Publié le 09 mai 2017
ENVIRONNEMENT
Malgré la pression du G7, les États-Unis sont déjà sortis de l'Accord de Paris
Les dirigeants du G7 se réunissent à Taormina en Sicile, ce 26 et 27 mai. A cette occasion, la planète attend la décision de Donald Trump sur la sortie ou non des États-Unis de l'Accord de Paris. Mais, en réalité, sa politique de dérégulation environnementale conduit déjà à une sortie du texte adopté lors de la COP21.

AFP
"Nous allons annuler l'Accord de Paris sur le climat", lançait le candidat Donald Trump le 26 mai 2016, sous les applaudissements de ses supporters. 100 jours après son entrée en fonction, les réunions se multiplient à la Maison-Blanche autour de cette promesse de campagne. Faut-il la tenir ou l'abandonner ? La question est diplomatique, économique et surtout politique pour le nouveau président américain.
Mais plusieurs experts mettent en garde : les annonces à venir ne changeront rien sur le fond. Avec la politique actuelle de dérégulation environnementale, les États-Unis de Donald Trump sont déjà sortis, de fait, de l'Accord de Paris. Et la volonté des dirigeants du monde de convaincre Donald Trump, durant le G7 des 26 et 27 mai en Sicile, de s’engager contre le changement climatique ne suffira pas.
Le texte signé à l'issue de la COP21 fixe pour objectif de contenir la hausse de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2°C. En le ratifiant le 3 septembre 2016, Barack Obama avait pris, au nom du peuple américain, un engagement qualifié de "juste et ambitieux" à l'époque : réduire de 26 à 28 % les émissions de gaz à effet de serre américaines d'ici 2025 par rapport à 2005.
Le Clean Power Plan aux oubliettes
Pour y parvenir, l'ancien président américain misait notamment sur le Clean Power Plan qui prévoyait des réductions drastiques des émissions de CO2 des centrales électriques de 32 % d'ici 2030 par rapport à 2005. Contesté devant la justice par des élus républicains, ce texte n'a jamais été appliqué.
Plus largement, depuis son entrée en fonction, Donald Trump s'est lancé dans un détricotage minutieux de toutes les normes environnementales mises en place par son prédécesseur. Romany Webb, spécialiste du climat à l'université Columbia, a lancé un outil baptisé "Climate Deregulation Tracker" pour les lister.
Au-delà de la relance spectaculaire mais économiquement intenable du secteur du charbon, elle met en avant "l'impact significatif de la modification des normes sur les émissions et la consommation des voitures". Mi-mars, le président américain a en effet décidé de suspendre, avant de le réévaluer, le texte de l'Agence de protection de l'environnement qui détermine les objectifs d'émissions polluantes pour la période 2022-2025. Or le transport est récemment devenu la première source de pollution aux États-Unis, devant la production d'électricité.
Les États-Unis n'y parviendront pas
L'autre grand motif d'inquiétude pour cette spécialiste de la législation environnementale est le sort réservé au méthane, un des plus puissants gaz à effet de serre, dont les limitations d’émissions imposées aux secteurs pétroliers et gaziers ont également été supprimées par Donald Trump.
Romany Webb tire donc la sonnette d'alarme. Avec la suppression de toutes ces législations environnementales, on peut d'ores-et-déjà dire qu'"il sera très difficile, et probablement impossible, pour les États-Unis d'atteindre les objectifs fixés par l'Accord de Paris". David Bailey, spécialiste de la politique climatique américaine au sein du Climate Leadership Council, abonde, chiffres à l'appui. Selon lui, avec une dérégulation environnementale comme celle engagée, les États-Unis devraient voir leurs émissions diminuer de seulement 9,5 % à l'horizon 2025 par rapport à 2005. Et ce, seulement à cause de la perte de vitesse du secteur charbonnier… Et bien loin, de toute manière, de la baisse de 26 à 28 % promise au reste du monde.
Une présidence Clinton n’aurait pas inversé la tendance
Mais David Bailey va plus loin. Selon lui, voilà des mois déjà que les États-Unis savent qu'ils n'atteindront pas les objectifs fixés à Paris, bien avant l'élection de Donald Trump. "Le programme imaginé par Barack Obama aurait permis une baisse de 16 % des émissions par rapport à 2005 et on n'aurait sans doute pas vu d'effets concrets avant 2025 du Clean Power Plan. J'aurais dit la même chose si la présidente s'appelait Hillary Clinton", insiste cet ardent défenseur d'une tarification du carbone.
Alors que les discussions se poursuivent à la Maison-Blanche, deux autres catégories d'acteurs s'engagent au nom des États-Unis pour tenter de sauver les engagements pris à Paris. D'un côté, des villes et des États comme la Californie ou New York qui mettent en place leurs propres législations environnementales. De l'autre, des entreprises qui font le choix de la transition énergétique, conscientes des opportunités économiques. Reste à déterminer à quel point leurs efforts pourront contrebalancer les décisions prises à Washington.