenter significativement les volumes afin de structurer et développer la filière du recyclage en France.

100 millions de mobiles dorment dans nos tiroirs, selon un rapport sénatorial de 2016. Pourtant, chacun de ces petits appareils représente une mine de matériaux réutilisables. Afin que le recyclage des anciens portables devienne un réflexe comme l’est le recyclage du verre ou du papier, Bouygues Telecom lance à partir de ce lundi 9 octobre une grande opération de communication et de collecte. Chacun est invité à venir apporter ses vieux mobiles dans l’une des boutiques de l’opérateur, contre un bon d’achat de 10 euros. Ils seront soit recyclés soit reconditionnés pour une seconde vie.
Actuellement, seuls 15 % des 24 millions de portables vendus chaque année en France sont collectés. Un sondage Kantar TNS commandé par l’opérateur français confirme que 72 % des Français gardent chez eux des téléphones mobiles trop vieux, cassés ou usagés. "Notre objectif est de créer une opération coup de poing, explique Olivier Roussat, PDG de Bouygues Telecom. L’objectif est d’initier une filière beaucoup plus puissante. Elle sera d’autant plus industrialisée et efficace que nous collecterons davantage de volumes."
70 kilogrammes de matière pour un smartphone
"Un Iphone, c’est 70 kilogrammes de matière première brute", rappelle Isabelle Autissier, présidente du WWF France et marraine de l’opération. "Un téléphone au fond d’un tiroir, c’est du gaspillage." Cobalt, terres rares, or, plastique, métaux ferreux... Au total 80 % des portables collectés sont recyclés ou valorisés énergétiquement. C’est ce que fait Suez, autre partenaire de l’opération, dans son usine de Feyzin (69).
"Les téléphones sont démantelés, broyés, triés. Les métaux sont séparés puis renvoyer dans les filières de recyclage plastique. Par exemple, ces appareils sont composés de 50 % de matières plastiques qui peuvent être réutilisées dans les télécommandes", témoigne Philippe Maillard, directeur général recyclage et valorisation France de Suez.
Quand le portable fonctionne encore, il est alors envoyé dans une filière de reconditionnement et gagne le marché de l’occasion après être passé par les cases réparation et effacement des données. La société Recommerce qui travaille avec Bouygues depuis 2009 a ainsi remis 400 000 téléphones reconditionnés sur le marché. Un gain de 35 kilogrammes de matière par téléphone !
Obsolescence programmée
Chez Orange, où on est également sensible à cette question, 10 millions de portables ont été collectés depuis 2010 en France et en Afrique. L’entreprise envoie les portables reconditionnés en Afrique et importe autant de déchets mobiles pour les recycler dans l’Hexagone. Cela évite qu’ils ne se retrouvent abandonnés dans la nature ou brûlés.
Mais au-delà de la question du recyclage, celle de la durée de vie de ces appareils pose problème. Pour Isabelle Autissier du WWF, il faut garder son portable au moins cinq ans pour amortir son empreinte environnemental. Or les Français en changent en moyenne tous les deux ans. En cause, l’obsolescence programmée des produits avec d’une part, de nouvelles versions plus sophistiquées ou des mises à jour incompatibles avec les précédents modèles. D’autre part, une durée d’utilisation du produit réduite, avec des batteries ne pouvant supporter qu’un nombre limité de cycles de charge et une réparation compliquée due à des produits quasi indémontables.
En juin, Greenpeace avait adressé un carton rouge aux leaders Apple et Samsung notamment pour le manque de réparabilité de leurs smartphones. "Nos produits sont conçus pour durer dans le temps, se défend Jean-Philippe Illarine, le directeur de la division mobile de Samsung France. Mais c’est le consommateur qui nous demande d’aller toujours plus vite et d’être toujours plus innovants. L’innovation technologique est sans fin." Ce qui n’est malheureusement pas le cas des ressources de notre planète.
Concepcion Alvarez @conce1