Publié le 06 mai 2019

ENVIRONNEMENT

Plastique : depuis que la Chine a fermé sa poubelle, le recyclage mondial est en plein chaos

En bannissant début 2018 l'importation de déchets plastiques sur son territoire, la Chine a créé un véritable séisme dans l'industrie mondiale du recyclage. Depuis, les pays occidentaux peinent à trouver des solutions de repli. D’autant plus que plusieurs pays voisins régulent à leur tour cette activité pour limiter les importations de détritus.

Depuis 2018, la Chine n'accepte plus les montagnes de déchets plastique venues de l'étranger.
@SeanPavonePhoto

Des montagnes de déchets qui s'entassent dans les pays occidentaux aux villes d'Asie du Sud-Est qui croulent sous les emballages importés, le circuit du recyclage mondial est en crise depuis que la Chine a décidé de ne plus être la poubelle du monde. Pour ne plus être la première destination mondiale du recyclage, Pékin a banni début 2018 l'importation de plastiques et de plusieurs autres catégories de déchets qu'elle recyclait jusqu'alors.

Les déchets plastiques des pays développés ont commencé à être redirigés massivement vers plusieurs pays d'Asie du Sud-Est où des industriels chinois du recyclage ont transféré leurs activités. "Cela a été comme un tremblement de terre", a confié Arnaud Brunet, directeur du Bureau international du recyclage (BIR) basé à Bruxelles. "La Chine était le premier marché des déchets recyclables".

Sa fermeture a "créé un choc sur toute la planète". La Malaisie a été la plus affectée. Le pays est devenu une destination de choix pour les industriels. Résultat, les importations de plastique du pays ont triplé depuis 2016 pour atteindre 870 000 tonnes l'an dernier, selon des données officielles.

Le gouvernement malaisien agit

Dans la petite ville de Jenjarom, près de Kuala Lumpur, les usines de retraitement de plastique ont poussé comme des champignons, et se sont mises à émettre des fumées toxiques. Des montagnes de plastique parsèment le paysage. On y trouve toutes sortes de déchets, emballages alimentaires, bidons de lessives ou sacs en plastique venant de France, d'Allemagne, voire des États-Unis ou du Brésil.

Après de nombreuses plaintes sans réponse, les autorités ont finalement agi. Des usines ont fermé et les permis d'importation de plastique ont été gelés temporairement. En septembre, 33 usines avaient fermé à Jenjarom et la qualité de l'air s'est améliorée même si les amoncellements de plastique sont restés. Les défenseurs de l'environnement pensent que les opérations de recyclage ont été déplacées ailleurs.

Pour les pays occidentaux, qui se reposaient sur la Chine, chercher de nouvelles destinations capables de retraiter leur trop plein de déchets est aussi un casse-tête. Alors que les industriels du recyclage estiment souvent que les coûts sont trop élevés pour retraiter les déchets dans leur pays d'origine, certains ont eu recours aux décharges ou aux incinérateurs faute de mieux.

Aides publiques

La ville d'Adelaide, dans le sud de l'Australie, qui expédiait l'essentiel de ses déchets en Chine, retraite désormais sur place 80 % de ses détritus, la plupart des déchets restants étant envoyé en Inde. "En aidant les acteurs locaux, nous avons été capable de retrouver des prix similaires à ceux d'avant l'interdiction chinoise", souligne Adam Faulkner, responsable de l'organisme qui gère les déchets du nord d'Adelaide.

En Chine, les importations de plastique ont chuté de 600 000 tonnes par mois en 2016 à 30 000 tonnes par mois en 2018, selon les chiffres d'un nouveau rapport de Greenpeace et de l'ONG Alliance globale pour les alternatives à l'incinération (GAIA). Des zones entières dédiées au recyclage ont été abandonnées.

Si la Malaisie, la Thaïlande et le Vietnam, premiers pays visés par les industriels, ont pris des mesures pour limiter les importations de plastique, les flux ont été redirigés vers d'autres pays moins régulés comme l'Indonésie et la Turquie, selon le rapport de Greenpeace.

Ludovic Dupin avec AFP


© 2023 Novethic - Tous droits réservés

‹‹ Retour à la liste des articles

ENVIRONNEMENT

Déchets

Electroniques, toxiques, plastiques, les déchets s’accumulent de façon vertigineuse sans qu’ils soient traités de façon adaptée. Tri, collecte, recyclage et réduction sont les différentes formes de lutte contre cette pollution envahissante.

Fast food dechets emballages unsplash

Règlement européen sur les emballages : Le lobbying des industriels menace la loi anti-gaspillage française

Après plusieurs mois de négociation, le Parlement européen a adopté le 22 novembre dernier sa position sur le projet de règlement sur les emballages et les déchets d’emballages. Un texte qui manque d’ambition notamment sur la question du réemploi selon les associations qui vont jusqu’à craindre un...

Recyclage dechets plastiques Turquie OZAN KOSE AFP

L’Union européenne ne pourra plus exporter ses déchets plastiques vers les pays pauvres

C'est la fin du "colonialisme des déchets" pour l'ONG Zéro Waste. D’ici 2026, l’Union européenne ne pourra plus exporter ses déchets plastiques en dehors de l'OCDE. Fruit d’un accord entre les États membres, la décision permet de responsabiliser les pays européens, mais pourrait manquer d’ambition....

Biodechets pexels

Dans trois mois, tous les Français devront trier leurs biodéchets mais rien n'est prêt

À partir du 1er janvier 2024, tous les Français auront la possibilité de trier leurs déchets verts et alimentaires. Du moins, sur le papier. Dans les faits, peu de collectivités seront prêtes à déployer cette nouvelle collecte à temps. Manque d’information, coût important, mesure non contraignante…...

Dechets plastique Unsplash

Coca-Cola, Nestlé, Amazon : Comment le recyclage plastique de 500 grandes marques a échoué aux États-Unis

Une enquête menée par le média américain Bloomberg démontre qu’une partie des emballages plastiques collectés par l’organisme How2Recycle finiraient leur vie en décharge. Des révélations qui mettent à mal l’initiative rejoint par plus de 500 marques aux États-Unis et au Canada.