Publié le 21 mai 2015
ENVIRONNEMENT
Climat : les entreprises doivent se fixer des objectifs en ligne avec celui de 2°C à 2050
Pour ne pas dépasser les 2 degrés de réchauffement climatique d'ici 2050, il ne faut pas émettre plus de 1 000 millions de tonnes de carbone, ce qui suppose un changement de cap radical de l’ensemble de l’économie mondiale. Pour faire passer le message, un collectif d’organisations évalue "le budget carbone" disponible pour chaque secteur, et incite les entreprises à définir leurs stratégies de réduction d’émissions à l’aune de ces "quotas".

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"L’objectif des deux degrés de réchauffement est impératif et tout le monde doit s’y mettre". C'est le message porté par les nombreux décideurs économiques et financiers présents au Business and Climate Forum, au siège de l’Unesco à Paris. Mais la trajectoire pour respecter cet impératif est loin d’être en place, et rares sont les entreprises dont les objectifs de réduction sont en ligne avec les 2 degrés de réchauffement à l'horizon 2050. Pour les rappeler à l'ordre, trois ONG (CDP, WWF et WRI) lancent un nouveau référentiel : les émissions disponibles secteur par secteur.
Des budgets carbone par secteur
Intitulé "science based targets", ce que l'on pourrait traduire par "cibles scientifiquement prouvées", le projet a été dévoilé à l’Unesco le 20 mai, à Paris, en prélude au Business Climate Summit.
"Nous essayons de mesurer, secteur par secteur, quel est le budget carbone disponible" explique Alberto Carillo, directeur de l’engagement climat des entreprises pour le WWF International. "Nous avons pris en compte les émissions directes et indirectes (Scope 1 et 2), l’intensité carbone (consommation d’électricité), les objectifs de réduction des émissions et les projections d’évolution des activités." Les données ainsi obtenues permettent de calculer des allocations de décarbonisation par secteur (SDA, pour Sectorial Decarbonization Allocation). Il s’agit, en gros, des quantités d’émissions possibles d’ici 2050, en fonction du poids de l’entreprise dans son secteur, et à l’échelle de la planète pour respecter l’objectif d'un réchauffement climatique limité à 2°C.
Provoquer un électrochoc
Ces "objectifs scientifiques" sont destinés à provoquer un électrochoc auprès des entreprises puisque même les "leaders climatiques" mis en valeur par le CDP adoptent très rarement des objectifs qui dépassent 2020. De plus, ils les définissent par rapport à leurs émissions à un instant T, et non pas dans l’absolu par rapport à un objectif de 2°C.
"C’est une nouvelle méthode de mesure du carbone qui peut créer un point de bascule. Cela nous permet de focaliser l’attention sur les entreprises les plus émettrices et les plus consommatrices d’énergie" explique Pedro Faria, directeur technique du CDP. Les premiers secteurs étudiés sont la production d’électricité, le ciment, l’acier, l’aluminium, la production de papier, les transports, les bâtiments commerciaux et la chimie. D’autres devraient suivre dans les mois à venir.
Envoyer un signal fort à la COP21
La publication de ces premières "allocations de carbone" est accompagnée d'une campagne, "Mind the science Mind the gap", qui encourage les entreprises à passer à l’action et à se fixer des objectifs ambitieux de réduction de leurs émissions.
Si beaucoup d’entre elles préfèrent commencer par décortiquer attentivement la méthodologie, une quarantaine - et pas des moindres - se sont d’ores et déjà engagées à participer au programme test : les françaises L’Oréal et Sodexo, mais aussi l’italienne Enel, l’américaine Mars, la suisse Nestlé ou encore le producteur électrique asiatique CLP Holdings Limited.
Les organisations partenaires de ce projet révolutionnaire espèrent avoir une centaine d’entreprises participantes à la fin de l’année, afin d’envoyer un signal fort aux négociateurs de la COP21. Cette campagne fait partie de toutes les opérations de mobilisations menées par les ONG engagées auprès des entreprises, et rassemblées sous une seule bannière, "We mean business".